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Le soulèvement des Casablancais contre l’assassinat de Ferhat Hached

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Le peuple maghrébin célèbre du 5 au 8 décembre, l’anniversaire de la disparition de syndicaliste tunisien Ferhat Hached et des soulèvements qu’ont connu plusieurs villes du grand Maghreb à l’instar de Casablanca. «Une étape héroïque dans la lutte du peuple marocain aux côtés de ses frères maghrébins pour le recouvrement de la liberté et l’affranchissement du joug colonial», indique la dépêche de l’agence MAP publiée chaque année pour commémorer ces dates.

Le 5 décembre 1953, le Secrétaire général de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) quitte au beau matin Radès, la ville de la banlieue sud de Tunis pour se rendre dans la capitale. Il est alors au centre d’une campagne médiatique visant à le discréditer et reçoit depuis plusieurs semaines des menaces et des accusations des ennemis du mouvement pro-indépendance de la Tunisie.

Le décès à l’origine des manifestations des syndicalistes arabes

Né le 2 février 1914 à El Abbassia, Ferhat Hached fut l’un des principaux chefs de file du mouvement nationaliste tunisien avec plusieurs autres noms de grandes figures de ce mouvement, à l’instar d’El Habib Bourguiba et Salah Ben Youssef. Peu après avoir quitté sa maison ce jour-là, Farhat Hached est attaqué par un commando véhiculé au niveau d’une rue. Une vingtaine de balles s’abattent sur la voiture du leader syndical avant que les hommes armés quittent les lieux. Mais la balle mortelle proviendra de l’arme à feu d’un deuxième commando, venu achever le boulot du premier. Le syndicaliste tunisien décède alors des suites d’une balle en pleine tête et son corps est retrouvé à quelques kilomètres du lieu du drame.

L’annonce de son assassinat provoque alors une série de manifestations d’abord à Tunis. D’autres mouvements de protestations éclatent aussi dans plusieurs villes maghrébines et dans le monde arabe. A Casablanca, «des émeutes sanglantes ont éclaté dans la ville blanche faisant plusieurs morts et blessés, avant de faire tâche d’huile et s’étendre ainsi à travers tout le Royaume, sous forme de manifestations et d’autres actes de protestation», indique l’agence MAP.

Le boulevard Gouraud et les bâtiments administratifs de Casablanca en 1920. /DRLe boulevard Gouraud et les bâtiments administratifs de Casablanca en 1920. /DR

Une centaine de morts et plusieurs bilans des affrontements à Casablanca

«L’assassinat de Ferhat Hachad a été pour les forces nationalistes et les acteurs syndicalistes la goutte qui avait fait déborder le vase du désespoir des milieux populaires et avait fait jaillir les désirs de liberté et d’indépendance, auprès des couches sociales populaires excédées par les différentes formes d’humiliation, de violations et de tortures commises par l’occupant», poursuit la même source.

Mais que s’est-il passé réellement à Casablanca ? Le soulèvement des 7 et 8 décembre 1959 est raconté par Julien Charles-André (L’Afrique du Nord en marche) et Mohamed Abed El-Jabri (Le Parti, le Syndicat … et la Zaouia…) et rapporté par le média Oumma.

Le 6 décembre 1952, les syndicalistes de Casablanca décidèrent d’organiser un rassemblement le dimanche 7 décembre. Un meeting qui se déroula sans incident. L’annonce de l’interdiction de manifester et de faire grève est relayée dès le soir, mais les prémices des émeutes débutent déjà au niveau du bidonville des Carrières centrales entre habitants et forces de l’ordre.

Un cortège important de manifestants est alors formé mais il est bloqué puis attaqué devant le commissariat des Carrières centrales. Des renforts militaires ont ensuite été déployés dans le quartier pour réprimer la manifestation. Le lendemain, une nouvelle manifestation des centrales syndicales est alors brutalement attaquée par les forces de l’ordre.

Vue aérienne du bidonville Carrières centrales à Casablanca en 1953. / Michel EcochardVue aérienne du bidonville Carrières centrales à Casablanca en 1953. / Michel Ecochard

Charles-André Julien indiquait dans son ouvrage que le bilan de la répression a été «difficile à évaluer et variait très nettement selon les points de vu». Ainsi, le bilan officiel faisait état de quarante Marocains et sept Européens tués. Une centaine, voire trois à quatre cent personnes tuées selon d’autres bilans. Le parti de l’Istiqlal évoquait à l’époque une liste de 269 noms de personnes disparues et une seconde de 400 personnes, indique, de son côté, Mohamed Abed El-Jabri. Au Maroc, la lutte armée est alors déclenché après l’annonce, quelques temps après ces émeutes, de l’interdiction du parti de l’Istiqlal.

D’autres manifestations se sont aussi déroulées au Caire, à Damas, à Beyrouth, à Karachi, à Jakarta, à Milan, à Bruxelles et même à Stockholm. L’assassinat de la figure syndicale tunisienne avait indigné plusieurs responsables et syndicalistes maghrébins. Son décès est l’une des rares questions qui avaient réussi à unir les peuples du grand Maghreb. Son assassinat est jusqu’à aujourd’hui attribué à la Main Rouge, une obscure organisation armée qui faisait le sale boulot du protectorat français.


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