Santé

Allô, Giulia ? « Je me demande si la relation avec mon amant est toxique »

« Matteo est tout sauf un mec possible, pour moi.

Et pas du tout l’amoureux qu’il me faut. Il est un peu trop jeune (34 ans), un peu trop flambeur, poches percées, belles paroles, il en fait des caisses pour tout et n’importe quoi et en fait, il me fait penser à l’intégralité de ma famille italienne. Je les aime, hein… Mais moi, j’ai besoin de calme. Et d’avoir les pieds un peu mieux plantés dans le sol. Sauf que Matteo est aussi le meilleur amant que j’aie jamais eu. Vraiment. 

Depuis quatre ans, on se voit de loin en loin, quand il vient en France, pour le boulot. Ca dure ce que ça dure, en fonction de l’envie ou du temps qu’on a. Et, vu que j’en ai peu, du temps, ça, pour le coup, c’est exactement ce dont j’ai besoin. Je ne lui demande rien de plus, il n’attend rien de moi en particulier. Et on passe de vrais bons moments, libres, et légers. C’est peut-être ça, d’ailleurs, qui rend le sexe si agréable entre nous… Ce qui m’a toujours surprise, c’est comment je me suis toujours laissé faire, avec lui. J’ai toujours eu cette espèce de confiance totale, qu’il n’a jamais trahie, qui m’a fait lui dire « oui » à chaque fois qu’il m’a proposé quelque chose de nouveau. Et chaque fois, j’ai adoré.

Donc… Pourquoi je vous écris, si tout va bien ? Parce qu’il m’a giflée. Et que j’ai aimé. Il était chez moi depuis deux jours, il repartait le lendemain, on a passé 48H à faire à peu près ce que vous imaginez – et manger, et dormir, et rigoler. Le dernier soir, il doit être 4h du matin, on est explosés de fatigue, mais de cette fatigue du corps qui a pris beaucoup, beaucoup de plaisir, vous voyez ? Matteo a de nouveau envie de moi… J’ai de nouveau envie de lui… On recommence à faire l’amour et là, paf. Une baffe. Petite, mais une baffe quand même. Il plante ses yeux droits dans les miens, en fait, il me scrute. Il attend une réaction. Moi, je suis un peu sidérée. Et puis je me redresse, je lui dis que ça ne va pas, qu’on ne se gifle pas, qu’on ne se fait pas mal… Et là, il a ce sourire adorable, il me demande pardon, me promet qu’il ne recommencera plus, me dit qu’il voulait juste essayer un truc, et je le crois. D’ailleurs, la suite est beaucoup plus tendre entre nous. Donc je me détends, mais tellement, que je lui demande de me gifler encore. Lui : « t’es sûre ? »  Moi : « oui ». C’est celle là, de gifle, que j’ai adorée. 

Décharge électrique, frissons dans tout le corps, rien qu’à vous l’écrire ça me fait encore quelque chose… Mais ce n’est pas normal. Enfin, pas pour moi : je déteste toute forme de violence, et je peux encore moins l’imaginer quand deux personnes font l’amour. Je sais que certaines aiment ça, mais moi, ce n’est pas mon truc du tout. Et puis on entend tellement de choses, aujourd’hui, sur ces filles qui, pendant des années, se racontent que leur mec est génial, alors qu’en fait, il leur fait accepter tout et n’importe quoi, et ce moment où elles se réveillent, et où elles regardent vraiment ce qu’elles ont vécu… Si c’était ça, Matteo et moi ? Si j’avais, en fait, ouvert la porte à une relation hyper toxique ? Disons au moins : carrément malsaine… Ce me fait flipper. Il revient la semaine prochaine, il m’a écrit, et ça me tente beaucoup de le revoir, mais je flippe. Et en fait, je voudrais y voir plus clair sur ce qu’il s’est passé cette nuit là, avant de lui dire oui ou non. Merci. » -Lena, 41 ans.

 

« De rien, Lena, je suis là pour ça.

Et pour vous rappeler, par exemple, que les filles que vous évoquez écrivent rarement à des courriers du cœur tant qu’elles sont sous emprise. Que ce qui pose problème, dans ce qu’elles vivent, c’est qu’elles ne le souhaitent pas et n’y ont jamais ressenti le moindre plaisir. Quand on se parle de violences conjugales (puisque c’est bien ce que vous évoquez), on est sur un terrain pénal : celui du délit, celui du crime, et donc du (non) consentement, au cœur de toute procédure judiciaire. Elle n’a pas voulu, il a fait quand même. Il l’a niée, il a forcé. Entre Matteo et vous, c’est exactement l’inverse qui s’est passé : il a tenté, vous avez refusé, il a arrêté. En toute logique. En toute sérénité. Une relation saine, c’est ça : un dialogue, à deux, un échange, libre et consenti. Quels que soient les mots qu’on emploie ou la langue que l’on parle. Je propose, tu disposes, tu refuses ? Ce n’est pas grave, on essaie autre chose.

Et cet « autre chose », entre deux adultes consentants peut vous emmener absolument partout : on s’en fout ! La morale ne devrait jamais, jamais, jamais se mêler de désir ou de plaisir – en général, quand elle le fait, c’est pour les interdire. Depuis des millénaires, on croule sous une somme d’interdits, d’injonctions, de règles et de schémas. Depuis la nuit des temps, on essaie de s’en défaire. Mais le combat est titanesque… Et l’envie d’être « normal », de se comparer aux autres, de rentrer dans les clous, finit toujours par revenir nous plomber la libido. C’est fou, parce que s’il y a bien une chose que la sexualité ne devrait pas être, c’est « normée ». Normons l’heure du petit déjeuner, normons la vitesse sur l’autoroute, mais de grâce, au pieu, foutez-nous la paix ! Je ne baise pas comme mon voisin. Ni comme je baiserai demain.

Hier, la gifle n’était pas votre truc. Aujourd’hui, (très) visiblement, ça l’est. Parce que c’est Mateo, parce que c’est vous deux, libres et légers, et parce que c’est vous, aujourd’hui. Celle qui ne veut ni engagement, ni ouverture de compte joint, ni labrador. Avec votre amant délicieux, vous êtes en totale confiance, alors oui, vous pouvez explorer. Fureter, essayer, goûter à tout un tas de plaisir que vous n’aviez même pas imaginés. Et alors ? En quoi c’est mal ? A qui faites vous du mal ? A part à une certaine idée, sans doute plus sage, et plus timide, que vous aviez de vous même… Tant mieux : le désir, par essence bouscule. Et parce qu’on est bousculés, le corps vibre, frissonne, vit. Vous êtes vivante. La sexualité est une matière vivante. Mateo est très, très vivant – petite veinarde – et suffisamment à l’écoute pour vous aider à ouvrir cette porte, en vous, dont vous ne soupçonniez même pas l’existence.  

Vous savez quoi ? J’ai beau chercher, je trouve difficilement plus excitant comme perspective. Alors gardez la bien ouverte, cette porte, Lena. Franchissez-en le seuil, regardez ce qu’elle cachait – et n’oubliez pas : vous avez absolument le droit de la refermer à tout moment. Quand vous voulez, comme vous voulez. »

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