Santé

Béance vaginale : quelles solutions quand la rééducation ne suffit pas ?

« Je pleurais après chaque rapport sexuel », se souvient Joséphine*. À 41 ans, cette maman de trois jeunes enfants, épanouie dans son travail, heureuse dans son couple, a vu sa vie bouleversée après la naissance de son troisième enfant. « J’ai senti que mon vagin était beaucoup plus lâche qu’après les deux autres accouchements. La différence était énorme et cela m’a inquiétée immédiatement », raconte la quadra.

La seule à s’inquiéter

Plutôt bien informée sur la santé féminine, elle s’interroge tout de suite sur une possible béance. Mais ni la sage-femme qui l’accompagnait pour sa rééducation ni la gynécologue qui la suivait ne l’a entendue. « La sage-femme m’a dit qu’il y avait du boulot, mais qu’elle avait déjà vu pire. J’avais alerté ma gynéco une première fois après l’accouchement puis six mois après. Elle m’a simplement répondu de poursuivre la rééducation », se rappelle Joséphine. Elle a poursuivi sa rééducation avec assiduité. Après une vingtaine de séances avec la sage-femme, celle-ci lui a conseillé de poursuivre à la maison au vu du chemin qu’il restait à parcourir. Joséphine a refait une dizaine de séances à la sonde, seule. Toutes ces séances ne sont jamais venues à bout de cette béance qui, malgré le travail, tendait même à s’aggraver.

Le cas de Joséphine est loin d’être isolé. Elle souffrait effectivement d’une béance vaginale, une complication de l’accouchement, qui n’est pas si rare. « 40 % des femmes souffrent d’une béance après leur deuxième accouchement », confirme le Dr. Fabienne Marchand-Lamiraud, spécialiste en chirurgie gynécologique à Nantes. Contactée par ELLE, elle annonce d’emblée : « j’ai fait de la chirurgie réparatrice de l’intime mon combat ». Un combat qu’elle mène, car trop de femmes, à l’image de Joséphine, ne sont pas prises au sérieux ou ne sont pas entendues.

40 % des femmes souffrent d’une béance après leur deuxième accouchement

Des symptômes communs

Dans son cabinet, les plaintes sont pourtant toujours les mêmes et devraient alerter. « Je me sens trop large », « je me sens distendue », « je ne me sens plus soutenue », « je me sens ouverte », « comme si mes organes allaient descendre »… les symptômes de béance sont bien réels et impactent considérablement la qualité de vie.

Parmi eux, citons les écoulements d’eau plusieurs minutes après être sortie du bain ou de la douche, des tampons hygiéniques qui ne tiennent pas en place, des bruits vaginaux, liés à l’air qui entre et sort, lors des rapports sexuels. Outre ces sons incongrus, la pénétration ne procure très peu, voire aucune sensation, pour la femme et pour l’homme. C’est ce qui faisait d’ailleurs pleurer Joséphine. « À chaque rapport, j’espérais que cela s’arrange, mais non, je ne sentais rien », confie-t-elle. Elle se souvient en outre de cette pesanteur qu’elle ressentait dès qu’elle restait debout trop longtemps. Au bout de 5 minutes, elle devait s’asseoir. Elle avait totalement arrêté le sport.

J’avais l’impression de ne pas avoir le droit de me plaindre

On comprend qu’en plus de ces symptômes physiques, le retentissement psychologique de la béance vaginale soit énorme. D’autant plus quand les professionnels de santé n’y accordent pas d’importance. « Je me sentais mal, car j’avais l’impression de formuler une requête anormale, qu’il s’agissait uniquement de confort et que je n’avais pas le droit de me plaindre. Je comprenais bien que je devais me résigner et c’est ce que j’ai fait », admet Joséphine. « Je n’ai plus insisté. J’avais honte. Je n’avais pas de cancer, je n’allais pas en mourir », raconte la mère de famille.

Des muscles distendus, comme un élastique

Alors qu’elle n’y croyait plus, une amie lui parle par hasard, lors d’une discussion sur la nymphoplastie, de la restauration du périnée, une chirurgie pratiquée généralement en prévention du prolapsus – également connu sous le nom de « descente d’organes ». « C’est la complication majeure de la béance vulvaire », explique Fabienne Marchand-Lamiraud. Si elle n’est pas prise en charge, la béance s’accentue notamment avec le vieillissement et le relâchement des tissus.

L’accouchement par voie basse est la première cause de béance. Elle se caractérise par un relâchement de la paroi du vagin et une altération des muscles du périnée. Celui-ci sert de hamac de soutien pour les organes. S’ils ne remplissent plus leur fonction de maintien, les organes finissent par descendre et au bout de quelques années, c’est le prolapsus. Joséphine n’en était pas là, mais l’assure : « je sentais très bien que ça poussait sur mon périnée ! ».

Quand la rééducation ne suffit pas

« Un gros bébé ou une grosse tête, l’utilisation de forceps, une déchirure, beaucoup de kilos pris durant l’accouchement, une grossesse gémellaire… tous ces facteurs contribuent à la déchirure, la dilacération des muscles », détaille la spécialiste en gynécologie réparatrice.

Et alors qu’on présente aux mamans la rééducation comme la solution à de nombreuses difficultés fonctionnelles du post-partum, elle ne suffira pas, surtout si elle est réalisée plusieurs mois après l’accouchement. « Faire travailler un muscle trop distendu ne sert à rien. C’est comme un élastique sur lequel on a trop tiré, il ne revient pas à sa forme initiale. On remuscle effectivement lors de la rééducation, mais malgré la tonicité retrouvée, le muscle reste étiré, la béance persiste malgré tout », atteste Fabienne Marchand-Lamiraud, installée à la polyclinique Santé Atlantique.

Une chirurgie remboursée à 100 %

La solution est alors chirurgicale. Il s’agit d’une colpo-périneo-myorraphie. « Lors de l’intervention, on retire les excès de peau à l’entrée de la vulve, le long des parois vaginales. Puis, on rapproche les muscles du périnée et on les suture. Si on ne s’occupe pas des muscles, le résultat ne sera qu’esthétique et pas fonctionnel. Il s’agit pourtant de rendre à la femme une qualité de vie. C’est la base de cette opération et c’est pourquoi elle est totalement remboursée par la sécurité sociale », précise Fabienne Marchand-Lamiraud.

Au bout de trois mois, tout était réglé

Joséphine a été opérée. Le chirurgien lui a d’ailleurs immédiatement diagnostiqué une « béance importante ». « J’ai été surprise d’être remboursée, à 100 %. L’opération s’est déroulée en ambulatoire. Au bout de trois mois, tout était réglé, revenu à la normale. Les mois qui ont précédé ont été tellement durs… C’est génial, je revis ! », se réjouit-elle. Évidemment, elle aurait préféré être prise en charge bien plus tôt, entendue par sa gynécologue ou sa sage-femme, accompagnée par ces professionnelles de santé dans la restauration de son corps.

Traiter la béance au bon moment

« Beaucoup de femmes qui entrent dans mon cabinet m’ont trouvée seules, sur internet. Elles peuvent parfois venir de loin. Les médecins, les gynécologues ne voient pas toujours la béance, mais les femmes savent qu’elles ont quelque chose, elles le ressentent. Selon moi, leur parole n’est pas suffisamment entendue. C’est du fonctionnel, oui, mais, c’est essentiel de le traiter. L’inconfort n’est pas une maladie, on peut vivre avec mais la qualité de vie est largement impactée », souligne notre experte. D’autant plus qu’il s’agit aussi de prévenir le prolapsus !

Fabienne Marchand-Lamiraud conseille de programmer une colpo-périneo-myorraphie lorsque la femme ne désire plus d’enfant. Avant cela, si une béance est trop inconfortable, la chirurgienne recommande la radiofréquence vaginale. « Cela permet de redensifier les parois du vagin et les muscles pelviens. Cela fonctionne très bien, mais ne dure pas sur le long terme ». Et les séances ne sont pas remboursées par la Sécu.

*Les noms sont modifiés

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