Maroua Daoudy écrit pour guérir et donner un sens à sa vie

Le confinement sanitaire pour lutter contre la pandémie du Covid-19 a été une expérience inédite pour beaucoup de personnes. La Franco-marocaine Maroua Daoudy est l’une des personnes qui l’ont vécu très mal, car ayant coïncidé avec son divorce et l’entame d’une nouvelle expérience ; celle de vivre toute seule. De cette expérience particulière est né «Le marécage», un livre où elle revient sur ce périple au fond d’elle-même pour se retrouver et donner un sens à sa vie, où plusieurs lecteurs se reconnaissent.

Née en 1988 à Mohammedia, la Franco-marocaine a intégré les classes préparatoires au Lycée Mohammed V de Casablanca après un baccalauréat en sciences mathématiques. Elle décroche plus tard, son diplôme d’ingénieur de l’Institut national de statistique et d’économie appliquée (INSEA) à Rabat et travaille deux ans au Maroc avant de s’envoler vers la France.

Divorce, sollitude et confinement

Petite, elle écrivait beaucoup et était passionnée par les langues. «Ma passion était d’ouvrir le dictionnaire, de chercher des mots délicieux et de les mémoriser pour les employer», confie-t-elle à Yabiladi. Elle apprend même l’anglais en mode «autodidacte» et se forçait à écrire dans la langue de Shakespeare. A l’âge de 16 ans, elle rédige même une histoire de 120 pages. Une passion qu’elle nourrit même une fois en classes préparatoires mais qui s’arrête à l’âge de 19 ans.

«La tristesse m’inspirait. Il fallait paradoxalement que j’aille très mal pour écrire. C’était aussi un cercle vicieux car j’avais tendance à me relire à chaque fois, ce qui renforçait et ancrait ce sentiment de tristesse. Ecrire me libérait sur le moment avant de me faire replonger à nouveau.»

Maroua Daoudy

En 2013, elle rejoint son ex-mari, déjà installé en France et reprend en même temps ses études, dans le cadre d’un master spécialisé à l’École nationale supérieure d’arts et métiers (ENSAM) à Paris en gestion des risques. «C’était pour joindre l’utile à l’agréable, car je pensais que je ne pouvais pas travailler en France avec mon diplôme marocain. Je me suis finalement rendue compte qu’un diplôme marocain d’ingénieur a beaucoup de valeur en France», explique-t-elle. La Franco-marocaine parvient, plus tard, à décrocher un poste de consultante chez un courtier d’assurances pendant trois ans avant de changer d’entreprise.

Mais en 2019, son mariage est en difficulté. La séparation est actée en février 2020, à quelques semaines de la pandémie du Covid-19 et du confinement en France. «Je venais à peine de m’installer dans un nouvel appartement toute seule. Mes cartons n’étaient pas tous déballés», se souvient-elle.

«Déjà le fait de vivre toute seule était dur pour moi. En plus, comme je n’étais pas à l’initiative de la séparation, je n’avais pas bien digéré et n’avais pas bien compris. Pour toute séparation, il y a une phase de deuil qu’il faut vivre. Le Covid-19 n’a pas non plus arrangé les choses.»

Maroua Daoudy

Un livre où les gens se reconaissent

Du jour au lendemain, la Franco-marocaine raconte s’être retrouvée «enfermée dans une petite surface de 28 mètres carrés, tout seule», alors que son métier, qu’elle exerce en télétravail, ne la passionnait pas. Plusieurs facteurs qui l’ont ainsi fait plonger dans une dépression.

C’est grâce à différentes thérapies mais surtout à l’écriture qu’elle surmontera cette situation. Lancé pendant le deuxième confinement en France, ce processus donnera naissance à son livre, baptisé «Le marécage». «C’était une satisfaction personnelle d’aller au bout de mon challenge et de mon rêve d’enfant. Pendant un an, le livre était rangé. Je l’avais aussi présenté à des personnes de mon entourage. A cette occasion, plusieurs m’ont confié qu’ils se sont retrouvés dans certains passages», se rappelle-t-elle. C’est finalement une amie qui lui conseille de publier son ouvrage. Séduite par l’idée, elle reprend alors son récit et le retravaille après avoir consulté son ex-mari et ses parents qui sont cités dans son ouvrage afin d’obtenir leur accord.

Une fois cette démarche achevée, elle envoie son manuscrit à plusieurs maisons et finit par être contactée par les éditions Maïa. Une fois le livre publié, la Marocaine a eu des retours «identiques à ceux» des personnes de son entourage, qui ont apprécié le récit.

«Plusieurs personnes m’ont dit qu’elles se sont retrouvées dans certains passages. Ce qui m’a agréablement surpris, c’est d’avoir eu des retours d’hommes, alors que je pensais que je n’allais toucher que des femmes ayant mon profil. L’une d’elles m’a dit que mon livre lui a permis de mieux comprendre sa femme. Certains ont indiqué que le livre se lit vite ou encore que c’était très touchant et d’autres m’ont confié qu’ils ont pleuré en lisant certaines parties.»

Maroua Daoudy

«Partager les expériences et les enseignements»

L’auteure révèle que son livre lui a permis de «retrouver» sa confiance en soi, de confirmer certains aspects de sa personne et la découverte de personnes partageant les mêmes centres d’intérêts qu’elle. «Le livre m’a ouvert la porte vers la découverte de personne que je ne connaissais pas avant et avec lesquelles j’échange et je partage, ce qui est une grande richesse», indique-t-elle. Le livre l’a également aidée à faire évoluer sa relation avec ses parents, surtout sa mère. «En lisant, elle s’est rendue compte qu’il y avait beaucoup de non-dit entre nous et cela nous a permis de discuter de ces choses-là et de lui raconter comment j’ai vécu la situation. C’était pour moi hors de prix», ajoute la Marocaine.

Maroua Daoudy confie avoir repris l’écriture en travaillant sur cinq projets, dont un roman qui ont la même finalité : «partager les expériences et les enseignements pour aider les autres à être biens et à améliorer des choses dans leurs vies.»

Le fait d’être immigrée en France a été, pour la Marocaine, «très formateur». «Il y a beaucoup de choses que j’ai apprises et des concepts que j’ai changés par le fait de vivre à l’étranger. Lorsqu’on vit dans son pays, on est semblables à tous ceux qui nous entourent. Vivre à l’étranger équivaut à faire face à la différence de l’autre et c’est là qu’on se rend compte qu’il faut s’adapter à cette situation» tout en gardant son identité, confie-t-elle, en expliquant qu’elle se sentait «isolée et différente» lorsqu’elle était arrivée en France.

«J’ai dû aussi faire face à moi-même. Etant loin de ma famille, j’ai dû compter sur moi-même. Ça m’a fait évoluer par le fait de découvrir d’autres choses et d’autres problématiques. C’est là où j’ai eu à faire face à de nouvelles situations personnelles mais aussi là où j’ai eu plus facilement accès à la thérapie, au coaching et ces choses qui m’ont aidée à me construire», reconnait-elle.

«Le marécage» sera disponible très prochainement dans certaines librairies au Maroc. En attendant, il est aussi livré gratuitement depuis le site de la maison d’édition.


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