Santé

Relations toxiques : ce déclic qui leur a permis de s’en sortir

« Ma voisine m’a dit “tu vas finir dans une housse” »

J’étais atteinte d’une sclérose en plaques et après sept mois de lutte pour retrouver mes jambes, qui m’ont lâchées alors que j’étais professeure de philosophie, je renoue avec mon passé en retrouvant sur les réseaux sociaux un ancien camarade de CP. Mon premier élan amoureux, du haut de mes six ans. Son nom était gravé dans le marbre. Je le recontacte et très vite, nous entamons une histoire d’amour. 

Cela me réparait sans doute dans ma reconstruction orthopédique pour retrouver mes jambes et mon élan vital. Très vite, surgissent les insultes, le mépris. « Sale handicapée de merde », « pauvre meuf », « t’es nulle », « t’es qu’une merde »… Puis les coups. Les bleu Klein, comme je les appelle. Ceux que l’on compte dans la baignoire. C’était le seul endroit où je pouvais pleurer.  

Lui gardait ses sourires de façade alors qu’il m’avait cassée une dent… et toute ma féminité. Et puis, les viols. Les nuits à étouffer mes larmes dans l’oreiller pas assez grand pour accueillir ma douleur.

Le déclic, c’est une voisine qui passe déposer un livre à mon attention. Elle découvre le chaos dans mes yeux, mon maquillage qui ne cache plus rien et qui me dit : « Tu finiras dans une housse. » J’obtiens un concours de chef d’établissement et n’en parle à personne. Je dis à mon ex que la distance nous fera du bien et je le quitte à distance. J’ai dû fuir à 900 km pour me libérer de lui. 

Aujourd’hui, mon cœur est en miettes. Un puzzle auquel il manque tant de pièces. Je suis partie grâce à l’obtention de ce concours pour fuir sa folie, son alcoolisme, ses addictions, son sexe comme un poignard en moi. Il me terrorise encore aujourd’hui. J’ai vomi tout ce que j’ai pu. 

J’ignore si l’on s’en sort réellement, car c’est une prison pour toujours. La douleur en est une. Son emprise a cessé doucement et il m’a fallu quelques mois en faisant un travail sur moi pour aller mieux. Mais c’est comme une addiction. Il faut du temps et se centrer sur les moments atroces pour retrouver lucidité et dignité pour soi.

Clémence, 38 ans 

Lire aussi >> Une psy nous explique pourquoi nous sommes attiré·es par les relations toxiques 

« Elle a pris mon visage entre ses mains et m’a soufflé que je méritais mieux »

J’ai rencontré mon ex sur les réseaux sociaux, il y a sept ou huit ans. Parce que nous avions des amis en commun, nous avons décidé de nous rencontrer autour d’un verre. Très vite, nous sommes tombés amoureux. Mais ce qui démarrait comme une relation parfaite est rapidement devenu très compliqué. Pendant deux ans, elle m’a menti systématiquement. 

J’ai pris conscience très vite que son comportement n’était pas normal. Elle travaillait beaucoup avec son meilleur ami, connu pour avoir photographié sous les jupes des filles sans leur consentement. Il avait la mainmise sur elle, une fille cassée. 

Sa relation avec sa mère était conflictuelle, son géniteur l’avait abandonnée et celui qui l’avait élevée et qu’elle considérait comme son père était décédé brutalement. Elle s’était donc construite avec ce besoin constant d’une image masculine plus âgée pour la rassurer. C’était le rôle qu’occupait ce meilleur ami et associé. 

Elle m’a avoué très rapidement qu’elle voyait quelqu’un d’autre, pourtant, ses sentiments pour moi prenait beaucoup de place. Tout cela était compliqué pour elle. Moi, j’étais amoureux et déjà perdu. J’ai ensuite découvert l’identité de son amant, qui la gardait sous son emprise, comme il le faisait avec les nombreuses autres filles avec qui il couchait. Elle faisait les frais de ce pervers narcissique et indirectement, moi aussi. 

J’étais sous emprise au quotidien, tous les jours, tout le temps. Elle mentait constamment quand je la confrontais sur ses aventures avec d’autres hommes. « Non, je ne te trompe pas avec lui, c’est mon meilleur ami » m’assurait-elle un jour, avant d’assumer ses actes le lendemain, puis de les nier de nouveau. J’étais complètement perdu et tout cela était sans fin. 

Je me rappelle qu’elle vivait en colocation avec l’un de ses ex et qu’elle refusait que je me rende chez elle. J’avais pourtant déjà rencontré sa famille, mais je n’avais pas le droit de mettre un pied dans sa maison. Elle avait aussi l’habitude de faire rencontrer ses amants aux personnes avec qui elle sortait. Comme dans un dîner de cons, où c’est toi le con. Elle m’a présenté son ami et amant, moi j’étais le dindon de la farce, évidemment. Mais aussi un autre collègue, avec qui elle couchait également. Tous les « redflags » étaient là pour m’avertir.

Cette histoire complexe m’a beaucoup atteint. J’étais très triste, mais surtout je ressentais une forte colère. Cette relation était moche et me bouffait de l’intérieur. Je ne me sentais plus moi-même, pas heureux, sale. Je suis allé voir un psy qui m’a énormément aidé à comprendre ma place dans la relation : il fallait que j’en parte. Si la thérapie m’a permis de prendre conscience de certaines choses, la rencontre avec une autre femme a été le véritable déclic. 

Je l’ai rencontrée lors d’une soirée professionnelle. Aucun de nous deux n’avait vraiment envie d’être là mais dès lors que nous nous sommes assis au bar, nous ne nous sommes plus lâchés de la soirée. Le monde n’existait plus autour de nous. Nous nous sommes revus le lendemain, et nous nous sommes soutenus, car nous étions tous deux dans une relation. Il a fallu les quitter et construire un couple. 

Elle m’a fait ouvrir les yeux en me parlant, en étant une oreille attentive et disponible et en me faisant comprendre que je valais mieux qu’un quart de relation. Personne ne devait vivre des mensonges et des tromperies au quotidien. Je me souviendrai toujours lorsqu’elle a pris mon visage entre ses mains et m’a dit : « Tu vaux mieux que ça ». Le lendemain, je quittais l’autre fille. 

La rupture était très difficile, comme dans toute relation toxique. Nous sommes restés en contact pendant des mois par messages, et c’était toujours aussi mauvais. Comme un amour qui ne veut pas te lâcher, qui reste comme un vieux souvenir taché. Ces échanges ont failli mettre en péril la relation que j’ai eue par la suite. Alors, on a fini par ne plus se donner de nouvelles, car je l’ai bloquée de partout. Sa famille aussi, puisque l’un des membres de sa famille m’avait menacé ? Je me suis protégé en me coupant de ces gens.  

Paul*, 38 ans 

 

« Ma psy a dit qu’il était barjot » 

Cette relation est récente, car je l’ai rencontré en novembre et je l’ai quitté il y a un peu plus d’une semaine. Je l’ai rencontré sur une application de rencontre, que mes amis m’avaient conseillé de télécharger. Cette histoire m’a vaccinée contre ce type de réseaux. 

Je ne suis pas sûre qu’il ait eu une emprise sur moi, mais je ne doute pas de la toxicité de cette relation. Je n’y prêtais pas vraiment attention au début, alors que certains de ses comportements étaient étranges. D’abord, il me parlait beaucoup de ses ex, même au premier rendez-vous. Il avait d’ailleurs mentionné que la dernière en date était « folle » : en temps normal, je trouverais cette remarque alarmante mais cette fois-ci j’ai laissé couler. 

Plus tard dans la relation, il a pris mon portable et a bloqué mon ex sur Instagram, sans me demander mon avis. Sur le moment, je ne m’en suis pas inquiétée. Et puis un jour, j’ai reçu un message d’un numéro inconnu. Cette personne prétendait être sa copine depuis quatre mois. J’ai demandé des explications, il ne m’a jamais répondu. En échangeant avec cette personne, qui me demande des détails sur son comportement, je me rends compte que c’est lui qui me manipule. Plus tard, au téléphone, il a trouvé le moyen de me faire des reproches, car je ne lui faisais pas confiance. Je croyais une soi-disant inconnue sur le fait qu’il était dangereux, mais pas lui. Je ne sais pas comment j’ai fait pour passer outre un tel comportement, digne d’un esprit tordu. 

Quand il n’était pas d’accord, il cessait complètement de me parler ou s’en allait tout simplement. « Puisque c’est comme ça, j’arrête de te répondre, ça va te faire réfléchir », m’avait-il dit une fois. Le pire, c’est qu’il tournait toujours les situations à mon désavantage, un véritable gaslighting. Je me souviens de ce jour où j’ai refusé de partir avec lui en voyage. Il a annulé les billets, pour finalement m’assurer que la réservation n’avait jamais été annulée. Je lui ai assuré que si, en lui montrant les messages où il avait écrit noir sur blanc avoir été remboursé. Malgré cette preuve irréfutable, il a continué de nier.

Cette relation a impacté mon estime de moi et ma santé mentale, même si elle n’était pas violente. Quand tu es avec quelqu’un, tu dois te sentir bien. Je vais voir une psy, qui a utilisé le terme « pervers narcissique barjot ». Ça a été un déclic. Après être sortie de cette séance, je me suis posé la question pendant plusieurs semaines. « Est-ce qu’elle me dit ça parce que je ne lui raconte que les côtés négatifs de la relation ? » 

Pleine de doutes, j’ai fini par croire que tout ça était de mon invention. J’en ai parlé à mes amies, à qui je ne me confiais pas habituellement. Elles étaient unanimes, il fallait absolument que je parte. Au téléphone, je disais à ma mère que j’étais au bout du rouleau. Mais sortir de ce type de relation est très dur. Il m’a bloquée de partout après que je l’ai quitté et dans ses derniers messages, il dit que je n’existe plus pour lui. Mais hier, j’ai reçu un SMS : « J’espère que tu vas bien. » J’ai répondu « toi aussi », mais mon message ne s’est pas distribué : je suis encore bloquée. Ceci veut dire qu’il me fait signe uniquement pour rester dans ma vie. La manipulation continue.  

 Agathe*, 27 ans

« Il est parti sans dire au revoir à mes parents »

C’est un amour d’adolescence. Il était en terminale et moi en seconde. Très naïve, je pensais que son âge serait le gage d’une plus grande maturité, mais pas du tout ! J’avais été séduite par l’aura qui gravitait autour de lui et à l’époque, notre différence d’âge me paraissait « cool ». 

J’ai très vite déchanté. Il me « gaslightait » constamment. Un jour, une fille de ma classe est venue me dire que Thomas lui parlait souvent et elle m’a montré leurs échanges. Je lui ai mis les preuves sous le nez et il a nié avoir discuté avec elle en criant que j’étais complètement folle. Moi, je laissais passer, parce que je croyais que c’était ça l’amour, le vrai.  

On me conseillait de le quitter et je m’indignais : « Mais vous ne comprenez pas, on est trop amoureux ». Pendant quatre ans, il m’a fait les pires crasses. Il me trompait, disait que j’étais grosse. À cause de ses remarques, j’ai perdu huit kilos en un mois. Bref, je n’étais jamais assez bien pour lui. 

Notre dernière dispute a eu lieu chez mes parents. Il est parti sans leur dire au revoir, ce qui a déclenché chez moi quelque chose qui aurait dû se déclencher bien avant ; cette impolitesse m’a convaincue, c’était la goutte d’eau qui faisait déborder le vase. Alors, je l’ai quitté et je ne lui ai plus jamais adressé la parole. Je pense qu’au fond, j’avais fait le deuil de la relation bien avant d’y mettre un terme. 

Noémie, 28 ans 

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