ActualiteChallenge

Le financement public des partis politiques s’opère dorénavant dans la transparence

[ad_1]

C’est un parti politique (PP) qui a des racines historiques et sociales, en particulier dans le monde rural. Créé en 1957, il a été le premier à poser la question de l’amazighité du peuple marocain, alors que cette question avait presque un caractère tabou, voire « anti-indépendance », compte tenu de la confusion créée auparavant par le colonialisme avec le fameux « dahir berbère », en 1930. Mais, ce tabou se dissipera grâce au militantisme et à l’abnégation des militants du Mouvement Populaire (MP), dont la plupart ont été des membres de l’armée de libération nationale. Le MP a aussi été un acteur déterminant dans la consécration du pluralisme politique et culturel. Après les élections de 2021, le MP fait partie de l’opposition parlementaire d’où il contribue, de manière critique et constructive, aux grandes réformes sociales. Avec le secrétaire général du parti du Mouvement populaire Mohamed Ouzzine, le MP a l’ambition de réconcilier ses militants, intégrer les valeurs de transparence, reconstituer ses forces et continuer à œuvrer pour la stabilité et le progrès de la nation marocaine. Propos recueillis par M. Amine.

Challenge : Quels sont d’après vous le poids et l’importance du financement public au profit des PP ?

Mohamed Ouzzine : D’emblée faut-il préciser que le financement des PP au Maroc est régi par une nouvelle loi organique n° 07-21 modifiant et complétant la loi organique n° 29-11 qui, conformément à l’article 7 de la Constitution, détermine les règles relatives à  la création et aux activités des PP, leur régime de financement et les modalités de son contrôle, ainsi que les critères d’octroi du soutien financier de l’Etat.

Convaincu du rôle vital des PP dans l’organisation démocratique du pays sur la base du pluralisme politique et compte tenu du fait que toute activité politique suppose des dépenses appropriées, le Maroc a fait le choix du financement public des PP depuis 1986, notamment par la contribution au financement des campagnes électorales de 1992 et de 1993.

Lire aussi | Mediterrania Capital s’offre le quart du capital de Laprophan

En effet, pour mener à bien ses missions d’organisation, de représentation et d’encadrement, tout Parti Politique légalement constitué a le droit de disposer de ses ressources financières qui comprennent, outre les ressources financières propres (cotisations de ses membres, dons et legs, revenus liés à ses activités sociales ou culturelles et les produits d’investissement dans les entreprises de presse et de media), le soutien de l’Etat est destiné à couvrir en partie des frais annuels de gestion et des frais d’organisation de son congrès national, ainsi que le financement public de ses campagnes électorales.

Si, au cours de la dernière décennie, plusieurs PP recourent à des ressources propres pour couvrir leurs frais de gestion, il n’en demeure pas moins que le soutien de l’Etat demeure la source prépondérante dans le financement de l’ensemble des dépenses des PP, dès lors qu’il varie entre 60% et 100% des ressources financières totales.  Le dernier rapport de la Cour des Comptes confirme cette tendance lourde observée depuis le début des années 1990.

Aussi, faut-il souligner que le financement public diffère de manière significative entre les Partis Politiques. A titre d’illustration, le soutien de l’Etat des PP pour l’exercice 2021, différencie, grosso modo, trois cas : (1) les PP dépendant du financement public pour 60 à 70 % de leurs ressources financières (RNI, PPS, PJD, UC) ; (2) les PP pour lesquels le soutien de l’Etat représente entre 80 et 90 % (MP, PAM, PI, USFP) et, (3) les PP entièrement financés par l’Etat (le reste des 28 PP bénéficiaires).

Lire aussi | Abdelouahed Radi, l’emblématique USFPiste n’est plus

Par ailleurs, en dépit du poids significatif et de la grande importance du concours public dans le financement des PP, d’aucuns pensent que cet appui de l’Etat serait insuffisant eu égard d’une part, à l’ampleur des dépenses encourues par les Partis Politiques pour accomplir leurs activités courantes et organiser des campagnes électorales et d’autre part, aux difficultés rencontrées par les PP à organiser des levées de fonds propres nécessaires.

Challenge : D’après-vous, l’accès au financement public par les PP est-il suffisamment équitable et transparent ?

M.O : Par le passé, surtout avant l’adoption de la législation spécifique au financement des formations politiques en 2006, force est de constater que le soutien financier de l’Etat se faisait de manière sporadique et opaque, dans la mesure où le financement public constituait un outil de négociation et de dissuasion aux mains des pouvoirs publics pour fixer les règles du jeu politique.

En revanche, avec l’adoption de la Constitution de 2011, une nouvelle loi organique n°07-21 modifiant et complétant la loi organique n°29-11 a été promulguée pour ainsi parer aux échecs de fonctionnement du jeu politique, clarifier et épurer les relations ambiguës entre l’argent et la politique et améliorer les finances des PP.

Lire aussi | Ces influenceurs pas comme les autres qui font « aimer » et « adorer » le Maroc [Vidéos]

Le financement public des PP s’opère dorénavant dans un cadre législatif et réglementaire normalisé prévoyant des mécanismes d’équité, de reddition de comptes et de transparence. Ainsi, la nouvelle législation définit les règles de répartition du concours financier de l’Etat entre les différents PP (e.g. nombre de voix obtenues conjugué au nombre de sièges recueillis par le parti), permet aux formations politiques n’ayant  pas assez de ressources de participer aux élections et met en place des instruments nécessaires pour réglementer les finances des PP à travers la rationalisation de leurs dépenses et le contrôle des flux financiers et de leur affectation.

Challenge : Quelles sont les principales difficultés ou faiblesses rencontrées dans la mise en œuvre du plan comptable spécifique aux PP ?

M.O : En fait, conformément à la nouvelle législation, les PP sont appelés à adopter un système comptable adéquat susceptible de dégager une image fidèle et sincère de leur patrimoine et du résultat financier, et de renseigner sur les conditions d’utilisation des fonds alloués tant bien par l’Etat que par les autres pourvoyeurs (adhérents et donateurs).

Ainsi, pour accompagner l’implémentation de la nouvelle législation spécifique au financement public des PP, un arrêté conjoint du Ministre de l’Intérieur et du Ministre chargé des Finances a été promulgué en 2009 pour mettre en place un plan comptable normalisé (PCN) des PP, dans le respect des prescriptions d’organisation comptable telles que prévues par le Code Général de Normalisation Comptable (CGNC).

Lire aussi | Le Bangladesh s’apprête à acheter 40.000 tonnes d’engrais auprès de l’OCP

Toutefois, la pratique révèle que la mise en œuvre de cette réforme visant le renforcement de l’information financière et comptable sur l’activité des PP, fait face à de nombreuses contraintes dont nous retenons deux essentiellement :

  1. Les spécificités des PP marocains portant effectivement sur le nombre et la compétence de leurs ressources humaines en matière de gestion financière et comptable, la structuration des PP aussi bien au niveau central qu’au niveau régional permettant la mise en place et la bonne gestion d’un système d’information et de data à même de répondre aux exigences du PCN, ainsi que l’engagement notamment des élus et des candidats aux élections à respecter les règles et procédures en vigueur ;
  2. Les défaillances dans la gestion financière et comptable des PP.  Par référence aux rapports de la CC relatifs à l’audit des PP, notamment  celui de l’exercice 2021, ces défaillances sont dues en particulier à:
    1. L’imputation de certaines opérations comptables dans des comptes inappropriés ;
    1. La non-comptabilisation des montants du soutien à restituer au Trésor public ;
    1. Le non-respect des règles de tenue du compte caisse ;
    1. Le non-respect des adaptations prévues par le PCN des PP.

Challenge : Quelles solutions préconiser pour faire face à ces faiblesses, soulignées par la Cour des Comptes (CC) ?

M.O : En guise de solutions aux contraintes évoquées auparavant, la CC recommande dans son dernier rapport d’audit des PP au titre de l’exercice 2021, plusieurs pistes d’amélioration, nous en citons essentiellement :

  1. Le développement des capacités de gestion des PP, notamment à travers le renforcement de leurs structures administratives et de leurs ressources humaines ;
  2. L’amélioration de la gestion financière et comptable des PP ;
  3. La transparence des comptes des PP ; 
  4. Le respect des principes et règles comptables, en l’occurrence le principe de clarté et les règles d’exhaustivité et d’intangibilité du bilan ;
  5. L’appui de formation ciblée au profit des cadres de PP chargés de la gestion administrative, comptable et financière et d’autre part, dans l’élaboration d’un manuel des procédures comptables et de mise en place d’un système d’information unifié et simplifié dans le cadre du PCN des PP.


Continuer la lecture

Afficher plus
Bouton retour en haut de la page