EconomieLe Matin

Les ingrédients pour entrer dans une nouvelle ère industrielle

Le Maroc s’apprête à franchir une nouvelle étape dans son développement industriel. Les nouveaux enjeux consistent à assurer au Royaume sa souveraineté industrielle, tout en poursuivant l’ouverture sur de nouveaux marchés à l’international. La recette pour y arriver comprend tout un mélange d’ingrédients. Une charte d’investissement promouvant l’investissement productif, un renforcement de l’investissement dans la R&D, l’innovation, la formation et le déploiement d’une offre d’accompagnement innovante à travers le Fonds Mohammed VI pour l’investissement.

Le Maroc est déterminé à inaugurer une nouvelle ère industrielle. Lors de la première édition de la Journée nationale de l’industrie, organisée le 29 mars à Casablanca, par le département de l’Industrie et la CGEM, les grandes lignes de la nouvelle stratégie de développement industriel du pays ont été dévoilées à travers La Lettre Royale adressée aux participants et qui recommande de «se préparer pleinement à inaugurer une nouvelle ère industrielle portée vers et par la notion de souveraineté. Notre pays a besoin, pour réussir ce challenge, d’une industrie intégrant de nouvelles activités et de nouveaux savoir-faire et offrant plus d’opportunités d’emploi». Il est clair donc que, parmi les composantes prioritaires de la nouvelle vision industrielle du Royaume, est la souveraineté. «La souveraineté industrielle du pays est aujourd’hui perçue à la fois comme moyen et objectif», souligne le ministre de l’Industrie, Ryad Mezzour, lors du premier panel de la Journée. En effet, la conjoncture économique mondiale difficile, marquée par la montée des conflits géopolitiques et l’intensification des changements climatiques, génère des zones de turbulences. «Face aux vulnérabilités des chaînes de valeurs mondiales et la forte dépendance aux importations pour sécuriser les approvisionnements vitaux, la souveraineté de notre pays se place ainsi au cœur des priorités. Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu L’assiste, déclarait dans son Discours d’ouverture de la première session de la première année législative de la onzième législature en octobre 2021 : «Qu’elle soit sanitaire, énergétique, industrielle, alimentaire ou autres, sa préservation est devenue l’enjeu d’une véritable compétition qui suscite des réactions fébriles chez certains», rappelle le ministre de l’Industrie qui indique que la souveraineté est la clé pour assurer l’intégrité du marché intérieur et pérenniser les emplois.

De même, la souveraineté industrielle est tributaire du développement du tissu productif. «Notre industrie est ainsi appelée, aujourd’hui plus que jamais, à renforcer son rôle dans l’économie nationale. Il est donc impératif de capitaliser sur nos acquis pour renforcer davantage notre résilience et notre compétitivité, accélérer notre relance de l’économie nationale et l’ancrage du Maroc dans les secteurs prometteurs. Le Maroc a besoin, pour cela, d’une industrie encore plus concurrentielle et productive, intégrant de nouvelles activités, de nouveaux savoir-faire et offrant plus d’opportunités d’emploi», indique Mezzour. Selon lui, la création d’emplois figure également parmi les nouvelles orientations industrielles du pays. «D’ailleurs, le gouvernement a fixé la création d’emplois comme objectif principal de son mandat en ciblant la création de 1 million d’emplois, dont 400.000 qui doivent provenir de l’industrie. Jusqu’à aujourd’hui, nous avons créé 94.000 emplois nets dans l’industrie depuis le début du mandat», fait valoir Mezzour. Le ministre avance, par ailleurs, que le pays a tout intérêt à investir les nouveaux métiers et renforcer la connexion entre le monde industriel, la formation professionnelle et l’éducation. Autre orientation, le renforcement de la capacité de l’industrie en termes des nouvelles technologies et infrastructures techniques. Sans oublier la R&D et l’accélération du processus de décarbonation à travers l’accès à l’énergie renouvelable à des prix compétitifs. «Le secteur privé doit par ailleurs tirer avantage de la nouvelle charte de l’investissement. Tout l’écosystème est donc mis en place. Aujourd’hui, l’objectif de cette journée est de voir comment nous pouvons tous nous mobiliser afin d’atteindre ces objectifs et créer un maximum d’emplois», conclut le ministre de l’Industrie.

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Chakib Alj : l’agro-alimentaire et la pharmaceutique ont du pain sur la planche

Chakib Alj, président de la CGEM, qui intervenait dans le même panel, confirme la forte mobilisation du secteur privé pour réussir la montée en gamme de l’industrie nationale. «Nous sommes parfaitement conscients du rôle que doit jouer le secteur privé dans l’amorçage de cette nouvelle ère industrielle. Nous avons des atouts. Notre industrie a une histoire et a fait preuve d’une forte résilience pendant la Covid-19 en montrant sa capacité d’adaptation et d’innovation. Tout le monde se rappelle la pénurie des masques sanitaires et comment notre industrie a pu réadapter très vite son outil industriel pour les fabriquer localement», se souvient Alj. Pour le patron des patrons, le lancement du Fonds Mohammed VI pour l’investissement et la Charte de l’investissement constituent des opportunités en or pour les industriels marocains afin d’enclencher de nouvelles phases de développement. «Nous recevons régulièrement à la CGEM des délégations venues du monde entier. Toutes s’accordent à dire que le Maroc a fait des progrès extraordinaires ces dernières années, sans oublier sa stabilité politique et sociale. Le Royaume jouit également d’une position géographique stratégique entre l’Afrique et l’Europe. Ce sont donc des atouts sur lesquels il faudra capitaliser pour amorcer un nouveau décollage industriel du pays», fait valoir Alj. Selon lui, l’industrie nationale a encore du pain sur la planche. Dans l’agro-industrie, par exemple, la filière de la transformation doit se développer davantage, sachant que le Maroc est un grand producteur de fruits et légumes. «Il faut donc booster l’industrie de la transformation», lance le patron des patrons. Dans les énergies renouvelables, où l’objectif du Royaume est de porter à 52% la part des énergies renouvelables (ENR) dans le mix énergétique, des opportunités importantes d’investissement se présentent également. «L’Afrique représente un potentiel de 60 millions de TW par an. À peine 1% des installations mondiales d’énergies renouvelables sont réalisées dans le continent. Donc, il y a des opportunités d’investissement en or à saisir dans ce secteur. De même, nous avons besoin de décarboner notre industrie pour pouvoir exporter davantage et attirer plus d’investissements étrangers dans le pays», développe Alj. Dans l’industrie pharmaceutique, le président de la CGEM estime également que des opportunités énormes sont à saisir, suite à la généralisation de la protection sociale, en plus du potentiel à l’export notamment vers l’Afrique et même vers des pays européens. Alj conclut en insistant sur l’importance à accorder à R&D qui, selon lui, est le garant d’une forte compétitivité de l’industrie nationale.

Charte de l’investissement : des primes à la pelle aux industriels

La nouvelle charte de l’investissement est venue avec tout un paquet d’avantages au secteur industriel. L’affirmation est de Mohcine Jazouli, ministre chargé de l’Investissement, de la convergence et de l’évaluation des politiques publiques. «Comme vous le savez, ce gouvernement, sur Instructions Royales, a érigé l’investissement productif en tête de ses priorités en industrie. Dans ce sens, la nouvelle Charte de l’investissement a pour objectif de créer de la valeur, certes, mais aussi de l’emploi», indique l’ex-patron du cabinet Valyans. Selon lui, la Charte renferme 3 volets essentiels, dont la gouvernance qui devra permettre à chaque territoire du Royaume de se rapprocher du tissu industriel en fonction de ses atouts et ses spécificités. Le deuxième volet, quant à lui, porte sur le climat des affaires avec une feuille de route dédiée. Enfin, le troisième volet de la charte est consacré aux incitations dont certaines vont concerner directement le secteur industriel. Ainsi, indique le ministre, il y aura des primes à l’emploi en industrie. Le principe : en fonction du nombre de postes créés, l’industriel pourra engranger, auprès de l’État, 5 à 7% de l’investissement mobilisé. Les industriels auront également la possibilité de percevoir une prime liée au genre. Le tout assorti d’une prime aux métiers d’avenir et une prime liée à l’intégration locale, en d’une incitation pour la durabilité de l’investissement.

Benchaâboun : l’investissement dans la R&D est plus que fondamental

Mohamed Benchaâboun, directeur général du Fonds Mohammed VI pour l’investissement, qui était de la partie, insiste, lui, sur les leviers devant permettre un véritable décollage industriel. Le premier levier, selon lui, est le développement des infrastructures. «Des zones industrielles bien pensées aux côtés de réseaux de transport et de la logistique efficients permettent de gagner un temps énorme dans le déploiement des projets industriels», souligne l’ex-patron du groupe BCP (Banque Centrale Populaire). Autre levier : l’énergie. Pour Benchaâboun, «nous ne pouvons pas parler d’une politique industrielle effective, avec ce qui nous attend dans les années à venir, sans qu’il y ait une corrélation très rapprochée avec la politique énergétique. L’enjeu étant d’offrir aux industriels une énergie propre avec un coût plus compétitif». Autre levier à activer : l’innovation et la recherche. Pour le DG du Fonds Mohammed VI, il s’agit d’éléments déterminants, si l’on veut aller vers l’intégration des process. Le tout assorti de la fiscalité et l’accès au financement, en plus de la formation qui est, aux yeux de Benchaâboun, un élément fondamental pour enclencher une intégration verticale de l’industrie. Selon le responsable, l’enjeu consiste globalement à investir dans l’outil, mais également dans le moyen et long terme à travers l’investissement dans l’immatériel à savoir la R&D, la formation et les systèmes d’information. Ce sont ces investissements, poursuit Benchaâboun, qui permettent de conquérir les marchés et feront l’objet de l’accompagnement du Fonds. Ce dernier va donc déployer incessamment, selon son DG, un ensemble d’outils à la fois classiques et innovants afin de faire en sorte que les projets d’investissement existants ou à créer puissent trouver une partie de réponse dans l’offre d’accompagnement du Fonds.

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Banque de projets innovants et plateforme IP Marketplace

La Journée nationale de l’industrie a été marquée par le lancement d’une banque de projets innovants et une plateforme IP Marketplace. La plateforme digitale interactive permet de rallier les acteurs de l’innovation à l’échelle nationale autour de plusieurs opportunités, notamment en matière de commercialisation ou d’octroi de licences de brevets d’invention, de résolution de challenges techniques industriels et d’investissement dans des projets innovants libres d’exploitation au Maroc. La plateforme est structurée autour de 4 espaces : une banque de projets innovants conçue sur la base de l’information technologique contenue dans les brevets libres d’exploitation au Maroc ; «Offres technologiques» qui constitue un espace pour la commercialisation, la concession de licences ou l’acquisition de brevets d’invention ; «Besoins technologiques» qui est un espace de mise en relation entre les entreprises en prospection de solutions à des défis techniques avec des structures de recherche ; et un espace collaboratif qui constitue un lieu d’échanges, de transfert de compétences et de mise en réseau entre les acteurs de la recherche et de l’innovation. En marge de la Journée, une convention de partenariat a été signée entre le ministre de l’Industrie et le DG de l’Office marocain de la propriété industrielle et commerciale (OMPIC) et le président de la CGEM pour le développement et la promotion de la propriété industrielle et commerciale et la valorisation des actifs immatériels des entreprises marocaines.

Lire aussi : Ce qu’il faut retenir de la première journée nationale de l’Industrie


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