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Pour pas grand-chose !

«Des avancées ont été enregistrées. Mais beaucoup reste à faire », c’est ainsi qu’une récente étude a évalué le bilan du dialogue social une année après son relancement en avril 2022. En effet, nombreuses sont les carences soulignées par cette étude publiée par le Centre de dialogue public d’études modernes (CDPEM) et destinée à analyser le bilan de la première année sociale (2022- 2023).

Ratages

Parmi ces carences entachant l’action gouvernementale dans la mise en œuvre des résultats de l’accord du 30 avril 2022, l’étude considère que le consensus positif qui s’est produit lors de la signature «n’a pas duré longtemps», à cause, d’une part, de la passivité du gouvernement à mettre en œuvre certaines des obligations convenues, et d’autre part, du non engagement des parties à mettre en place les exigences en lien avec l’établissement de la paix sociale et l’institutionnalisation du dialogue social au niveau territorial.

 ce propos, ladite étude a relevé un certain nombre de lacunes comme le retard enregistré au niveau de la publication du rapport annuel sur le climat social programmée en mars dernier ainsi que la non restructuration du comité régional du dialogue social et le comité provincial, qui sont chargés d’étudier l’état du climat des affaires et l’état du climat social au niveau régional et provincial.

L’étude a noté que les commissions régionales du dialogue social n’ont pas tenu leurs réunions périodiques au cours de l’année sociale, et que la commission de législation du travail prévue par le Pacte national pour l’institutionnalisation du dialogue social, chargée de suivre l’examen de la législation, n’a pas été activée.

L’étude a également souligné la non création de l’Observatoire national du dialogue social comme espace de consolidation de la tripartite. Idem pour l’Académie de formation dans le domaine de l’emploi et du climat social et les institutions qui travaillent sur l’intégration et la convergence des mécanismes du dialogue social.

L’étude a aussi enregistré la non activation d’un ensemble de dispositions liées à la mise en œuvre de l’accord social du 30 avril 2022, au niveau du secteur privé, qui connaît des problèmes structurels que les parties ont convenu de résoudre «rapidement et radicalement ».

Désengagement

En outre, le CDPEM constate que le gouvernement n’a fait aucune offre concernant la mise en œuvre des engagements liés à la facilitation du travail des femmes, en particulier l’engagement de réduire le coût des salaires des travailleurs domestiques et de leurs employeurs. L’Exécutif n’a pas été non plus en mesure de créer 100 crèches par an au profit des employés des entreprises, en allouant une subvention pour construire, préparer et équiper chaque crèche. Aussi, il n’a pas été capable, avec les partenaires sociaux et économiques, de relever le défi d’établir au moins 100 accords collectifs par an, puisque le bilan ne dépasse pas 16 accords au cours de cette année sociale.

Concernant le secteur public, ledit rapport observe que le gouvernement n’a pas respecté plusieurs engagements pris lors de l’année sociale 2022-2023. Tel est le cas de la mise en place d’une augmentation générale des salaires puisque le gouvernement n’est pas parvenu à trouver un compromis avec les partenaires sociaux relatif à l’opérationnalisation de cet engagement en septembre 2022.

Tel est le cas également de la révision du système fiscal sur le revenu qui n’a pas été activée. Ledit document cite aussi la non création d’une nouvelle échelle de promotion au sein de la fonction publique.

On reproche au gouvernement également une grande lenteur dans l’instauration du dialogue et dans l’opérationnalisation des accords au sein des établissements et des entreprises publics ; la non adoption de nouvelles mesures législatives et réglementaires permettant au fonctionnaire lésé de faire face à l’impact des maladies et des accidents de travail et la non révision des dispositions législatives en relation avec les congés maladies de moyenne et longue durées.

Les rédacteurs de ladite étude soulignent la non programmation des dialogues sectoriels au sein de la fonction publique sauf dans les secteurs de la santé, de l’éduction et des finances ; la non ouverture de discussions destinées à adopter les accords de l’OIT ; la non promulgation de la loi réglementaire relative aux conditions de pratiquer le droit à la grève ; la non ouverture de discussions concernant le projet de loi relatif aux organisations syndicales, aux lois électorales professionnelles et à la révision du Code du travail.

Ras-le-bol général

Des critiques que partagent plusieurs syndicalistes qui sont nombreux à penser que les soi-disant acquis obtenus restent insuffisants et qu’il reste beaucoup à faire, notamment dans un contexte de morosité économique et sociale. En effet, nombreux sont ceux qui estiment que l’augmentation tant attendue des salaires, fixée à 150 ou 160 dirhams par mois par l’Exécutif, demeure foncièrement insignifiante si l’on mesure le gouffre effrayant creusé dans le budget des ménages du fait de l’inflation exponentielle touchant particulièrement les prix des denrées de première nécessité. Par ailleurs, ils soulignent que la hausse des salaires n’est pas la mesure adéquate faute d’un contrôle rigoureux du Code du travail. Particulièrement dans cette conjoncture sociale difficile.

De leur côté, certains économistes craignent, par contre, d’entraîner le pays dans une spirale inflationniste, appelée également «boucle prix-salaire» ou «courbe de Phillips». Ce phénomène, comme l’explique Coline Vazquez, se produit lorsque la hausse des salaires alimente la hausse des prix. «Plus concrètement, les entreprises revalorisent la rémunération de leurs employés, ce qui augmente leurs coûts de production. Une charge supplémentaire qu’elles sont ensuite contraintes de répercuter sur leurs prix de vente pour ne pas réduire leurs marges de manière trop importante. Les prix sont donc à nouveau en hausse et réduisent le gain de pouvoir d’achat obtenu par les salariés grâce à la hausse des salaires».

A noter également que certaines contraintes pèsent encore sur le dialogue social, c’est le cas notamment du taux de l’impôt sur le revenu (IR), qui peut atteindre jusqu’à 38%, et celui des indemnités des responsables au sein des différents services. Le droit de grève pose également problème ainsi que le dossier du dialogue social sectoriel en retard au niveau de certains ministères. En effet, et à l’exception des ministères de la Santé et de l’Education, le dialogue sectoriel est en retard dans de nombreux ministères.

Hassan Bentaleb

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