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Coupe du Monde 2030 au Maroc : les véritables enjeux de ce Mondial

[Par Abdelaziz Bouabid]

Il y a des pays qui rêvent d’être les premiers et il y a ceux qui sont déjà sur le podium. Retour sur le choix de la FiFA de faire du royaume la locomotive du mondial 2030. Décryptage. L’annonce est inédite. Que le Souverain en personne se soit donné la peine de révéler de la Coupe du monde 2030 accordée au Maroc montre que l’information vaut bien son pesant d’or. Non seulement parce qu’il s’agit là du premier pays africain et musulman qui est directement impliqué dans l’organisation de cette grand-messe du football international mais, cerise sur le gâteau, le royaume a été choisi pour être le chef de file de ce centenaire de la Coupe du monde de football.

Pour les 100 ans du premier Mondial en 1930, la FIFA a voulu marquer un grand coup en décidant que cet événement sportif d’envergure, se tiendra dans six pays et sur trois continents différents qui ont été désignés pour accueillir les matchs. Ce n’est pas pour rien que le royaume, patrie de la tolérance où juifs, arabes musulmans, amazighs vivent en symbiose est en quelque sorte la mascotte d’un évènement qui veut marquer les esprits. « Deux continents unis non seulement dans une célébration du football, mais aussi en assurant une cohésion sociale et culturelle unique. Quel beau message de paix, de tolérance et d’inclusion », s’est félicité le président de la Fifa, Gianni Infantino. « Je suis convaincu qu’avec le Maroc et le Portugal, nous accueillerons la meilleure Coupe du Monde de tous les temps », s’est enthousiasmé pour sa part Pedro Rocha, le président de la Fédération royale espagnole de football par intérim. Que gagne le Maroc dans cette affaire ? Il ne faut pas être devin pour prévoir l’impact positif de cette annonce sur le moral des patrons.

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Les investisseurs qui se frottent déjà les mains en pensant aux retombées de l’organisation du Mondial sur l’économie marocaine, et plus précisément sur les secteurs du tourisme, du BTP et le secteur bancaire en communiqué leur enthousiasme à la bourse de Casablanca où le Masi a démarré fort la séance de ce jeudi 5octobre. L’indice principal de la Bourse de Casablanca est vite parti à la hausse avec 2,25% dans les premiers échanges après l’ouverture pour atteindre 11.922 points. Les volumes traités dépassent déjà les 68 millions de dirhams.

S’il reste difficile de chiffrer ces retombées économiques de la coupe du monde sur leroyaume, il suffit de savoir que pour la Coupe du Monde de football 2022 organisée au Qatar, la FIFA a réalisé des revenus record de 7,5 milliards de dollars ! Les véritables enjeux de la Coupe du monde accordée en partie au Maroc passent d’abord par une réelle modernité dans la gestion des grandes compétitions , ce qui mobilise en premier la traçabilité des billets électroniques. L’organisation de tels évènements est devenue une véritable science avec ses spécialistes, ses communicants et ses financiers, les enjeux autant sécuritaires, économiques que politiques étant énormes. Le Maroc a cependant plusieurs cartes à jouer, par rapport à tous les autres précédents organisateurs de Coupe du monde.

D’un point de vue sécuritaire, les Marocains sont rompus à la gestion de flux, les hommes de Abdellatif Hammouchi sont devenus des experts dans la gestion de crise liée aux grands évènements sportifs qui drainent des foules considérables. Sur le plan des urgences médicales, si la capacité des hôpitaux dans les centres urbains pourrait s’avérer insuffisante en cas de problèmes de santé majeurs dans les stades, le royaume a bien la capacité de mobiliser en un temps record des unités de soins mobiles de haute qualité.

Si cette grand-messe du football est bien l’événement sportif que tous les fans de football attendent avec une très grande impatience, l’organisation d’une coupe du monde reste un défi d’une grande ampleur. Sur le plan des infrastructures, le Maroc n’a pas à rougir de la qualité de ses stades, de la fluidité des autoroutes et des dessertes aériennes. Bien sûr le budget sera élevé notamment à cause de la construction des stades pensés spécialement pour le mondial, comme il faudrait compter sur la rénovation de certains stades.

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Les retombées économiques pourraient finalement être moins attractives que celles espérées même si l’argent dépensé pour organiser cette coupe sera remboursé et que les impacts sur la fréquentation touristique ne peuvent que partir dans une hausse durable et économiquement avantageuse pour le pays, mais personne ne peut nier qu’il s’agit là de compétitions qui renvoient une image valorisante du pays.

Le choix du Maroc ne surprend que ceux qui voient le royaume avec les œillères d’une géopolitique du passé car le Maroc est désormais connu dans le monde entier comme un pays avec une tradition footballistique ancrée : son équipe a failli décrocher la coupe du monde au Qatar en 2022 et depuis les Lions de l’Atlas n’ont pas démérité, bien au contraire, en témoigne la tenue du haut du pavé face à de grandes équipes comme le Brésil. Depuis, le sport et plus spécialement le foot Ball est considéré comme un véritable outil de soft power.

Le Maroc a engagé cette politique d’influence pour se différencier de ses voisins, d’associer le royaume aux valeurs dites « positives » du sport et de faire rayonner le pays grâce à l’organisation de compétitions sportives.

Le sport associé à des valeurs universelles et humanistes est un excellent levier pour toute nation qui cherche à se faire connaître. Avec tous ces atouts, le Maroc cherche avant tout à mettre sur pied un écosystème autour de l’économie du sport : pour vendre la marque du pays (nation branding), diversifier son économie et devenir un leader mondial de l’excellence sportive. Cette stratégie s’accompagne d’investissements sur son territoire pour accompagner les performances des sportifs du monde entier et former les champions de demain s’est

concrétisée notamment avec la création de l’Académie de football en 2009 sur instructions royales. Près d’une décennie après, le royaume chérifien cueille les fruits d’une stratégie qui a fait de la formation des jeunes, son principal fer de lance. Avec un budget de 140 millions de dirhams, soutenue financièrement par le souverain lui-même, avec un tour de table comprenant la Banque du commerce extérieur au Maroc.

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Telecom, la fondation CDG, le groupe ONA, le groupe ADOHA et Wafa Assurance l’Académie qui possède le statut juridique d’une association à but non lucratif est vite devenue avec le Centre national des sports Moulay Rashid deux pôles d’excellence incontournables au profit du sport marocain. Cette stratégie apparaît d’autant plus nécessaire que, depuis , le Maroc est désormais identifié comme un acteur important du sport mondial. Mais derrière cet énième succès « du made in Morocco » : un modèle en étoile qui tire profit de la position géographique avantageuse du royaume, tant le pays est situé́au carrefour de l’Europe, du Moyen-Orient et de l’Afrique. Un « business model » qui repose essentiellement sur une politique de soft power lancée par le Souverain dès son accession au trône.

Portée par sa majesté le Roi, l’organisation de la Coupe du Monde 2030 est une immense chance pour le Maroc. Faute de saisir très vite celle-ci, cette issue « win-win » risque de se transformer en maigre bénéfice économique et politique qu’il sera bien difficile de dénouer si les élus, les politiques et les hommes d’affaires ne prennent pas rapidement le train en marche. Rien de moins. Pour tout le monde, il est grand temps d’agir.


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