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Changement du premier ministre : un acte anticonstitutionnel

Bien que le paragraphe 5 de l’article 91 de la constitution adoptée en novembre 2020, en dépit d’un large boycott du référendum, accorde au président de la République le pouvoir de « nommer le premier ministre ou le chef du gouvernement selon le cas et met fin à ses fonctions », l’article 103 du paragraphe 2 du chapitre 3, titre 1, de cette même constitution précise que le poste de Premier ministre reviendra à la force politique majoritaire au Parlement. Cette force politique majoritaire est le FLN qui compte 105 sièges sur les 407 que compte l’assemblée nationale à l’issue des élections législatives du 12 juin 2021. Des élections boycottées par la population comme toutes les joutes électorales qui l’ont précédées (présidentielle et référendum sur la constitution).

 La constitution distingue la majorité présidentielle de la majorité parlementaire. Tebboune s’étant présenté à l’élection présidentielle du 12 décembre 2019 en candidat libre et même après sa désignation à l’issue d’une houleuse élection largement chahutée par des manifestations contre le scrutin, il n’a pas songé constituer un parti politique pour soutenir son programme d’action. Par conséquent, on ne peut parler, en Algérie d’une majorité présidentielle.

Cependant, le système politique en place tenu par des forces occultes tapies sur les hauteurs d’Alger, précisément aux Tagarains, siège du ministère de la défense nationale et de l’état-major de l’armée, font fi des textes de la loi fondamentale du pays pour priver le FLN, bien qu’il leur soit acquis, de désigner un chef du gouvernement en nouant des alliances avec les partis qui peuvent lui permettre de s’assurer une majorité confortable. Il n’en est rien de tout cela.

Même en s’arrogeant la prérogative de désigner le premier ministre, le président de la République, agissant pour le compte de ces forces occultes, ne respecte pas les formes. L’article 105 énonce clairement « S’il résulte des élections législatives une majorité présidentielle, le Président de la République nomme un Premier ministre et le charge de lui proposer un Gouvernement et d’élaborer un plan d’action pour la mise en œuvre du programme présidentiel qu’il présente au Conseil des ministres. » Il n’en est rien dans la désignation de Larbaoui Nadir ce samedi 11 novembre.

Abdelmadjid Tebboune s’est contenté de désigner Nadir Larbaoui, arrivé de New-York depuis à peine 8 mois où il était représentant de l’Algérie à l’ONU, à la tête du gouvernement après avoir effectué une escale de moins de 8 mois au siège de la présidence de la République en qualité de directeur de cabinet du président.

Nadir Larbaoui est parachuté à la tête du même gouvernement que dirigeait son successeur. Ce qui a fait dire à un observateur des coulisses politiques algériennes « Tebboune a agi comme un président d’un club de football qui change l’entraîneur tout en gardant l’effectif de son team ».

En agissant de la sorte, Tebboune a foulé aux pieds la constitution. Notamment son article 1055 (cité ci-dessus) et  l’article 106 qui énonce « Le Premier ministre soumet le plan d’action du Gouvernement à l’approbation de l’Assemblée Populaire Nationale. Celle-ci ouvre à cet effet un débat général. Le Premier ministre peut adapter ce plan d’action, à la lumière de ce débat, en concertation avec le Président de la République. Le Premier ministre présente au Conseil de la Nation une communication sur le plan d’action du Gouvernement tel qu’approuvé par l’Assemblée Populaire Nationale. Le Conseil de la Nation peut émettre, dans ce cadre, une résolution. »

Les décideurs qui ne se sont pas préoccupés de ces détails, dans un pays où le débat politique est totalement inexistant, ont certainement plus grave et plus important, à leurs yeux, qu’un changement de premier ministre dans le respect de la loi fondamentale du pays. Ils donnent l’impression d’agir dans la précipitation. Et pour cause, l’échéance de la présidentielle arrive à grandes enjambées. Très probablement, ce changement intervenu à la grande surprise des observateurs s’inscrit dans la perspective de l’échéance électorale présidentielle.
 

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