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La hausse des prix exacerbe les rivalités entre majorité et opposition

Sur fond d’une augmentation vertigineuse des prix des produits de large consommation, les partis politiques ne se font pas de cadeaux. L’échange épistolaire public entre le PPS et le RNI illustre on ne peut mieux cette réalité. C’est une bataille sans merci que se livrent les acteurs politiques et où tous les coups sont permis.

Jeudi 30 mars, le bureau politique du Parti du progrès et du socialisme (PPS) a adressé une lettre ouverte à Aziz Akhannouch, Chef du gouvernement, dans laquelle il attaque ouvertement le gouvernement et fustige son incapacité face à la montée des prix. Le dimanche 2 avril, le bureau politique du Rassemblement national des indépendants (RNI) réplique en rendant publique une lettre-réponse dans laquelle il contre-attaque et répond avec fermeté tout en essayant de mettre en avant les réalisations de l’Exécutif, en particulier sur le volet social. «Nous rejetons et condamnons le ton et les expressions utilisés dans cette lettre, tels qu’“insouciance” et “irresponsabilité”, qui malheureusement rabaissent le niveau du discours politique et reflètent un comportement bien loin de ce que les citoyens marocains attendent, des relations saines entre les partis politiques, qu’ils soient dans la majorité ou dans l’opposition». «Il est incompréhensible qu’un parti recoure à la méthode d’“Al-Bida’a” (innovation religieuse non autorisée). Il est clair que votre parti préfère plutôt vider l’opposition de sa substance et surfer sur les vagues artificielles pour envoyer un message aux relents électoralistes, loin des règles constitutionnelles et des pratiques politiques», souligne le RNI dans sa lettre, précisant que Aziz Akhannouch ne cédera pas «aux manœuvres suspectes et ne se laissera pas dicter ce qu’il a à faire».

Pour le RNI, le PPS est mal placé pour « donner des leçons » 

Mais au-delà de ces escarmouches verbales, le RNI a surtout tenu à rappeler dans sa lettre que le PPS ne peut en aucun cas s’ériger en donneur de leçons, étant donné qu’il a fait partie des deux derniers gouvernements. «Le RNI n’acceptera pas les leçons de ceux qui portent une partie de la responsabilité de la gestion de secteurs vitaux tels que l’eau, la santé, l’emploi, le logement et la politique de la ville». «Leur priorité n’est pas l’intérêt public et la stabilité sociale, mais plutôt la résolution de leurs propres crises organisationnelles et de leur échec électoral par des positions émotionnelles qui manquent de sagesse, de modération et de respect des institutions». Le Rassemblement national des indépendants considère donc que le PPS n’est pas le mieux placé pour donner des leçons, puisqu’il a épuisé son capital politique. « Malheureusement, certains partis politiques, qui ont perdu leur capital électoral et leur crédibilité politique, ont commencé à faire des échauffements médiatiques pour pousser vers l’escalade et le marchandage politique».

La réponse du RNI eu PPS « sévère et directe »

La contre-attaque du RNI a été sévère et directe. Elle a essayé de rendre la pareille à son adversaire de toujours, le PPS. Pour cela, il a eu recours au registre du dénigrement, une technique qui vise à le décrédibiliser tout en essayant de paraître aux yeux de l’opinion publique comme la victime d’un règlement de comptes.
Cet échange «épistolaire» est une technique de communication nouvelle entre partis politiques visant à prendre à témoin l’opinion publique. Il s’agit d’exposer ses arguments tout en essayant de battre en brèche ceux de l’adversaire. Cette tactique est courante dans le champ politique, mais elle est plutôt nouvelle dans le cas du Maroc. Ce genre de confrontation, malgré son caractère populiste et ses motivations électoralistes, a le mérite d’éclairer l’opinion publique et de favoriser une polémique transparente où tous les coups sont quasiment permis.

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Les lettres ouvertes en politique

Les lettres ouvertes sont un moyen courant pour les acteurs politiques d’exprimer leur opinion ou de communiquer avec le public sur des sujets politiques importants. Elles sont sont généralement porteuses de messages publics adressés à une personne ou un groupe spécifique, mais sont également destinées à être lues par un large public. Dans le contexte politique, les lettres ouvertes peuvent être utilisées de plusieurs façons. Elles peuvent être utilisées pour exprimer une position politique sur un sujet controversé, pour critiquer une politique ou une décision prise par un autre acteur politique, ou pour exprimer un soutien ou une solidarité envers une cause ou un groupe de personnes. Les lettres ouvertes peuvent également être utilisées pour mobiliser l’opinion publique en faveur d’une position ou d’une cause particulière. Les acteurs politiques peuvent utiliser les lettres ouvertes pour attirer l’attention sur un problème spécifique ou pour demander l’action du gouvernement ou des décideurs politiques.

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Hausse des prix : l’opposition affûte ses armes

La flambée des prix, qui se double de discours inconsistants et de mesures inconséquentes de la part du gouvernement pour y remédier, donne aux partis de l’opposition de quoi fustiger la majorité. Trois de ces partis, confortés par les prises de position des dirigeants de Bank Al-Maghrib et du Haut-Commissariat au Plan sur l’origine de cette inflation, n’ont pas ménagé leurs reproches au gouvernement, auquel ils attribuent la paternité des perturbations en cours. Ainsi, le Mouvement populaire demande au gouvernement d’admettre son échec patent dans le traitement de ces crises et l’inefficacité de ses solutions de replâtrage reposant sur l’atermoiement. De même, le parti présidé par Mohamed Ouzzine appelle le gouvernement à revoir sa politique financière marquée par la rigueur comptable et à adopter une loi de Finances rectificative pour rétablir les priorités et orienter les efforts vers la préservation de la paix sociale. Il en est de même pour le Parti du progrès et du socialisme qui, dans un communiqué datant du 21 mars à l’issue de la réunion de son bureau politique, avait attiré l’attention du gouvernement sur le danger de ne pas agir concrètement et d’intervenir efficacement par des mesures fortes et tangibles pour préserver la paix sociale, soutenir le pouvoir d’achat en régression des Marocains de toutes classes et mettre fin à la hausse exorbitante des prix des carburants et de l’ensemble des produits de première nécessité. Le PPS a également remis en question les assurances verbales formulées par certains membres du gouvernement qui se heurtent à la réalité et aux chiffres officiels, puisque l’indice des prix à la consommation (IPC) a enregistré une forte augmentation de plus de 10% au cours du mois de février 2023, due principalement à l’augmentation record de l’indice des denrées alimentaires de plus de 20%. Pour sa part, le Parti de la justice et du développement (PJD) a vivement critiqué «l’incapacité du gouvernement à réguler les prix et à préserver le pouvoir d’achat des citoyens». Son bras syndical, l’Union nationale du travail au Maroc (UNMT), qui vient de tenir son huitième congrès national, a vigoureusement épinglé le gouvernement pour ses mesures de lutte contre la hausse des prix, estimant qu’elles ne s’attaquaient pas à la racine du problème et ne faisaient qu’accentuer la paupérisation de la classe moyenne.


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