En solo : « J’ai peur qu’être en couple m’empêche de vivre certaines opportunités professionnelles”

“Je suis la célibataire de mon groupe de potes et j’aime ça”, affiche t-elle en majuscules sur son compte Instagram. À 28 ans, après plusieurs “relations foireuses” Sara savoure cette indépendance choisie, “endurcie”. Deux ans sans former de couple, deux ans qui attisent les questions dans son entourage et sa propre réflexion sur l’avenir.

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Biberonnée à l’autonomie 

“J’ai été éduquée par des parents eux-mêmes indépendants. En couple, mais avec des métiers qui les faisaient travailler à horaires décalés et une confiance aveugle. Ils m’ont toujours dit de ne jamais dépendre de personne et encore moins d’un homme. Donc ça n’a jamais été problématique pour moi. Je suis heureuse seule. Et si je suis avec quelqu’un, c’est du bonus, ce n’est pas nécessaire à ma vie. Surtout depuis que j’ai vécu un deuil difficile. J’ai perdu une personne primordiale pour moi, appris à vivre sans elle, donc ça signifie que je peux vivre sans personne d’autre. Depuis que j’ai verbalisé ça, j’ai passé un cap. J’écoute davantage mes ressentis et je suis devenue indépendante professionnellement.”

“Pourquoi t’es toute seule ?”

“J’ai un entourage assez ouvert, qui me comprend, mais de la part de membres plus âgés de ma famille j’ai quand même droit de temps à temps aux séquences “C’est quand que tu ramènes quelqu’un ?” ; “Ohhh, t’es toujours toute seule (avec un regard de pitié) ?” ; “Comment ça se fait que tu es encore seule ?” ; “Je comprends pas, t’es gentille et mignonne, pourquoi tu es toute seule ?” Je ne réponds même plus. Sauf le jour où un collègue de mon père m’a dit “C’est quand que tu fais un petit-fils à ton père ?” Là j’ai répondu “d’abord, je lui fais une entreprise”. 

Chocolat, yoga et boulot

“Décider au dernier moment d’aller boire un verre avec des copines, ou de ne pas y aller sans devoir m’expliquer non plus. Faire du yoga quand ça me chante. Bosser le soir devant “Harry Potter” avec une bougie et du chocolat (et/ou un verre de vin) chez moi dans mon appartement (à moi toute seule). Mes grands plaisirs, ça reste de faire exactement ce que je veux quand je veux. Pouvoir me consacrer à la réussite de mon entreprise, sans penser à personne d’autre ni l’expliquer à personne d’autre, je vois ça comme une chance. Je bosse beaucoup, j’adore ça, et j’ai besoin de suivre mes propres rythmes de rush, puis parfois de gros down. J’ai du mal à imaginer ça avec un partenaire. Et à la fois, peut être que cela m’apporterait une stabilité et un équilibre vie pro/privée ? Mais j’ai aussi peur que ça m’empêche de vivre certaines opportunités professionnelles. Je rêve de pouvoir partager mon travail et ce que je vis avec quelqu’un, mais cela me semble difficile vu le milieu un peu particulier dans lequel je bosse, une communauté féministe qui déconstruit la sexualité.

Tenir la chandelle (et les tâches ménagères)

“Les trucs pénibles au quotidien ? Le conditionnement de la nourriture ! Quand tu vis seule, tu te tapes toujours des gros paquets… Les tâches ménagères, je me les farcis aussi intégralement, toute seule. Et bien sûr il y a les “tu amènes quelqu’un pour la soirée”? Non, toujours pas. Parce que dans ma bande, les +1 sont toujours invité.e.s, j’aime l’idée qu’ils et elles deviennent aussi mes ami.es, c’est très important pour moi. Ce qui implique, fatalement, certains moments de solitude dans les dîners où tout le monde est en couple. Et dans les fêtes de famille.”

Comment construire un couple ?

“J’ai 28 ans, bientôt 30, donc. C’est LA deadline dans l’imaginaire collectif. L’âge aussi auquel mes parents m’ont eue. Je veux des enfants et me marier… Le temps passe vite, est-ce que j’en ai encore assez devant moi ? Et comme je travaille dans la sphère féministe et sexo sur les réseaux, je réfléchis au quotidien sur les mécanismes inégaux de l’hétérosexualité. C’est le patriarcat dans l’intime. Et ça, ça fait flipper. Je suis hétéro mais je me demande comment je vais arriver, avec tout ce que je sais, à construire un couple. Et à rencontrer un homme conscient des sujets qui font mon travail.”

Hétéro et intransigeante

 “J’analyse davantage, je suis bien plus intransigeante sur les attitudes sexistes, non féministes. Clairement je ne veux pas de comportements qui ne correspondent pas à mes valeurs et mes combats dans ma vie. Et je les détecte plus vite. À la fois c’est positif, et à la fois ça m’inquiète. J’ai envie de bonheur et d’épanouissement avec un homme, mais je me demande si c’est vraiment possible.”

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