Santé

Complexe du sexe : Oriane, 29 ans, et son « clitoris trop sensible après l’orgasme »

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« Une fois que j’ai joui, il n’y a plus personne. Mon clitoris est sensible et je ne supporte plus les caresses ou les frottements, j’ai juste envie de me recroqueviller », confie Oriane, 29 ans, qui, alors même qu’elle connaît le script, le vit mal : « Si je jouis en premier, je m’en veux de ne plus être disponible pour mon partenaire, mais surtout, j’ai l’impression que mon corps me lâche et me vole tout mon érotisme », dit-elle. En effet, lors de l’excitation sexuelle, le clitoris est susceptible de nous propulser au sommet du plaisir, puis, une fois le climax, de nous transformer en petite boule fragile et vulnérable. Rien à voir avec l’image de la fille ultra-sensuelle que l’on voudrait renvoyer, capable de multi-jouir et de relancer la machine tant elle a d’appétit. Comment dépasser ce complexe du clitoris « tout penaud » et accepter la réalité physiologique de son corps ?

La « période réfractaire » n’est pas réservée aux hommes

Le clitoris a besoin de reprendre ses esprits après l’orgasme et c’est tout à fait normal. S’il est important d’en avoir conscience, c’est pour ne plus l’invectiver de lâcheur. A l’instar du pénis, il traverse lui aussi une phase réfractaire, soit une période de repli durant laquelle il se montre sensible et ne se sent pas de repartir en affaires. Seulement, pendant des décennies, la science s’est essentiellement intéressée à la période réfractaire des hommes en oubliant de questionner les réactions du clitoris et ses besoins en termes de récupération. Ainsi, à défaut d’observer l’ami clitoris, on s’est astreint à le penser multi-orgasmique, telle une véritable bête de compétition aux capacités hors-normes. Une erreur.

« On dispose d’une seule étude sur l’hypersensibilité post-orgasmique* », note la sexologue Gwen Ecalle. « Elle a été menée sur un petit panel mais se veut éclairante : 96% des femmes ont témoigné d’une hypersensibilité du clitoris après l’orgasme, et 85% ont avoué être réticentes à de nouvelles stimulations clitoridiennes. » La preuve, s’il en fallait une, que le clitoris, c’est comme l’estomac ? Quand on a bien mangé, il faut attendre un peu avant la prochaine bectée. « Après la détumescence, soit la retombée de l’érection clitoridienne, la sensibilité du clitoris serait due à une saturation des capteurs sensoriels », explique Gwen Ecalle.

Le clitoris fait bien ce qu’il peut

Ce n’est pas parce que le clitoris a besoin de reprendre ses esprits qu’il est faiblard – on ne le penserait pas pour un pénis ! Entendons simplement que si le clitoris demeure un organe puissant du plaisir féminin, il a ses limites. Malheureusement, il semblerait que nous comptions sur lui à outrance, au point de le fustiger quand il se rabougrit et de complexer quant à sa « façon d’être ». En somme, on est gênée : le clitoris est censé être génial, puissant, inarrêtable, et source d’orgasmes multiples, alors comment assumer, face au partenaire, un clitoris somme toute « classique », qui se retranche et ferme les portes du rapport après la jouissance ? Ne nous aurions-nous pas vendu la Lune ?

A ce sujet, la sexologue est formelle : « Depuis quelque temps, on remet le clitoris sur le devant de la scène, et c’est très bien. Mais à force, on en oublie le reste du corps et on se met à la pression, celle de vivre des orgasmes extraordinaires grâce à un organe extraordinaire », développe-t-elle. Revenons alors sur Terre : oui, le clitoris est fabuleux, mais il n’est pas inépuisable. La « réponse sexuelle », soit les étapes du plaisir, de l’excitation à la résolution (le fait de revenir à la normale), est une réalité : à un moment donné, on redescend et on entre en phase réfractaire, phase qui dure plus ou moins selon les individus. Difficile d’y échapper, donc. D’ailleurs, l’orgasme multiple s’expliquerait par une phase réfractaire courte et la naissance d’un nouveau rapport sexuel dans la foulée.

Quitter son complexe grâce au concept de l’autonormie

On voudrait que notre clitoris soit exceptionnel pour l’être aussi. « Quand les gens parlent de sexualité, on voit bien qu’ils ont envie de se démarquer. Connaître des orgasmes multiples, ou pouvoir mener des rapports longs, reviendrait à accéder à une forme d’exception », observe la sexologue. C’est tout le problème de notre vision de la sexualité : pour être dans le coup, il ne faudrait pas chômer. Notre clitoris devrait carburer, et quand bien même il exige du répit, on se dit qu’il existe toujours la pénétration pour rester dans le jeu.

Cette façon de penser va à l’encontre de notre corps et de la physiologie de notre clitoris. Respectons ses exigences et essayons également de ne plus nous comparer aux autres, dont la vie sexuelle serait dingue. Idem avec les normes, qui nous obligent à nous situer sur l’échelle du style sexuel. Pour cela, la sexologue propose de se concentrer sur le concept « d’autonormie » : c’est quoi, ma norme à moi ? De quelle pause ai-je besoin ? Oublions les clitoris voisins, les increvables, les « vus sur Instagram » qui racontent des bêtises, et regardons ce qu’il se passe en nous. Établissons notre propre norme pour vivre nos propres rapports.

Terminer le rapport en beauté (et sans clitoris)

Clitoris au repos ? Le rapport n’est pas forcément terminé. Si on souhaite accompagner son partenaire vers l’orgasme, on peut tout à fait être là. Ce n’est pas notre clitoris qui va lui susurrer des mots doux ou même le caresser. « On a tendance à penser qu’un rapport intime doit forcément être sexuel – tandis que l’on associe le “sexuel” aux organes génitaux – et qu’il est préférable de jouir simultanément, preuve ultime d’un couple complice et fusionnel », déplore Gwen Ecalle.

Ainsi, si le clitoris n’est plus de la partie, continuons si ça nous chante, notamment en arrêtant d’associer la période réfractaire du clitoris à « une pause forcée » : « C’est une chance ! Comme je le dis à mes patientes, vous avez l’opportunité de créer quelque chose de nouveau durant cette pause, comme un rituel érotique qui vous appartient », partage la sexologue. Il peut s’agir de participer à l’orgasme de son partenaire, mais aussi de se câliner, de papoter. C’est d’ailleurs dans ce temps de détente que le clitoris peut, qui sait, revenir à la surface : plus on complexe quand il s’endort, moins on n’est disponible à l’accueillir s’il revient. En profitant de cette pause, le clitoris pourrait bien repartir comme en quarante, parce que le clitoris a besoin d’un tout, d’une ambiance, de tendresse et de compréhension.

*Humphries, A.K. & Cioe, J.. (2009). Reconsidering the refractory period: An exploratory study of women’s post-orgasmic experiences. Canadian Journal of Human Sexuality. 18. 127-134. 

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