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Avant Mohamed Ziane, sept ministres et ex-ministres placés sous les verrous

Neuf mois après sa condamnation en première instance, la Cour d’appel de Rabat a confirmé, lundi, la peine de prison prononcée à l’encontre de l’avocat, ancien bâtonnier et ex-ministre des droits de l’Homme Mohamed Ziane. La Cour a ainsi ordonné l’arrestation du concerné et son placement en prison, sur la base d’une requête du Parquet général dans le cadre des articles 392 et 414 du Code de procédure pénale, indique un communiqué du Procureur général du roi près la Cour d’appel de Rabat, transmis lundi à la MAP.

Mohamed Ziane, 79 ans et qui a été reconnu coupable de plusieurs chefs d’accusation, était poursuivi jusque-là en état de liberté provisoire. Il a été accusé, entre autres, de «délits d’outrage à des fonctionnaires de la justice et à des fonctionnaires publics lors de l’exercice de leurs fonctions par la profération de paroles et de menaces portant atteinte à leur honneur et au respect dû à l’autorité qu’ils représentent», «outrage à corps constitué» et «propagation d’allégations visant à influencer le cours de la justice avant la publication d’un jugement qui n’est susceptible d’aucun recours et dénigrement de décisions de la justice».

Mais avant Mohamed Ziane, d’autres ministres ont déjà été incarcérés au Maroc, bien que l’histoire moderne du royaume n’ait pas vu beaucoup de condamnations de responsables gouvernementaux. L’histoire retient ainsi une première arrestation de six ministres sous le règne du roi Hassan II et une seule sous le règne du roi Mohammed VI.

Pan Am et les six ministres sous Hassan II

Ainsi, au début des années 70, le roi Hassan II envoie le général Mohamed Medbouh aux États-Unis, qui apprend lors de sa visite que de hauts responsables marocains, dont des ministres, auraient exigé de la société américaine Pan Am de leur verser des pots-de-vin. En retour, ils auraient promis à l’entreprise de lui permettre de réaliser un grand projet de complexe touristique sis la place de la Ligue arabe à Casablanca.

Les détails de l’incident, rapportés par le chercheur Abdelhay Bennis dans «L’encyclopédie des gouvernements marocains 1955/2016», indiquent que Mohamed Medbouh en a informé Hassan II. Le souverain aurait initialement donné l’ordre de ne pas poursuivre les suspects. Toutefois, après la tentative de coup d’État du 9 juillet 1971 à Skhirate, le monarque décide de rouvrir le dossier. Les personnes impliquées, qui ont nié toutes les charges retenues contre elles, ont été arrêtées et la justice a décidé de les poursuivre en cas d’arrestation.

Les accusés sont Abdelhamid Karim, ministre du tourisme, Mohamed Jaidi (Commerce et industrie), Mamoun Tahiri et Abdelkrim Lazrak (Finances) et Yahya Chefchaouni et Mohamed Imani, respectivement ex-ministre des Travaux publics et secrétaire d’Etat aux Travaux publics et au transport, en plus d’un certain nombre de hauts fonctionnaires. Les audiences du procès commencent le 11 octobre 1972 alors que les verdicts seront prononcés le 15 décembre.

Finalement, Yahya Chefchaouni est condamné à 12 ans et une amende de 10 000 dirhams, contre 10 ans et une amende de 10 000 dirhams pour Mamoun Tahiri et 8 ans et une amende de 5 000 dirhams pour Mohamed Jaidi. Le tribunal condamne aussi Mohamed Imani pour corruption, mais il sera libéré car son affaire a été commise avant 1965. Abdelkrim Lazrak sera, quant à lui, acquitté.

Après avoir passé une courte période à la prison de Laalou de Rabat, le dossier sera finalement classé et les ministres, libérés, rentrent chez eux.

Khalid Alioua et l’affaire du CIH

En 2009, la Cour des comptes sort un rapport épinglant la gestion du Crédit immobilier et hôtelier (CIH), banque publique marocaine dirigée jusque-lors par Khalid Alioua. Ancien membre de l’Union socialiste des forces populaires (USFP), ce docteur en sociologie politique était porte-parole du gouvernement d’alternance et ministre du Développement social, de la Solidarité, de l’Emploi et de la Formation professionnelle (1998-2000). De 2002 à 2004, il occupe aussi le poste de ministre de l’Enseignement supérieur avant d’être nommé patron du CIH.

Trois ans après ledit rapport, Khalid Alioua est poursuivi pour détournement de fonds publics et abus de pouvoir. Son dossier est d’abord renvoyé devant la justice en février 2012, avant d’être empêché de quitter le territoire national un mois plus tard. Son arrestation aura lieu en juin 2012. Alors que sa défense était dirigée par Driss Lachgar, actuel Premier secrétaire du parti de la Rose, sa formation politique tente du lobbying pour le libérer avant de baisser les bras et abandonner l’idée.

En mars 2013, l’ancien ministre est toutefois autorisé à quitter la prison d’Oukacha à Casablanca, le temps d’assister aux funérailles de sa mère. Il ne remettra plus les pieds en prison depuis cette date, bien qu’il n’ait été libéré qu’avec un permis de seulement 4 jours.

Depuis, Khalid Alioua a repris sa vie. L’entreprise de consulting qu’il dirige remporte même, un an après sa libération, un marché public du ministère de l’Artisanat, en réalisant une étude pour empocher un peu moins de 1 millions de dirhams. En 2016, l’ancien responsable renoue avec ses activités politiques, en prenant part à un événement organisé par l’USFP. Parallèlement, il sèche plusieurs convocations du juge d’instruction avant de comparaitre en novembre 2018, accompagné de son avocat Driss Lachgar.

En 2020, soit sept ans après sa libération, le dossier est alors «déterré» avec l’arrivée d’un nouveau juge d’instruction qui le convoque à nouveau. Le dossier semble toutefois retourner à sa place dans les tiroirs de la Cour d’appel de Casablanca.


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