Santé

C’est mon histoire : « Comment j’ai tout plaqué en un mois pour un coup de foudre »

Tout était simple entre nous                                

C’est arrivé comme ça, sans prévenir. Le temps d’un dîner, je suis retombée amoureuse de Sylvain, l’homme avec qui j’avais vécu deux ans avant de me marier. Inimaginable. Je l’avais connu à 20 ans. Tous les matins, ou presque, je voyais ce jeune homme blond et filiforme au café. Lui, toujours à la même table, et moi aussi. Des tables côte à côte. À la longue, nous avions commencé à échanger. Il avait débarqué de son Berry natal à Paris pour faire une école de commerce avec, pour seuls biens, sa voiture et 400 euros en poche. J’avais deux ans de plus que lui, je travaillais déjà dans une maison d’édition et j’habitais un petit studio. Il était touchant, plutôt timide, et je voyais que je lui plaisais. J’en ai eu la preuve un jour où mon téléphone est tombé par terre et a glissé de l’autre côté de sa table. Quand il me l’a rendu, un numéro s’affichait sur l’écran. J’ai compris instantanément que c’était le sien. Je n’ai rien dit, j’ai juste souri. Deux jours plus tard, je l’appelais. C’était un dimanche, nous sommes allés faire une grande balade le long de la Seine, et, au bout de deux semaines, Sylvain est venu à la maison avec sa valise. Une évidence. Tout était si simple et facile entre nous. J’aimais son enthousiasme de chaque instant, ses valeurs, son ambition sans les mauvais côtés, sa volonté de se donner les moyens pour y arriver. En plus des cours, il cumulait les jobs pour gagner sa vie, et ajouter ces expériences sur son CV.

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Pendant ce temps, je partais régulièrement dans des salons du livre, à Brive, à Nancy, à Saint-Malo… Et, à chaque fois, comme un fait exprès, je me retrouvais en face du même jeune éditeur, Marc. Charmant, attentionné, affable. Comme nous naviguions dans le même monde, les conversations étaient faciles et les occasions de se voir nombreuses. Il me proposait de le rejoindre à des signatures d’auteur. J’y allais sans hésiter, Sylvain travaillait de plus en plus, absent le matin, le midi, le soir. Quand je me suis aperçue que je plaisais à Marc, j’ai mis les choses au clair : « Il ne s’agirait pas de tomber amoureux de moi ! Je suis prise, heureuse et amoureuse. » Lui, l’air de rien, avait répondu : « Bien sûr que non ! » Je n’ai pas compris que, à force de voir Marc, une forme d’intimité naissait entre nous, entretenue par ses attentions répétées – un auteur que j’avais pu évoquer un jour et un livre de lui en cadeau le lendemain, son manteau mis sur mes épaules quand j’avais froid, tel restaurant choisi car je lui avais dit que j’aimais les huîtres… Au bout d’un an, c’était un fait, j’avais partagé plus de temps avec lui qu’avec Sylvain en deux ans. Cette suite de moments passés ensemble avait semé les graines de notre histoire à venir et, un soir, nous nous sommes embrassés. Cette nuit-là, j’ai attendu Sylvain, et, quand il est rentré, je lui ai dit la vérité. Je n’avais rien à lui reprocher, son absence avait juste laissé un vide que Marc avait rempli. En même temps, comment aurais-je pu lui en vouloir de sacrifier notre vie à son travail ? Lui qui me disait : « Je fais ça pour toi, pour pouvoir t’offrir tout ce dont tu rêves », lui qui se battait pour me construire une belle vie. Mais nous étions si jeunes. Nous nous sommes séparés avec tristesse, mais sans rancœur ni reproches. Sans que la tendresse ni l’affection soient détériorées. Il a continué à m’envoyer des messages pour mon anniversaire, et je répondais.

Chacun était heureux de son côté                                              

Trois ans après notre rupture, alors que j’embarquais pour Marseille avec mes meilleures amies pour fêter mon enterrement de vie de jeune fille, mon téléphone a sonné. C’était lui. « J’ai appris que tu te mariais, m’a-t-il dit, je voulais juste te dire que je t’aimais. » Pas une seconde cette parole aurait pu remettre en question ma décision et l’amour que j’éprouvais pour Marc, mais j’étais touchée d’une telle sincérité, de cet amour qui nous avait unis et de cette tendresse qui persistait. Deux ans plus tard, la naissance de ma fille et la rencontre avec sa future femme nous ont fait renouer. Notre histoire appartenait définitivement au passé, nous étions chacun sur notre propre chemin, heureux. Aussi nous déjeunions, une fois par an, pour nous donner des nouvelles de nos vies, de nos enfants. Moi, une fille, et lui, bientôt une fille et un garçon. Ses efforts avaient payé. Il avait monté sa boîte, qui cartonnait. Et puis, un jour, il y eut ce déjeuner où notre conversation a pris un tour différent, plus intime, sur notre vision de la vie, les valeurs qui nous importaient. Comme un effet miroir, chacune de nos paroles avait un écho chez l’autre. Ni lui ni moi n’avions envie d’arrêter cet instant, mais nous avions des rendez-vous. Au moment de nous séparer, il m’a dit : « On ne va pas attendre un an pour se revoir ! Pourquoi on ne dînerait pas, on aurait plus de temps pour parler ? » J’ai dit oui en pensant non. Autant je déjeunais avec lui au vu et au su de tout le monde, même de Marc, autant dîner éveillait une gêne. La veille, j’ai annulé : « Je ne vais pas pouvoir dîner, tu ne veux pas plutôt déjeuner ? » Il m’a répondu : « Je ne peux pas, dommage. » Je me suis ravisée et j’ai dit oui. Après tout, Sylvain, c’était comme ma famille.

Quinze ans après, comme si nous ne nous étions jamais quittés                                                 

Ce soir-là, la conversation est repartie là où elle s’était arrêtée, sans fin. Un flux de paroles, et nos regards troublés. Quand il m’a raccompagnée à ma voiture, je l’ai embrassé sur le coin de la bouche. Les jours qui ont suivi, j’étais tétanisée. Et si j’avais tout gâché pour rien ? Quelle image allait-il avoir de moi ? Je lui ai envoyé un SMS : « On pourrait se parler ? » Nous nous sommes retrouvés trois jours plus tard. Lui venait pour comprendre. Moi, avec la ferme intention de lui dire que ce geste était sans conséquence. Et sans doute pour essayer aussi de m’en convaincre. Il n’en fut rien, et nous nous sommes embrassés, longtemps. À partir de là, nous étions deux aimants. Chaque jour, nous arrachions une heure à nos vies pour nous voir. Entre nos paroles, des flots de baisers et nos mains impossibles à dénouer. Ce que nous ressentions nous dépassait, un sentiment bien plus fort que celui qui nous avait liés quinze ans auparavant. Pendant les moments passés avec Sylvain, j’étais transportée, puis je rentrais chez moi et j’avais honte. Je baissais les yeux, j’évitais le regard de Marc. Je me sentais si triste et coupable. Un mois de montagnes russes, jusqu’au moment où, avec Sylvain, nous avons évoqué l’été et les vacances qui approchaient. Passer un mois sans nous voir, l’impensable. Alors nous avons pris cette décision folle de vivre ensemble, sans même en avoir parlé à nos conjoints, ni présenter nos enfants. Sans même avoir refait l’amour. Pendant ce mois, mes amies m’avaient dit : « Soyez simplement amants, le temps fera les choses, ce sera sans doute une passade, vis cette aventure sans le dire à ton mari. » Non, je ne voulais plus mentir à Marc, surtout pas. Et je ne pouvais plus me passer de Sylvain. La décision était sans appel, annoncée douloureusement à Marc. Nous sommes convenus qu’il parte en vacances les deux premières semaines de juillet avec notre fille et, à son retour, nous lui annoncerions la séparation, et elle pourrait habiter en alternance chez son père et dans l’appartement où nous avons emménagé avec Sylvain. La chance ensuite a été avec nous, et surtout l’intelligence de mon ex-mari qui jamais n’a eu un mot critique à mon endroit. La relation de ma fille avec Sylvain a été fluide, celle de ses enfants avec moi aussi, et tous les trois se sont bien entendus. Si, aujourd’hui, cinq ans plus tard, je me dis que nous avons été fous d’agir ainsi dans cette précipitation, la vie nous a donné raison. Tout de suite après avoir divorcé, nous nous sommes mariés, nous avons eu une fille, puis un garçon. Entre-temps, Marc a refait sa vie. Il n’y a plus d’ombre au tableau, et nous sommes heureux. Infiniment.

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