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Faire face à une inflation persistante et multifactorielle

L’inflation n’est toujours pas descendue à un niveau acceptable, en dépit des mesures mises en place jusqu’à ce jour. Elle s’est même maintenue à un niveau élevé en ce qui concerne les produits alimentaires, si l’on en croit les récentes analyses des institutions spécialisées.

Un constat insupportable pour le Conseil économique, social et environnemental (CESE) qui note que les impacts subis par les ménages marocains depuis le déclenchement de la crise sanitaire ont été « amplifiés par l’inflation, avec à la clé une dégradation de leur pouvoir d’achat et de leur niveau de vie ».

La tendance haussière des prix, en particulier ceux des produits alimentaires, pèse davantage sur les revenus modestes

Il faut dire que le Maroc a été témoin d’une escalade quasi-ininterrompue des prix à la consommation à partir du dernier trimestre de l’année 2021, avec des taux d’inflation exceptionnels culminant à  plus de 10% en février 2023, succédant à une moyenne de 6,6% en 2022, rappelle l’institution constitutionnelle dans son 12ème rapport annuel.

Selon le CESE, présidé par Ahmed Réda Chami, « cette tendance haussière des prix, en particulier ceux des produits alimentaires, pèse davantage sur les revenus modestes, étant donné le poids plus élevé de ces produits dans leur panier de consommation ».

Une situation de moins en moins tolérable pour la classe moyenne, « dans la mesure où cette catégorie de ménages dispose de faibles marges de manœuvre pour résister à des chocs inflationnistes importants. Ceci est d’autant plus vrai qu’ils recourent souvent à des services sociaux de base, tels que l’éducation et la santé, proposés par le secteur privé à des tarifs plus élevés, face à une qualité des services publics encore en deçà de leurs besoins et aspirations », fait-il remarquer.

Face à une inflation persistante et multifactorielle, le Conseil estime nécessaire d’adapter de manière impérative les mesures visant à soutenir le pouvoir d’achat. Car, l’évolution de la situation est telle qu’« environ 3,2 millions de personnes supplémentaires ont basculé dans la pauvreté (1,15 million) ou dans la vulnérabilité (2,05 millions), ce qui tend à ramener notre pays à la situation qui prévalait en 2014 ».

Tout en tenant compte des mesures prises par les pouvoirs publics, l’institution préconise pour cela des mesures additionnelles à court terme dans son 12ème rapport annuel.
Elle recommande ainsi de renforcer le contrôle des pratiques anticoncurrentielles, en imposant des sanctions suffisamment dissuasives en cas d’infraction, ainsi que des mesures à même d’atténuer l’accumulation de marges excessives.

Le CESE suggère aussi d’étudier la faisabilité d’instaurer, de manière provisoire, un contrôle de prix pour certains produits de première nécessité qui ont subi une hausse significative ou qui revêtent une importance capitale en tant qu’intrants communs au reste des produits, rappelant que « les articles 4 et 5 de la loi 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence offrent une ouverture propice à la mise en œuvre d’un tel mécanisme ».

Pour lutter contre l’inflation des produits alimentaires, l’institution plaide pour la subvention des intrants agricoles en particulier dont les semences, les produits phytosanitaires, les aliments de bétail.

Elle plaide aussi pour l’accélération de la réforme des marchés de gros en adoptant un dispositif ouvert à la concurrence et conditionné par le respect d’un cahier de charges tout en facilitant l’accès logistique à ces marchés pour les petits agriculteurs et coopératives.

A prendre également en compte, l’accélération de la publication des textes d’application de la loi 37-21 qui ouvre la possibilité de la commercialisation directe des produits agricoles issus des projets d’agrégation, sans passer par les marchés de gros.

Autre mesure supplémentaire préconisée : le développement d’« un système d’information dédié afin de garantir, autant que faire se peut, une totale transparence des marchés par rapport aux quantités échangées, mais également en matière de prix et de marges pratiquées ».

En plus d’accorder des aides directes aux ménages défavorisés pour atténuer l’impact sur leur pouvoir d’achat, le Conseil suggère d’étudier la faisabilité d’une réduction exceptionnelle des taux de TVA, ciblant spécifiquement les produits de première nécessité pesant davantage dans le panier des ménages défavorisés et de la tranche inférieure de la classe moyenne.

S’il est convenu que l’inflation observée demeure dominée par des facteurs liés à l’offre et aux coûts de production dans certains secteurs, force est de constater qu’« elle est aussi influencée par des comportements potentiellement moins concurrentiels et des distorsions observées au sein des circuits de commercialisation », a tenu à faire remarquer le CESE.
Ainsi, a-t-il estimé, « il convient également de ne pas exclure la possibilité d’apparition et de développement d’un phénomène d’inflation alimentée par l’augmentation des marges de certains producteurs, dénommé “greedflation“ ».

Alain Bouithy

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