Santé

Séparation, divorce : elles sont devenues précaires et témoignent

« Mes enfants savent que je n’ai pas de sous » 

J’ai changé de voie professionnelle afin d’être en accord avec mes valeurs et mon engagement avant le Covid. J’étais dir-co dans une grande boite et j’ai décidé de monter un concept de restaurant-épicerie bio, local et de saison. J’y fais absolument tout toute seule, de la cuisine au ménage, à la plonge et aux commandes. Quelques temps après l’ouverture du restaurant, je me suis séparée du père de mes enfants, qui a racheté notre maison de 150m2 à perte. Je me suis assise sur une grosse partie des bénéfices, c’était ça ou il refusait de vendre. Mes seules économies se résumaient à 24 0000 euros de ce rachat de parts, que j’ai ensuite réinvestis dans le fonds de commerce que j’ai racheté.   

Ne pouvant me payer et arrivant en fin de droits de chômage, il m’était impossible de me loger sans salaire ni caution. Je bénéficiais juste du RSA. Depuis deux ans maintenant, je suis en attente d’un logement social, sans aucune piste. J’ai finalement trouvé un gîte de 38m2, très sommaire et rustique. Il ne comptait qu’une une seule chambre, sans équipement et mal isolé. J’y dormais avec mes deux enfants aujourd’hui âgés de 6 et 9 ans.   

J’ai fini par demander une pension. La requête a été adressée au JAF mais nous n’avons pas encore de date d’audience. Le père de mes enfants gagne 7 000 euros par mois et vit très bien mais refuse catégoriquement de m’aider, prétextant que j’ai fait mes choix et que je dois désormais en assumer les conséquences. Certes, j’ai choisi de changer de vie en connaissance de cause, car je savais que je ne gagnerais plus 5000 euros par mois, mais je ne pouvais pas prédire le Covid, l’inflation et la séparation.  

Je me retrouve donc dans une situation catastrophique financièrement, ne pouvant absolument pas couvrir mes charges fixes et réussir à mettre un peu d’essence dans ma voiture. Chaque semaine, les paiements de 20 ou 30 euros, que je n’ai jamais, sont une vraie angoisse. Je fais très attention à tous mes déplacements en voiture, car sans essence, pas de voiture. Et sans véhicule, impossible de récupérer mes enfants. Nous sommes en garde partagée et il existe un énorme décalage entre leur vie chez papa et celle chez maman. Ils savent que je n’ai pas de sous mais ont appris à vivre avec. Ils ont aussi appris la valeur des choses. Parfois, ils veulent m’aider en payant avec leur argent de poche. Le stress que je subis se répercute forcément sur eux.  

Je n’ai absolument aucun budget ni loisirs. Je ne peux pas offrir une glace à mes enfants après l’école ou les emmener au Trampoline Park à 40 euros pour 3h. Depuis février 2022, je ne peux plus payer la cantine. Nous avons déclaré une co-responsabilité parentale, alors le RSA ne s’applique pas sur ces charges et leur papa doit payer. Au quotidien, les besoins essentiels deviennent des dépenses stressantes. Quand les enfants ont eu des poux, j’ai dû acheter un traitement à 60 euros. Mes factures d’électricité étaient impayées depuis six mois. Ma propriétaire les a réglées et retenues sur ma caution. Quand j’ai voulu me reloger, j’avais à peine assez d’argent. Vinted est devenu trop cher pour habiller les petits, alors je vais en fripes et j’essaie de vendre un maximum de vêtements devenus trop petits.  

Je touche la Caf et le RSA, à hauteur 1000 euros au total. Malgré cela, ma petite sœur a dû prendre 1000 euros supplémentaire dans sa cagnotte de mariage pour m’aider à rembourser des prélèvements refusés après que la Caf a suspendu mes droits pendant un mois. Une autre amie m’a prêté de l’argent en janvier car je ne pouvais pas payer l’essence. Ce sont des dettes qui s’accumulent. J’ai actuellement -450 euros sur mon compte en banque, avec un découvert autorisé de 500 euros. Je n’ai pas de biens matériels car tout est resté chez le papa. Si demain un logement social se libère, il sera vide car je n’ai presque aucune possession. Pas de machine à laver, pas de four, pas de canapé. Acheter tout ça, même chez Emmaüs, reste cher. Je trouve injuste de me retrouver à 42 ans, avec mes enfants, séparée, dans une galère financière qui est bien pire que celle dans laquelle j’étais à 20 ans. Je pars d’une situation très privilégiée et d’un très bon salaire. Si j’étais restée dir-co, je n’aurais aucun mal à me reloger et à être indépendante financièrement. 

Laetitia, 42 ans 

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