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Trouver des solutions durables aux crises et risques actuels requiert le renouvellement des concepts économiques

«La conjonction des crises et des contraintes qu’elles induisent durant une période relativement courte accroît de manière considérable l’incertitude pour les responsables qui ont des décisions à prendre ainsi que pour le simple citoyen», selon le trésorier général du Royaume, Noureddine Bensouda.

Il faut dire que «personne ne peut affirmer quand va débuter une crise, ni combien de temps elle va durer, ni prévoir ses impacts économiques, sociaux et financiers», comme il l’a déclaré dans une allocution prononcée lors de la 15ème édition du Colloque international sur les finances publiques tenue du 16 au 17 décembre à Rabat.

Saisissant l’opportunité de cette rencontre, placée sous le thème : «Quel modèle de gouvernance des finances publiques dans un monde de multi-crises?», le trésorier général a jugé bon «de préciser que la survenance des crises au XXIe siècle se caractérise par leur simultanéité et le fait qu’elles se produisent dans un monde globalisé plus vulnérable, où les humains sont plus interconnectés, plus interdépendants, et où l’information circule instantanément notamment via les réseaux sociaux».

Il a, par ailleurs, fait remarquer que les crises du XXIe siècle remettent en cause les différentes théories économiques des siècles précédents : Le keynésianisme, le libéralisme, l’Etat providence,… 

Les situations ont été telles qu’«il a fallu l’intervention massive de l’Etat à travers des politiques publiques volontaristes menées à coups de dépenses publiques et de recours à des instruments non conventionnels pour limiter les conséquences sociales des crises et relancer l’économie», a poursuivi Noureddine Bensouda.

Il n’est donc pas étonnant que «très peu de personnes, qu’il s’agisse d’hommes politiques ou d’économistes, ont critiqué la politique du «whatever it takes» de Mario Draghi lorsqu’il était président de la Banque centrale européenne, ou encore la suspension par la Commission européenne, en mars 2020, du pacte de stabilité et de croissance,…», a-t-il fait remarquer.

Cependant, il se trouve que cet interventionnisme dans l’urgence «a accrédité l’idée d’un Etat qui corrige plutôt qu’il ne pilote. C’est l’Etat consolateur, compensateur, qui prélève surtout de la dette, car il ne dispose plus d’argent public », a-t-il noté.

S’il est admis que les mesures prises par les Etats et la mobilisation massive des finances publiques pour faire face aux récentes crises étaient certes nécessaires, force est de constater qu’elles se sont traduites notamment par un creusement du déficit et un accroissement sans précédent de la dette, «marquant les limites de l’intervention publique», a également relevé le trésorier général.

Pour Noureddine Bensouda, quelle que soit sa volonté, l’Etat ne peut pas à moyen terme «assumer seul les chocs qui se multiplient» et continuer dans ces circonstances à assurer son rôle de garant en dernier ressort.

Tout en sachant qu’en plus des effets économiques et sociaux, «les crises actuelles ont eu un impact majeur sur le mode de gouvernance et de régulation de la décision et de la gestion, notamment en matière de finances publiques».

Qu’à cela ne tienne, pour le trésorier général, il est clair que «les crises de la gouvernance […] résultent le plus souvent du fait que les systèmes de pensée et les systèmes institutionnels n’évoluent pas au même rythme que la société».

Il estime par ailleurs que la seule façon de trouver des solutions durables aux crises et risques actuels et de remettre l’économie et les finances publiques sur des trajectoires de croissance et de viabilité est de requérir au renouvellement des concepts économiques, du cadre législatif et réglementaire et des outils et instruments, tenant compte des réalités du XXIe siècle.

Selon lui,  «cela passe également par la réduction des inégalités sociales, spatiales, de patrimoine, de revenu et d’intelligence, gage du maintien de la cohésion sociale ».

Mais aussi «par la nécessité d’accorder la priorité à l’éducation et à la formation de ressources humaines capables de relever les véritables défis du XXIe siècle».

En outre, s’il est incontestable qu’il convient de traiter l’urgence, il ne faut pas pour autant oublier qu’il est impératif de procéder aux réformes structurelles.

Aussi, si l’Etat demeure un acteur majeur de la société, il est important qu’il intègre la montée en puissance d’autres acteurs privés, a-t-il soutenu constatant toutefois que l’intervention de l’Etat se trouve limitée en raison de la conjonction de deux facteurs.

Le premier facteur tient au fait que les marges de manœuvre des Etats s’amenuisent sous l’effet de la dégradation des finances publiques ; tandis que «le deuxième facteur est dû au fait que les Etats ont adopté en partie, la logique managériale du privé induisant une confusion entre la régulation du modèle financier public avec le contrôle de gestion», a-t-il conclu.

Organisée par le ministère de l’Économie et des Finances et l’Association pour la fondation internationale de Finances Publiques (FONDAFIP), avec le soutien de la Revue française de finances publiques (RFFP), la 15ème du colloque International des Finances Publiques s’est déroulée au siège de la Trésorerie générale du Royaume.

Alain Bouithy

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