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Pourquoi ça cale toujours au Maroc ? [INTÉGRAL]

 C’est un paradoxe qui en dit long sur les habitudes des Marocains : le Maroc est l’un des pays où le système bancaire est le plus avancé en Afrique, mais on peine curieusement à y faire développer la mobile money. Par mobile money, il faut comprendre la possibilité pour un simple détenteur de téléphone portable, de régler la quasi-totalité de ses transactions financières à partir de son cellulaire. Cette pratique, extrêmement développée ailleurs sur le continent, notamment dans des pays comme le Kenya ou en Afrique de l’Ouest, tarde encore à se généraliser dans le Royaume.

Actuellement, au moins 500 millions d’Africains utilisent la mobile money à un rythme quasi-quotidien. Cependant, au Maroc, « il est important de noter que le paiement en espèces prédomine toujours, même pour les achats en ligne, avec 67% des transactions de commerce électronique effectuées en « cash on delivery », contre 16% pour les portefeuilles numériques et mobiles et 17% pour les cartes de débit et de crédit, selon le rapport « We Are Social » », indique Karim Abdelmoumni, consultant international en marketing stratégique et retail marketing. Selon le managing Partner du cabinet 212 Marketing, « seulement 20% de la population âgée de 15 ans et plus ont effectué un paiement numérique en 2022, malgré la forte pénétration d’Internet ».
 

354 MMDH de cash
 

Et pourtant, ces dernières années, les banques ont presque toutes essayé de rivaliser dans l’offre de solutions digitales afin d’inciter leurs clients, dans le cadre de la mobile banking, à davantage profiter des facilités du Net. Mais, le constat est encore très amer, notamment aux yeux du Wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri, qui se désole que tout le dispositif technique soit là, mais que le Maroc continue d’accuser du retard dans ce domaine. La preuve en est qu’en 2022, la circulation du cash a plus qu’augmenté, avec une envolée spectaculaire de 10.8%, pour s’établir à 354,82 MMDH.

L’une des raisons qui l’explique est souvent les habitudes de consommation des Marocains, dont la majorité n’a pas forcément le réflexe d’envoyer de l’argent via portable, préférant souvent se déplacer dans les guichets des opérateurs de transfert d’argent. L’éventail réduit des possibilités de transactions financières qu’offrent les applications et les opérateurs est également une cause de découragement pour certains consommateurs.
 

L’effet Covid-19
 

Par contre, en ce qui concerne les paiements en ligne via sa carte bancaire (qui est à différencier de la mobile money), on observe des progressions encourageantes au fil des années. « En examinant les rapports de différents organismes institutionnels, notamment le Centre Monétique Interbancaire (CMI), nous pouvons constater une progression des paiements électroniques dans le pays. Les opérations de paiement en ligne effectuées via carte bancaire ont augmenté de 35,6% en nombre d’opérations et de 24,3% en valeur en 2022 par rapport à 2021. En outre, 2021 a connu une augmentation des transactions électroniques de 45% en volume et de 28,1% en valeur par rapport à 2020 », observe Karim Abdelmoumni.

Ces évolutions, renseigne-t-il, ont été favorisées par la pandémie de Covid-19 qui a conduit de nombreux citoyens à opter pour la digitalisation des transactions financières en raison des restrictions sanitaires en place, ainsi que par le taux de pénétration élevé d’Internet (88,1% de la population marocaine fin janvier 2023) et l’explosion de l’équipement en smartphones (92% de taux d’équipement).

 

Traçabilité
 

Du côté des commerçants, notamment des détaillants, c’est la peur de sortir de l’informel et de s’exposer au fisc qui explique cet attentisme réfractaire à la mobile banking. Cela, alors qu’aussi bien l’Etat, les opérateurs du secteur financier que les consommateurs, ont énormément à gagner avec le développement de la mobile money. Dans certains pays du continent, en plus de contribuer à limiter la circulation du cash, l’économie créée par le business de la mobile money permet de développer le secteur des services et du commerce, qui allège désormais les pouvoirs publics, avec la création de millions d’emplois, grâce à la forte demande de la mobile money.
 

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