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En temps de famine, les Marocains mangeaient du porc, des chats et même de la chair humaine  

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Frappé par plusieurs catastrophons naturelles aux fils des siècles, le Maroc n’a pas échappé à des phénomènes dont plusieurs pays du globe ne sont pas fiers, comme la consommation des animaux domestiques et d’insectes, ou même le cannibalisme.

Ainsi, durant la famine de 1661-1663, les Marocains, affamés, se sont tournés vers une nourriture non conventionnelle pour survivre. A l’époque, «tout animal [servait] ainsi d’aliment de secours : animaux sauvages, mais aussi animaux d’entourage», écrit le docteur en histoire et professeur d’Histoire sociale, Mohamed Houbaida, dans «Le Maroc végétarien, 15ème-18ème siècles : histoire et biologie» (Editions Eddif, 2008).

«Les sources rapportent que les gens s’adonnent à la viande d’âne, qui fait même l’objet d’un commerce public à Fès», ajoute-t-il. Et de préciser que les chiens et chats semblent être «très appréciés» en ces temps. « »Il ne reste plus un chat dans le village », dit Al-Ayyashi au sujet de la famine de 1661-1663», poursuit l’historien.

Dans son livre «Epidémie et famines», Mohamed Al Amine Al Bazzaz affirme aussi que les Marocains se sont attaqués aux animaux domestiques, comme les chiens et chats, après avoir consommé de la viande de porcs et de charogne. Il cite même des fatwas qui, saisis par la population à propos de ces sujets, en autorisaient la consommation.

«Les oulémas considéraient que celui qui est obligé peut manger des animaux illicites et des charognes. Cela lui est permis pour se sauver de la mort.»

Mohamed Al Amine Al Bazzaz

La viande de chat «recommandée» dans les repas

Durant ces temps difficiles, les Marocains s’habituaient à «certains aliments de disette convenant à leur goût, et ils les adoptent progressivement», poursuit Mohamed Houbaida.

Revenant à l’histoire de la consommation de chat, «que l’on a mangé pendant la famine de 1661-1663 et même avant vraisemblablement», il assure que ce félin était devenu «à partir du XVIIIème siècle, semble-t-il, un aliment ordinaire» pour les Marocains. «Des textes aussi bien arabes qu’étrangers le confirment. William Lemprière atteste en 1789 que « les chats sont recommandés » pour les repas, dans la région du Gharb», raconte-t-il.

Il cite aussi «Ibn Hmadoush [qui], voyageant entre Fès et Tétouan à la même période, témoigne du même phénomène : des hommes mangeant du chat domestique alors qu’ils ne manquent pas de bonne viande».

Mohamed Houbaida indique ainsi que le chat était «préparé comme s’il s’agissant du mouton», alors que les Marocains en faisaient même une «bouilli».

Illustration. / DRIllustration. / DR

L’adaptation a également concerné certains insectes, comme les sauterelles. «Quand ces insectes dévastent les cultures, les paysans en font « une grande consommation ». John Drummond Hay dit qu’une personne peut (en manger) deux à trois cents à la fois sans en être incommodé», détaille l’auteur du «Maroc végétarien».

«Autre cas d’adaptation: la salaison de sauterelles, surtout les plus grandes d’entre elles, celle « ayant deux pouces de long et un d’épaisseur ». Thomas Pellow rapporte sur la région du Haut Atlas occidental: « les gens du pays les nettoient, puis les plongent dans la saumure et après les avoir fait cuire les mettent dans du sel pour les conserver ». Le captif anglais trouve qu’elles sont «bonnes à manger et d’un goût qui ressemble à celui des crevettes.»

Mohamed Houbaida

De l’anthropophagie aux comportements presque inhumains

Et d’ajouter que les Marocains affamés se nourrissaient encore de grenouilles, de lézards, de scorpions, d’escargots, tout comme certaines plantes. Celles-ci avaient ainsi changé de fonction, comme «les cardons [ayant figuré] dans la garniture du couscous» ou encore «la mauve [ayant fini] par conquérir les goûts, donnant un plat ressemblant par la couleur aux épinards que les citadins assaisonnent d’olives et de citrons confits», précise-t-il.

Mais la succession de catastrophes naturelles et de tragédies a fait que même ces aliments et ces animaux n’étaient pas suffisants. «Quand la sécheresse dure plusieurs années, la famine enregistre des cas extrêmes : l’anthropophagie», ajoute l’historien. En témoigne «la crise géante de 1661-1663 où les hommes furent réduits à manger de la chair humaine», rapporte-t-il en citant Ad-Du’ayyif qui atteste que les gens ont mangé la chair humaine, au vu et au su de tout le monde, dans le quartier de Saffarin à Fès. «La faim transforme complètement la vie de l’homme», conclut-il.

Illustration du cannibalisme en Europe aux XVIe et XVIIe siècles. / DRIllustration du cannibalisme en Europe aux XVIe et XVIIe siècles. / DR

De son côté, Mohamed Al Amine Al Bazzaz précise qu’en termes de famine, certains, incapables de subvenir à leurs besoins et ceux de leurs familles, se débarassaient ou vendaient leurs enfants et leurs femmes. L’auteur de «Epidémie et famines» cite ainsi l’exemple d’un homme à Essaouira qui a tenté d’enterrer son bébé vivant avec la dépouille de sa mère qui venait de décéder.

«Il avait été condamné à faire le tour de la ville à dos d’âne dans les ruelles de la ville et de subir 300 coups de fouet», conclut-il.


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