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Les précisions du Ministère Public – Aujourd’hui le Maroc

Il a invité les parties prenantes à une réunion au mois de septembre

La question de la surpopulation dans les prisons fait mouche actuellement. Après le communiqué de la Délégation générale à l’administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR) dans lequel elle appelle les autorités judiciaires et administratives à trouver une solution pour le surpeuplement record dans les prisons et la réaction du club des magistrats c’est au tour du ministère public d’en rajouter une couche.

La présidence du ministère public a dévoilé un argumentaire exhaustif dans un récent communiqué détaillant les facteurs conduisant à la hausse de la population carcérale. Tout en affirmant l’importance du contenu du communiqué de la DGAPR au sujet du diagnostic de la situation des établissements pénitentiaires et l’appel à trouver, dans les plus brefs délais, des solutions à la problématique de la surpopulation carcérale pour éviter les retombées qui y sont mentionnées, la présidence du ministère public indique qu’elle continuera d’assurer son rôle en matière d’encadrement et de sensibilisation de ses juges afin de prendre les mesures requises, ainsi que de fournir davantage d’efforts pour rationaliser la détention préventive dans la perspective d’atteindre les objectifs escomptés.

Le ministère public tiendra en en septembre prochain une rencontre réunissant l’ensemble des institutions et des parties concernées pour discuter de cette question, ainsi que des opinions, propositions et moyens pour transcender toutes les difficultés et contraintes liées à la gestion de la détention préventive et à la situation des établissements pénitentiaires, dans la perspective d’une intervention prochaine du Législateur afin de trouver les solutions législatives attendues concernant aussi bien l’adoption de nouvelles dispositions susceptibles de consolider les mesures alternatives à la détention préventive et d’accélérer la promulgation des dispositions relatives aux mesures alternatives aux peines privatives de liberté, au code de la procédure pénale et au code pénal en général.

Facteurs de l’augmentation de la population carcérale

La présidence du ministère public a fait part des facteurs et contraintes qui influent sur le nombre des pensionnaires des établissements pénitentiaires. Elle explique que l’évolution qualitative, ces dernières années, de la criminalité aussi bien sur le plan de la gravité des actes commis que des moyens utilisés ou la nature de leurs auteurs, surtout les récidivistes, avec leurs conséquences sur la quiétude du citoyen et la société, a contraint les parties chargées de l’application de la loi à faire face à tous ces phénomènes en vue d’assurer la sécurité des personnes et de préserver leurs biens. Dans ce sens, elle relève que les services de sûreté et la police judiciaire déploient et continuent toujours à consentir des efforts inlassables face aux hors-la-loi en vue de les appréhender et de les déférer devant les parquets compétents. La même source fait remarquer que leur nombre s’est établi, durant le premier semestre de 2023, à 309.259 personnes poursuivies, dans leur grande majorité, pour trafic de drogues, hooliganisme et crimes financiers en rapport avec la lutte contre la prévarication financière ou encore l’agression des personnes dans le cadre de bandes criminelles, les vols qualifiés et autres crimes graves.

Ainsi, comme l’explique la présidence du ministère public dans son communiqué, les efforts considérables déployés par les services de la police judiciaire, toutes catégories confondues, dans le cadre de leur contribution à la lutte contre l’impunité et à l’arrestation des fugitifs, ont permis l’interpellation, au cours du premier semestre de 2023, de 162.545 personnes faisant l’objet d’avis de recherche nationaux, qui ont été déférées devant les parquets compétents pour prendre les dispositions juridiques qui s’imposent à leur encontre. Dans ce sens, les parquets ont veillé à exécuter les jugements de peines privatives de liberté prononcés contre les condamnés en état de liberté, indique la même source, soulignant que les services de la police judiciaire ont fourni des efforts remarquables pour l’arrestation des personnes condamnées et leur incarcération dans les établissements pénitentiaires concernés. C’est également le cas pour un ensemble de personnes faisant l’objet d’ordonnances de contrainte par corps pour non paiement des amendes, des dettes publiques ou privées qui leur étaient dues conformément à la loi.

Les affaires pénales dans les tribunaux représentent près de 62% du total des affaires en cours devant ces juridictions . (D.R)

Rationaliser la gestion de la détention

La présidence du ministère public indique dans son communiqué qu’elle s’est employée à inciter les parquets à interagir, avec la responsabilité requise, avec les personnes déférées pour avoir commis des actes dangereux, en conciliant protection des citoyens et de leurs biens et préservation des droits et libertés des mis en cause, tout en prenant en considération la capacité d’accueil des établissements pénitentiaires. Conformément à cette orientation et conscients de la nécessité de rationaliser la gestion de la détention, les parquets ont veillé à n’y recourir que lorsque cela s’avère nécessaire, comme en témoigne le taux de détention qui n’a pas dépassé les 24% du total des individus déférés devant eux (309.259 personnes) durant le premier semestre de l’année en cours, un taux raisonnable par rapport à ceux élevés enregistrés dans d’autres pays, relève le communiqué. Ainsi, le nombre de personnes en détention préventive dans les établissements pénitentiaires a connu jusqu’en juillet 2023 une baisse qui s’est établie à 39% contre 40% au cours de la même période de l’année précédente et contrairement aux taux enregistrés à partir de 2010 qui variaient entre 38 et 47%. Ce pourcentage, rapporte la même source, avait atteint 43% en 2010 et 47% en 2011, ce qui démontre que la gestion de la détention suit l’évolution de la criminalité.Les pourcentages enregistrés concernant les taux de détention préventive restent acceptables par rapport aux taux de détention préventive dans certains pays de l’UE en 2022 , comme l’indique le même communiqué, citant le taux de 45,2% pour les Pays-Bas, la Belgique (38,4%), la France (28,5%), l’Italie (31,5%), le Danemark (41,3%) et le Luxembourg (43,3%).

Les magistrats du ministère public demeurent attachés à l’application stricte de la loi et tendent, au titre du principe d’adaptation, à rationaliser la gestion de la procédure de détention pour la majorité des personnes déférées devant eux, ce qui est également le cas des juges d’instruction dans le cadre de leur pouvoir discrétionnaire et de leur indépendance.
Parallèlement, la présidence du ministère public signale qu’à la faveur de l’interaction positive avec les services centraux de la police judiciaire en vue d’améliorer l’efficacité judiciaire à travers la rationalisation de la réalisation des enquêtes pénales dans un délai raisonnable, la plupart de ces enquêtes sont désormais menées dans un délai ne dépassant pas trois mois.La présidence du ministère public explique aussi que la majorité des personnes concernées par ces enquêtes est déférée devant les parquets compétents qui décident de placer certaines d’entre elles en détention préventive chaque fois que les conditions requises sont réunies, notamment la gravité des actes et l’absence de garanties, comme c’est le cas par exemple pour l’émission de chèques sans provision, l’escroquerie, le faux, la traite des êtres humains et autres.

Ce que prévoit le texte de loi 22-43 relatif aux peines alternatives

Sanctions. Pour résoudre la problématique de la surpopulation dans les prisons, le projet de loi 22-43 relatif aux peines alternatives introduit cette sanction dans le corpus juridique marocain. Ainsi, ce type de peine repose sur la mise en place des sanctions sous forme de travaux d’intérêt général, de mesure de surveillance électronique ou par exemple la restriction de certains droits. Il s’agit du recours à des sanctions substitutives à l’incarcération pour les peines de prison courtes, c’est-à-dire celles qui sont inférieures à cinq ans. La finalité étant d’accompagner les évolutions que connait le monde dans le domaine des droits et des libertés mais aussi de parer à la problématique de la surpopulation dans les prisons.

Il s’agit aussi d’optimiser les dépenses. Les travaux d’intérêt général ne devraient donc s’appliquer que pour les personnes âgées de 15 ans ou plus lors du jugement. Le travail est fourni à titre gracieux en faveur par exemple des établissements publics, des collectivités territoriales, des établissements de charité, des lieux de culte et des associations. Sa durée varie entre 40 et 1000 heures. Pour ce qui est du bracelet électronique, il est adopté pour surveiller les déplacements de la personne bénéficiaire de cette peine et c’est le tribunal qui décide la durée et la zone de la surveillance. Le troisième type de peine alternative prévu par le projet couvre les mesures de contrôle, de réparation ou de réhabilitation.

31% des personnes incarcérées pour crimes financiers en 2022

Concernant la population carcérale en 2022, le ministère public indique que 30% d’entre elle est incarcérée pour trafic de drogues, 31% pour crimes financiers et 30% pour agressions graves contre des personnes. De même, les affaires pénales dans les tribunaux représentent près de 62% du total des affaires en cours devant ces juridictions, explique la même source notant que les juges déploient d’énormes efforts pour les traiter dans des délais raisonnables malgré les contraintes liées aux aspects juridique et factuel, en particulier la question de la notification, comme en témoigne le taux des affaires pénales jugées en 2022 (87%), ce qui fait que le nombre des jugements rendus par chaque juge dépasse les 2.000 en raison du manque des magistrats en général, sachant que cette moyenne dépasse celle enregistrée dans certains pays.

Application «saine» de la loi

La présidence du ministère public argumente, par ailleurs, qu’elle met en priorité l’impératif de faire face à la prolifération de la criminalité et la protection des citoyens et de la société de ses effets, sur la base des engagements de l’Etat dans ce sens, il s’agit d’éviter de saper les efforts des services de sûreté et de la police judiciaire en matière de lutte contre le crime et de consacrer le rôle de la justice dans la mise en œuvre du principe de protection des droits des personnes et des groupes, de leur liberté et de leur sécurité judiciaire, conformément à l’article 117 de la Constitution. Pour le ministère public, l’adoption de manière excessive d’une attitude flexible, en maintenant dans un état de liberté des personnes impliquées dans certains crimes dangereux, aura des conséquences graves sur la sécurité aussi bien de la société que des individus.

Néanmoins, il relève que l’approche de traitement du crime diffère d’un pays à l’autre, selon ses spécificités et la culture de ses citoyens, estimant que cela implique pour le Royaume un travail soutenu pour changer la culture dominante actuellement chez certaines catégories de citoyens qui considèrent que l’efficience de la justice pénale est liée à la détention et que l’efficacité de la dissuasion réside dans les peines privatives de liberté, sans quoi cette justice reste critiquable et inefficace, sachant que le pouvoir judiciaire, de manière générale, ne prête aucune attention à ce courant et veille à une application saine et appropriée de la loi. Cette situation, selon la même source, requiert le traitement de la question de la surpopulation carcérale à travers diverses approches afin d’humaniser les établissements pénitentiaires et assurer les conditions adéquates au personnel y travaillant.

Conditions de détention, selon la DGAPR

Incarcération. «Suite au communiqué de la DGAPR rendu public le 7 août courant dans lequel elle évoque les contraintes posées par une surpopulation carcérale croissante en ce qui concerne les conditions d’incarcération, de réhabilitation et de réinsertion, des interprétations erronées de ce constat ont été relevées, et ce, en minimisant les efforts continus déployés par la Délégation Générale sur ce registre», relève la DGAPR dans un communiqué. Celle-ci note avoir délégué le service de la restauration des détenus à des entreprises spécialisées dans ce domaine, ce qui a permis d’améliorer les repas offerts aux détenus.

Pour ce qui est de la couverture médicale, la même source note une amélioration significative du nombre et de la qualité des prestations médicales apportées aux détenus, soulignant que sur le plan de la scolarisation, de la formation professionnelle et la lutte contre l’analphabétisme au titre de l’année 2022-2023, un total de 6.748 détenus ont bénéficié des programmes d’enseignement et d’éducation informelle. De même, le nombre des détenus ayant décroché leur baccalauréat en tant que candidats libres se chiffre à 633 personnes, auxquelles s’ajoutent 1.685 détenus inscrits dans les différentes facultés. Lors des cinq dernières années quelque 602 détenus ont obtenu des diplômes universitaires, précise la même source. Concernant l’alphabétisation, le nombre des bénéficiaires s’élève à 43.966 bénéficiaires durant les cinq dernières années.

 

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