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La France, Wagner et l’Algérie 

Le parlement français a voté une résolution visant à mettre le groupe paramilitaire russe Wagner sur la liste des organisions terroristes de l’Union européenne. Un tournant politique qualitatif dans ce bras de fer gigantesque qui oppose Paris à Moscou autour de l’influence de plus en plus croissante de cet instrument de guerre de Vladimir Poutine en Ukraine, en Afrique et au Moyen Orient.

La diplomatie française a été la première à dénoncer les graves violations des règles de guerre de Wagner et à pointer du doigt sa sanglante ingérence dans de nombreux conflits régionaux.

A commencer par la Syrie où Wagner aurait commis de terribles atrocités qui n’ont rien à envier en termes d’horreur à celle commise par Daesh, en passant par la Libye où les Russes de Wagner aux côtés de forces turques de Tayeb Erdogan, ont maintenu le pays dans le chaos et l’instabilité, jusqu’en Ukraine où ils tentent désespérément de plier le match militaire au bénéfice de Moscou sans grand succès pour le moment, mais en commettant les pires atrocités, selon les rapports des organisations internationales.

Tenter de mettre Wagner sur les listes des organisations terroristes n’est pas anodin. Bien au contraire, c’est une décision d’une grande valeur politique symbolique. Elle augmentera l’épaisseur de l’arsenal punitif à l’égard du régime de Vladimir Poutine qui ne reconnaît pas l’existence légale des mercenaires de Wagner et qui les utilise pour exécuter ses sales besognes et se livrer à une guerre d’influence sans merci contre des concurrents internationaux à la Russie comme la France.

Si le projet d’incruster Wagner dans la liste des organisations terroristes de l’Union européenne est couronné de succès, il remettra en cause de nombreuses perceptions et alliances politiques régionales. A titre d’exemple, Wagner n’a pas réussi ses objectifs militaires dans certains zones africaines de manière aussi fulgurante sans aides et complicités de certains États de la région. Dans la zone du Sahel où Wagner s’est lourdement installé, le rôle de facilitateur joué par le régime militaire d’un pays comme l’Algérie est évident.

En témoigne l’intimité stratégie qui lie les deux pays, l’Algérie et la Russie, concrétisée par des manœuvres militaires communes dans cette région sur fond de spectaculaires contrats d’achats d’armements russes par l’armée algérienne. C’est d’ailleurs cette situation particulière entre Alger et Moscou qui est à l’origine de la colère américaine et de la méfiance contre le régime algérien, une colère qui va jusqu’à imaginer des sanctions américaines et internationales contre Alger.

Si demain le groupe Wagner est officiellement mis sur la liste des organisations terroristes de l’UE, un élément politique majeur va intervenir dans les relations entre la France et l’Europe, d’une part et le régime algérien, d’autres part.

Ce dernier se verra dans l’obligation de clarifier ses relations avec le groupe Wagner, en particulier et avec la Russie de Vladimir Poutine, en général, pour ne pas être accusé de complicités avec une organisation terroriste, en lui prêtant aides et assistance et facilitant les conditions de son épanouissement dans la région du Sahel.

Cette décision de qualifier Wagner d’organisation terroriste va interpeller en premier lieu la vision qu’a le président français Emmanuel Macron du régime algérien. Il ne pourra pas batailler dans les forums internationaux pour tenter d’affaiblir une organisation paramilitaire russe dont la stratégie militaire et d’influence est un danger mortel pour les intérêts vitaux de la France dans la région du Sahel et en même temps fermer les yeux sur les facteurs objectifs qui apportent de l’aide structurelle au renforcement et à la domination de cette organisation.

D’une manière ou d’une autre, si ce projet politique de mettre Wagner sur la liste des organisations terroristes, la vision d’Emmanuel Macron du régime algérien subira de plein fouet ses conséquences politiques. Il paraît certain que ce point sensible de la complicité des militaires algériens avec Wagner est au cœur du dialogue sécuritaire que les Français entretiennent avec les responsables algériens, notamment la hiérarchie militaire comme lors de la récente et inédite visite à Paris du patron de l’armée algérienne Saïd Chengriha.

Que Wagner soit officiellement reconnu comme organisation terroriste, et tous les pays qui lui apportent aide et assistance dans le cadre du partenariat avec Moscou seront passibles de complicités avec le terrorisme international. Ils se mettraient automatiquement au ban des nations et deviendraient les alliés objectifs de la menace terroriste qui pèse sur certaines régions où Wagner s’est implanté.

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