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Charifa Zemouri relie science, société et politique aux Pays-Bas

Née en 1987 à Amsterdam, aux Pays-Bas, Charifa Zemouri a une petite histoire qui a façonné sa passion pour les maladies infectieuses et la santé publique. «Quand j’étais petite, ma mère parlait toujours de « ne pas ramener de microbes de la rue à la maison ». Ces minuscules créatures que nous ne pouvions pas voir et qui pouvaient causer tant de maladies, me fascinaient», confie-t-elle à Yabiladi.

«J’adorais la façon dont les interactions, les comportements, les croyances, la culture et les traditions des gens évoquaient la transmission des maladies. J’aime la santé publique parce qu’elle nous concerne tous», raconte la Néerlando-marocaine, dont la famille est originaire de Beni Ahmed, près de Chefchaouen.

Sciences, politique et santé publique

Son père est arrivé aux Pays-Bas au début des années 1970, sa mère le rejoint en 1985. Elle grandit dans un environnement où «le monde était néerlandais», tout comme son «éducation» et sa «vie». «Mais chez moi, c’était le Maroc. Être Marocaine est ma première identité, bien que dans mon expérience, cette identité a été à l’origine de problèmes, de discrimination, de racisme et de tentatives pour m’intimider», se remémore-t-elle. «En tant qu’adulte et dans ma vie actuelle, je m’identifie toujours en tant que Marocaine et Maroco-néerlandaise. Nous devons tous être ceux que nous voulons», ajoute-t-elle.

Ainsi, après un master à l’Université libre d’Amsterdam en 2013, Charifa Zemouri a travaillé dans la recherche scientifique au sein de plusieurs organismes, comme le bureau de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) aux Pays-Bas et l’Academisch Medisch Centrum d’Amsterdam.

En 2020, après l’obtention de son doctorat à l’Université d’Amsterdam, la Néerlando-marocaine est devenue, en pleine crise du Covid-19, conseillère du parti politique DENK (gauche), fondé en 2015 et dirigé par le Néerlando-marocain Farid Azarkan. «Mon travail en tant que conseillère de DENK au Parlement était très difficile. C’était facile de travailler avec les hommes que j’ai informés. Cependant, être témoin des incapacités d’autres politiciens ou du ministre de la Santé était plus compliqué», détaille-t-elle à propos de cette expérience.

«Il s’avérait que les décideurs politiques, qui prétendaient travailler sur la base de preuves, étaient plutôt guidés par leurs egos. La plupart de leurs choix étaient politiquement motivés, de manière à anticiper des élections.»

Charifa Zemouri

Une quête d’indépendance scientifique

Cette expérience était enrichissante pour le parcours de la Néerlando-marocaine. «En peu de temps, j’ai appris comment fonctionnent l’élaboration des politiques et la gestion des épidémies. Je peux utiliser toute cette expérience à l’avenir pour aider les politiciens ou d’autres décideurs sur les crises de santé publique, en tenant compte des besoins de la société», estime-t-elle.

D’ailleurs, c’est dans ce sens qu’elle a créé, en février 2022, son propre cabinet de consulting de santé publique et de recherche, baptisé «Zemouri Public Health Research and Consultancy». «J’ai une expertise, des connaissances et des compétences spécifiques qui peuvent être utiles si je travaille en tant que chercheure indépendante et consultante. J’aime la recherche scientifique, les maladies infectieuses, la santé publique et relier la science avec la société et la politique. J’aime aussi être libre et avoir une autonomie complète», nous explique-t-elle. «J’ai commencé au début de 2022 et, je remercie Allah, car j’ai eu de grandes opportunités. L’année 2023 s’annonce prometteuse jusqu’à présent avec d’autres beaux travaux et collaborations», annonce-t-elle.

«Je vois à quel point ma qualité de vie et de travail se sont améliorées et à quel point je suis appréciée par les gens avec qui je travaille. C’est le plus important pour moi, pouvoir subvenir à mes besoins, faire le travail que j’aime et dans lequel je suis efficace, le monétiser, fournir un bon travail à la société et être heureuse et libre. Parce que vous savez, on travaille pour vivre; on ne vit pas pour travailler.»

Charifa Zemouri

«Contribuer à la santé publique et au développement scientifique» au Maroc

Pour la chercheuse, «il y a un grand besoin d’experts indépendants critiques mais corrects, qui n’ont pas à craindre de perdre leur financement ou leur emploi s’ils s’expriment». «C’est ce qui a poussé certaines entreprises et organisations à me consulter et travailler avec moi», ajoute-t-elle.

Sur ses liens avec son pays d’origine, la Néerlando-marocaine souhaite «contribuer à la santé publique et au développement scientifique» du royaume. «Je visite beaucoup le Maroc. J’ai une assurance pour qu’à mon décès, je sois enterrée dans notre village à Beni Ahmed. J’espère pouvoir bientôt vivre entre les Pays-Bas et le Maroc», confie-t-elle.

Charifa Zemouri défend, d’ailleurs, son opinion vis-à-vis du traitement médiatique aux Pays-Bas de l’exploit historique des Lions de l’Atlas pendant le Mondial 2022 au Qatar.

«Alors que toute la région MENA et le reste du monde non occidental célébraient l’excellente performance du Maroc à la coupe du monde, les Européens et les Néerlandais en particuliers tentaient de nous enlever notre bonheur. Mais si vous le faites remarquer, comme je l’ai fait, les gens vous critiquent.»

Charifa Zemouri

Pour elle, les critiques portent même atteinte à sa liberté d’expression en tant que femme. «Comme si moi, une femme marocaine, je ne pouvais pas avoir ma propre opinion, vision et interprétation qui ne soit pas conforme à celles des Néerlandais blancs», conclut-elle.


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