Santé

Happiness challenge : Dr Aga teste la méthode qui promet d’être heureux en 7 jours

Au départ de ce Happiness Challenge, une étude de l’uni­versité de Harvard. Depuis… 1938 jusqu’à aujourd’hui, 2 000 participants de tous âges et origines ont été régulièrement sondés sur leur niveau de bonheur. Verdict : plus que le QI, la richesse, le pouvoir – j’ajouterais : les bijoux, le fromage ou le vin rouge –, ce qui rend heureux, c’est… les autres. Pour améliorer sa santé mentale et physique, le premier truc à faire, c’est tisser des liens, pas seulement avec notre tribu, si facile à aimer, mais avec un peu tous les gens, même ceux qui mettent de l’ananas sur leurs pizzas. Ça se passe en Amérique, donc une nouvelle discipline est née : le « fitness social ». Pour nous aider, le « New York Times » a mis au point un programme en sept jours, destiné à tout le monde, jeunes, vieux, joyeux drilles ou introvertis. C’est parti !

Jour 1 : le bilan de notre forme sociale                                                                                                              

Sur le site du « New York Times », il y a un quiz pour faire le point sur sa santé sociale, mais je peux vous le faire sans que vous ayez besoin de payer en ligne. En gros, ce qu’on cherche à savoir, plus que le nombre d’amis que vous avez, c’est la qualité de la relation : est-ce que ce sont des gens avec qui vous vous contentez de rigoler, ou êtes-vous en mesure d’avoir des échanges en profondeur avec eux ? Combien de personnes seraient susceptibles de vous appeler au secours au milieu de la nuit ? Faites-vous des activités de groupe ? Avez-vous, le mois dernier, manifesté de la gratitude envers quelqu’un ? Parlez-vous aux gens, au boulot ? En fait, je crois qu’à moins d’avoir une personnalité de type Hannibal Lecter il est impossible d’obtenir une mauvaise note. Tenez, même moi qui ne téléphone jamais à personne, j’ai eu « You are in tip-top social shape ».

Jour 2 : le coup de fil à un ami                                             

L’exercice consiste à appeler quelqu’un qu’on n’a pas vu depuis longtemps et à lui parler pendant exactement huit minutes, en restant bien concentré sur sa voix. Je choisis ma cousine, qui vit à l’étranger et que j’aime tant. Problème, par nature, j’ai du mal à ne pas faire plusieurs trucs en même temps, et au bout de deux minutes je me rends compte que je l’ai mise sur haut-parleur pour vider le lave-vaisselle. Je raccroche pour la rappeler depuis les toilettes, où, à part empiler les rouleaux de PQ, je n’aurai aucune tentation de rangement. C’est parti. Les consignes exigent d’être concis car les minutes filent vite, j’ai donc préparé une liste de sujets, mais rapidement on déborde. Le temps de faire un point sur des questions cruciales (nos cheveux), de dire du mal de toute la famille, y compris de nos enfants, et de retrouver le prénom du gars avec qui elle était sortie à 14 ans à Albi, il est 19 h 45. Aïe, j’ai mis cinquante-sept minutes pour en passer huit au téléphone avec ma cousine. Mais je suis heureuse, c’est vrai.

Jour 3 : le défi « small talk »                                               

Il s’agit aujourd’hui de papoter avec quelqu’un qu’on ne connaît pas ou mal : un livreur, une commerçante, un mari qui serait peu communicatif, je plaisante. Le « small talk » nous oblige à muscler ce que les Américains appellent des « weak ties » (liens faibles), ce qui aurait des effets positifs sur notre santé mentale. Mon expérience commence dans la douleur. Le monsieur de Chronopost à qui je dis qu’il fait rudement chaud pour la saison me regarde épouvanté, comme si j’attendais de lui un service sexuel. La marchande de fromages, que j’interroge sur ses pâtes dures, désigne d’un menton directif du comté à 42 euros le kilo avant de me tourner le dos. Je me demande si, à Paris, essayer d’entrer en relation détendue avec son prochain est simplement possible. Alors, je me rabats sur la seule personne vraiment joviale de mon quartier : le type un peu dingue qui marche dans la rue en répétant que Jésus est avec lui. Je lui dis : « Moi aussi je suis Team Jésus, vous savez ? » Il me fait cette réponse étrange : « Ça m’étonnerait, tous les Kabyles sont roux. » Bon.

Jour 4 : la liste de mes mercis                                                             

En ce quatrième jour, je dois écrire une lettre de remerciements à quelqu’un que j’aime, comme si je ne devais jamais le revoir. J’envoie un long et bouleversant texto à ma mère, 89 ans, qui me répond qu’elle n’est pas encore morte, si je pouvais éviter de lui filer le cafard ça serait gentil. L’autre exercice consiste à dresser une liste de gratitudes à l’égard de son conjoint. Et là, c’est pas que je sèche, mais je constate que, dans la plupart des cas, je suis coauteure de ses bienfaits (c’est moi qui l’ai demandé en mariage, les mômes, c’est pas lui qui les a pondus, les cadeaux les plus réussis, c’est parce que je passe ma vie à lui coller des Post-it dans son portefeuille, les vacances, c’est toujours bibi qui réserve, tous ces beaux trucs qu’il rapporte du marché, c’est moi qui transforme le produit après…). Je finis par m’écrire une liste de gratitudes à moi-même. Et comme je ne suis pas une ingrate, elle commence par : « Merci, moi, d’avoir choisi un mec aussi cool il y a trente-cinq ans. » Tout ça me rend extrêmement heureuse.

Jour 5 : le rapprochement avec un collègue                                                    

D’après une enquête Gallup de 2022, les gens qui ont un super pote au boulot sont bien plus épanouis et productifs. Dans mon cas, les choses risquent d’être compliquées, parce que j’aime toutes mes collègues du fond du cœur, et ça ne m’a jamais rendue meilleure journaliste ni surtout plus riche. Ça, c’est sans doute parce qu’en vingt-cinq ans je n’ai pas assez renouvelé mon cheptel de cops. Tiens, si j’essayais la directrice du groupe, qui ne travaille même pas au même étage que moi mais qui m’a fait un gentil sourire à la galette des Rois ? Je lui envoie un long mail pour lui dire toute mon admiration, ce boulot génial qu’elle fait pour nous tous qui travaillons si dur, et lui propose qu’on déjeune. Elle me répond que, pour les augmentations, c’était en novembre qu’il fallait prendre rendez-vous, avec plein de smileys clignant de l’œil. Bon.

Jour 6 : les promesses tenues                                                       

Aujourd’hui, je dois faire ce que je promets. Tous ces « je t’appelle vite ! » qu’on répète sans arrêt ? Eh bien, c’est le moment d’y aller. Bilan : stupéfaction des vingt-deux personnes qui recevant un texto de ma part pensent que mon téléphone a été piraté par une dame qui, depuis Lagos, veut leur donner son héritage contre un simple Rib. Second objectif : dire « oui » à une invitation qui m’emmerde parce que, statistiquement, les corvées se révèlent souvent des moments sympas. J’accepte d’assister à une réunion sur le compte personnel de formation proposée par un monsieur au téléphone. Il est tellement surpris de ma réaction qu’il raccroche.

Jour 7 : le goût des autres                                            

Après tous ces efforts, il est temps de préparer l’avenir. Car l’étude de Harvard est formelle : l’une des grandes tristesses des gens est d’avoir perdu des amitiés au fil du temps, faute de les avoir entretenues. La bonne idée consiste à créer des rituels et à leur donner des noms, genre « Les petits dej des premiers lundis du mois des anciennes de Notre-Dame-des-Sept-Douleurs ». Prise d’une pulsion, je crée donc un groupe WhatsApp dans lequel je mets tous mes contacts : « Les dîners du mardi d’Alix, vient qui veut ! » La semaine prochaine, on sera 122 à la maison, apparemment. Ce que c’est d’être en « tip-top social shape », tout de même.

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