Santé

5 leçons inspirées des animaux, par Hugo Clément

Il est « sur le front », comme son émission. Avec l’envie d’inspirer sans faire paniquer. Quoi de mieux en cette nouvelle année que de replonger dans « Les lapins ne mangent pas de carottes » (Éd. Fayard), où Hugo Clément nous invite à découvrir sans cesse le monde animal, ses surprises, ses modèles à suivre. Et si nous étions…

Observateurs COMME LES CORBEAUX ?                            

Ou plutôt les corneilles, que l’on voit partout dans nos villes, le bec plongé dans une poubelle, à déguster les restes d’un plat en sauce… À force de les observer, on s’est rendu compte que la gourmandise les poussait bien plus loin : les corneilles nous utilisent pour casser des noix. Mais oui : elles se postent à un feu rouge, disposent les noix devant les roues des voitures, s’enfuient quand le feu passe au vert et hop… reviennent récupérer les noix libérées de leurs coques ! Les corvidés font partie des espèces les plus intelligentes selon nos critères, les corbeaux jouent (on en voit faire de la luge sur les toits avec un bouchon de bouteille), utilisent des outils… Et si, comme les corbeaux, nous regardions un peu mieux les espèces qui nous entourent ? « Avant, s’intéresser aux animaux était ridicule, déplore Hugo Clément. Il y a beaucoup de sexisme dans ce mépris, on parlait de “mémère à chien” ou de “vieille fille à chat”, on se moquait de Brigitte Bardot. Heureusement, c’est fini. Nous portons notre regard sur les animaux que nous consommons : 80 % des Français sont contre l’élevage industriel. Des associations nous ont ouvert les yeux sur ce qu’endurent 90 % des cochons, qui vivent sans voir le jour, enfermés dans des cages, 99 % des lapins… On doit se demander : “Est-ce indispensable à ma survie d’infliger ça à un animal ?” Je rappelle que nous ne sommes pas des lions et que nous pouvons nous nourrir de légumes. Même les politiques se sont mis à parler de leurs animaux de compagnie. Mais il faut s’intéresser aussi à ceux qu’on croise sans regarder, telles les corneilles. Et comprendre qu’on a besoin de tous les animaux : la disparition d’une espèce, c’est une brique de notre maison en moins, de deux, c’est deux briques, et ainsi de suite. Moins il y a de vivant, plus nous risquons l’effondrement. La santé du monde animal, c’est la nôtre : nous sommes des primates. » Et de citer Romain Gary dans « Lettre à l’éléphant » : « Dans un monde entièrement fait pour l’homme, il se pourrait bien qu’il n’y eût pas non plus place pour l’homme. »

Généreux COMME LES CHAUVES-SOURIS ?                                

Darwin a été mal lu. Tous les scientifiques le répètent : ce qui caractérise le monde animal, ce n’est pas la concurrence, c’est aussi l’entraide ! Pour preuve ? La chauve-souris. Ce petit noctambule fait preuve d’une grande empathie : si un de ses congénères maigrit ou semble avoir faim, tous ses camarades recrachent un peu de leur repas pour lui… L’Onu souhaite que les êtres humains aussi apprennent à partager : 30 % des espaces de notre planète devraient être « sacralisés » pour le monde sauvage d’ici à 2030. Un vœu pieu pour l’instant, puisque même nos espaces protégés ne le sont qu’à 0,1 %. Le manque d’habitat est pourtant l’une des premières causes de la disparition du vivant. « La première raison du déclin des oiseaux en France, explique Hugo Clément, c’est l’agriculture intensive – à cause des pesticides, ils n’ont plus d’insectes à manger, la disparition des haies leur a retiré un abri… –, viennent ensuite la bétonisation, qui les prive d’habitat, et la pollution lumineuse. Mais il y a aussi la chasse. La France est le pire pays d’Europe en ce qui concerne le nombre d’espèces chassables : nous autorisons la chasse d’espèces en déclin et même menacées. C’est une totale aberration. » Il faut apprendre à partager les espaces, plutôt que se sentir en surpuissance en écrasant l’autre. « Bien sûr qu’il y a des chasseurs sympathiques, temporise le journaliste, mais comment peut-on aller déterrer un blaireau dans son terrier, le tuer avec une grande cruauté, sans même le manger après… Ce n’est pas innocent : si vous êtes sadique avec un animal, les études le prouvent, il y a plus de chances pour que vous le soyez avec des êtres humains. » D’où l’importance de s’unir contre de telles pratiques. « Je recommande à tous les citoyens de rejoindre des associations, continue Hugo Clément. Plus il y aura d’adhérents, plus elles seront audibles dans le débat politique. Et j’invite à échanger, à parler de nos préoccupations. Je porte presque toujours la même chemise, je ne mange plus de viande, mais si je fais ça tout seul dans mon coin ça ne suffira pas. Il faut dire pourquoi, miser sur le collectif, s’engager ensemble. » Bref, tous des Batman !

Frugaux COMME LES LAPINS ?                             

« Saviez-vous que, comme le dit le titre de mon livre, les lapins ne mangent pas de carottes ? interroge Hugo Clément. C’est une invention de Tex Avery, qui trouvait ça rigolo comme image, alors que ça ne correspond pas du tout à la réalité. Les lapins n’aiment rien tant que l’herbe sèche. Les carottes, pour eux, c’est un peu comme un burger, gras, trop sucré… » Aux États-Unis, notamment à cause de l’obésité qui a gagné 40 % de la population, l’espérance de vie vient de chuter de quatre ans, autant que pendant la Guerre de 14-18… Copions plutôt les lapins ! « Nous sommes dans une société obèse, mentalement et même physiquement, assure Hugo Clément. Tout déborde et il faudra bien atteindre la sobriété, choisie ou subie. Hélas, comme nous ne prenons aucune décision, nous allons nous retrouver devant le fait accompli et ce sont les plus pauvres d’entre nous qui en subirons les conséquences. Comment maintenir une société, après ça ? De toute façon, cette surconsommation est ringarde. Il faut choisir une frugalité joyeuse, tous ensemble. »

 Magiciens COMME LES BALEINES ?                                

« Je raconte dans le livre l’histoire de Kathy : un jour, cette dauphine a regardé droit dans les yeux l’homme qui l’avait capturée et “dressée”, et a plongé au fond du bassin pour se suicider. Car, oui, les dauphins peuvent décider de cesser de respirer. Depuis, cet homme, bouleversé, lutte contre les parcs aquatiques. Comment peut-on encore maintenir des zoos ? Penser qu’on connaît un animal parce qu’on l’a vu en cage ? Enfermés dans un petit bassin, les cétacés n’ont rien de leur comportement normal, ils sont en souffrance, dans de l’eau chlorée ! Prenez les baleines, par exemple : savez-vous qu’elles peuvent parcourir des milliers de kilomètres et plonger jusqu’à 3 000 mètres de profondeur ? Mais la magie, c’est de les apercevoir soudain, au loin, dans toute leur puissance, leur mystère et leur liberté. Et c’est aussi une délicieuse leçon d’humilité. Respecter cette magie me semble le meilleur moyen de lutter contre l’objectivation omniprésente dans notre société. » Une objectivation dont les femmes sont largement victimes, et qui influe sur notre santé mentale : « Se considérer comme un objet qui doit toujours être au top, cela nous pousse à acheter des choses pas chères, même si l’on sait que par cet achat nous faisons souffrir un être humain, mal payé, maltraité, à l’autre bout du globe. Alors que pour se sentir bien, il faudrait essayer d’aller en forêt, au bord de la mer, de ralentir, de prendre du recul, de sortir de cette course. »

Guerriers COMME LES LOUPS ?                                

Si le fait que la Cop 27 a été un coup d’épée dans l’eau vous fiche le bourdon, regardez du côté des loups. Toujours en action ! C’est la recommandation du journaliste lanceur d’alerte : « Je ne suis jamais déprimé parce que j’agis, assure Hugo Clément. J’espère être utile. Je dis toujours aux jeunes qui sont déprimés : “Engage-toi ! Tu vas rencontrer des gens qui pensent comme toi, agir avec eux ça rend heureux.” » D’autant que, contrairement au Mexique ou au Brésil, en France, les écologistes ne risquent pas de mourir pour leurs idées. Pour rappel, 1 700 militants pour l’environnement sont morts assassinés entre 2012 et 2021, les uns pour avoir sauvé des arbres, les autres pour une rivière, ou même pour des papillons… « Il y a mille façons d’agir, continue Hugo Clément. Cela peut être simplement de laisser pousser l’herbe dans son jardin pour qu’y reviennent les insectes, de lutter contre la coupe d’un arbre… Cela peut être de se dire, OK, on ne va pas au bout du monde pour les vacances, mais en Europe, ou décider de ne plus manger de viande un jour par semaine. Cela peut être de se présenter à son conseil municipal… Faites le maximum ! Et n’oubliez pas de profiter de la vie. Un bon militant est un homme heureux. » Et Hugo Clément de repartir vers la plage de Biarritz. Parmi les animaux à copier, il y a aussi, heureusement, les êtres humains comme lui.

                                            

« Les lapins ne mangent pas de carottes  », d’Hugo Clément (éd. Fayard).

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