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Quand une bombe nucléaire a pris feu dans une base militaire US à Sidi Slimane

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En janvier 1958, les Marocains ne furent pas au courant de l’incident qui faillit ravager le royaume à cause d’une bombe nucléaire. La base aérienne de Sidi Slimane, une installation militaire construite en 1951 et utilisée à ce moment-là par le Strategic Air Command (SAC), le commandement des forces aériennes américaines, fut le théâtre d’un grave accident. Le secret fut bien gardé pendant des années.

Le 31 janvier de la même année, un bombardier B-47 (un avion propulsé par 6 réacteurs conçu pour voler à des vitesses subsoniques à haute altitude) porteur d’une bombe à hydrogène de seconde génération prit feu, indiquent des sources militaires, relayées par le média Face2Face Africa.

Des composants nucléaires au Maroc

Sept ans avant l’incident, le Maroc était sous protectorat français. La France avait alors permis aux Etats-Unis de construire des bases militaires dans le royaume. Les Américains construisirent trois sites, dans un contexte de Guerre froide qui avait scindé le monde en deux pôles.

Toutefois, à l’insu de la France, le SAC déploya des bombardiers stratégiques vers ses bases marocaines. L’information a été confirmée par une enquête déclassifiée réalisée par l’Institut américain des analyses de défense (IDA). «Suite à une requête faite par les chefs d’Etat-Major en novembre 1951, le président en fonction en janvier 1952 a autorisé le stockage de composants non-nucléaires au Maroc sous protectorat français. Les Français ne devaient cependant pas être informés de cette opération», précise le même document.

Plus tard, l’accident survenu en 1958 a prouvé que les composants stockés dans la base de Sidi Slimane étaient d’origine nucléaire. Selon le «Bulletin of the Atomic Scientists», un journal académique sur la sécurité globale et la politique publique reliée aux dangers des menaces nucléaires, le bombardier B-47 à Sidi Slimane transportait la «Mark 36» (l’appellation de la bombe en question).

La même source décrit l’arme comme étant une bombe à hydrogène qui «fait presque la moitié du poids des premiers thermonucléaires, mais pèse dix fois plus que les nouvelles bombes produites en masse par le SAC [Strategic Air Commande].»

«La partie avant de la bombe contenait des cristaux piézoélectriques. Une fois que celle-ci touche le sol, les cristaux sont déformés et émettent un signal vers l’unité X qui active le tir des détonateurs et creuse un trou très profond. La bombe a une charge de 10 mégatonnes. C’était l’une des armes les plus puissantes des Etats-Unis.»

The Bulletin of the Atomic Scientists

La «Mark 36» en feu

La même source indique que lors du jour de l’accident, l’avion était au sol pour des exercices de manœuvre sur le tarmac. «Quand le B-47 a atteint une vitesse de près de 130 km/h, l’un des pneus arrières a explosé, causant un incendie».

Les flammes se sont rapidement propagées vers l’intérieur de l’avion. L’équipage s’est échappé au moment où l’avion s’est scindé en deux. Les pompiers ont «lutté contre l’équipement en feu pendant 10 minutes, dépassant le temps limite de la ‘‘Mark 36’’, puis se sont retirés», ajoute la même source.

Les flammes ont alors atteint la bombe et la base a été évacuée suite aux ordres du général commandant de Sidi Slimane. Certains des aviateurs ont même quitté la région et ont conduit jusqu’au désert marocain pour éviter le désastre nucléaire.

Une base américaine. / Ph. DRUne base américaine. / Ph. DR

Miraculeusement, les puissants explosifs de la «Mark 36» ont brulé mais n’ont pas explosé comme prévu. Le «Bulletin of Atomic Scientists», citant un rapport de l’accident, écrivait que «la bombe à hydrogène et des parties du bombardier B-47 ont fondu en une sorte de bloc de scories d’un poids de près de 3 600 kilos, approximativement d’une longueur de 2 mètres et d’une largeur de 5 mètres avec une profondeur de 25 cm».

L’incendie a duré deux heures et demie. Les forces sont alors intervenues pour casser les scories en petits morceaux et les mettre dans des boîtes avant de les enterrer près du tarmac. Malheureusement, la base de Sidi Slimane n’avait pas l’équipement nécessaire pour «mesurer les niveaux de contamination».

L’accident n’a pas été fatal, mais il a tout de même été gardé secret et toutes les parties impliquées ont choisi de garder le silence et suivre les ordres. Le «Bulletin of Atomic Scientists» indique que dans un premier temps, la base américaine a planifié de diffuser un communiqué pour informer le monde sur ce qui s’est passé ce 31 janvier, mais s’est rétractée en réalisant que ce n’est pas une idée judicieuse.

Lors d’une réunion concernant l’accident, un responsable du département d’Etat américain a déclaré que «le moins on en disait sur cet accident, le mieux c’était». Le roi Mohammed V a en revanche été informé de ce qui s’est passé dans la base américaine.


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