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La police nationale à l’épreuve de l’essor de la délinquance 2.0

L’année 2023 s’achève sur une bonne performance de la police nationale. Le rapport annuel de la Direction Générale de la Sûreté nationale (DGSN) fait état d’un taux d’élucidation des crimes record (95%) réalisé pour la septième année consécutive. Cette année a été marquée également par une montée en puissance de la cybercriminalité dans un contexte de léger recul de la criminalité classique. Les chiffres de la DGSN témoignent de cette hausse de ces nouvelles tendances criminelles, lesquelles trouvent dans l’espace numérique un terrain propice pour se développer.

Ainsi, le bilan de 2023 fait état d’une progression de 6% par rapport à l’année précédente. Dans ce sens, le rapport de la DGSN indique que 5969 affaires ont été mises sur la table des enquêteurs, lesquels ont décelé 4070 contenus violents sur internet. S’agissant du chantage sexuel ou de l’extorsion sexuelle, il y en a eu 508 affaires, soit 18% de plus qu’en 2022. A cet égard, 515 victimes, dont 109 ressortissants étrangers, en ont pâti tandis que 182 personnes impliquées ont été arrêtées. 

Concernant les crimes liés aux technologies modernes et à la cyber-extorsion, ils ont enregistré une augmentation de 6%, avec près de 5.969 affaires, tandis que le nombre de contenus utilisés dans ce type d’affaires enregistrés a atteint 4.070, alors que celui des mandats internationaux émis s’est établi à 842, contre 752 au cours de l’année dernière.

Dans le cadre de ces affaires, 874 personnes ont été interpellées et déférées devant la justice. Pour ce qui est des affaires de sextorsion, les services de la Sûreté nationale ont enregistré, au cours de cette année, 508 affaires, en hausse de 18 % par rapport à l’année précédente, alors que 182 personnes, impliquées dans ces actes criminels ayant ciblé 515 victimes dont 109 étrangers, ont été arrêtées.
 

La police face aux nouveaux crimes digitaux

 

Face à la montée en puissance du crime numérique, la DGSN s’adapte continuellement. Une condition sine qua non pour pouvoir contrer ce genre de crimes en constante évolution. 

Au Maroc, les affaires de sextorsion et de diffamation demeurent les plus fréquentes, selon une source sécuritaire au Service de lutte contre les crimes liés aux nouvelles technologies, à la DGSN. Cependant, les criminels numériques se font de plus en plus innovants vu l’extension fulgurante d’internet sur la vie quotidienne des gens dans un contexte de digitalisation rapide. Les services de police, selon notre interlocuteur, font de plus en plus face à de nouveaux crimes plus sophistiqués, dont les cas d’escroquerie dont les auteurs envoient de fausses convocations de police pour des faits de cybercriminalité. En plus de cela, il existe une nouvelle tendance qui se fait de plus en plus remarquer sur la scène criminelle. Il s’agit du «phishing», c’est-à-dire un procédé par lequel le criminel extorque des données personnelles par le trucage de sites d’établissements privés (hôtels, magasins, sites de vente en ligne, etc.).

Notre source évoque également le phénomène de « skimming » ou l’usurpation des données des cartes de crédit d’autrui pour faire des achats sur Internet. Les services de police se préparent également, dans une logique avant-gardiste, au « Jackpotting », qui se développe à l’échelon mondial et qui pourrait bientôt faire son entrée au Maroc. C’est le fait de dévaliser un distributeur automatique à l’aide d’un hacker. Il est probable que ce genre de pratiques criminelles soit importé au Maroc de façon imminente. D’où la nécessité d’une approche de riposte préventive.

En parallèle, le phénomène des faux communiqués et des fake news est devenu quasiment un crime traditionnel et familier grâce aux vecteurs de propagation de la désinformation qui sont à la portée du grand public. Les applications de conversation instantanée et les groupes privés en sont la meilleure preuve.

Pour augmenter la veille et détecter les foyers de circulation des fausses nouvelles à fort impact d’empoisonnement de l’opinion publique, la DGSN, précise notre source, se réserve le droit d’utiliser tous les moyens légaux pour détecter les sources des contenus douteux, y compris ceux en provenance des faux comptes sur les réseaux sociaux. Là, l’accès aux délinquants invisibles est possible pour les services compétents qui font appel dans ce cas aux mécanismes qu’offre la coopération internationale qui donnent accès aux canaux de communication avec les géants du web, notamment des GAFA. 

Pratiquement parlant, il existe un système de requête directe avec des sociétés telles que Facebook et d’autres plateformes. Ce système permet un échange direct concernant les contenus douteux et susceptibles de constituer des crimes. Les services compétents peuvent demander au GAFA de diversifier les informations suspectes afin d’identifier leur source. Cela se fait en concertation avec le Parquet compétent, tel que prévu par la loi.
 

Coopération internationale : Un outil précieux

Aussi, la convention de Budapest, signée par le Maroc, est-elle un outil précieux pour épauler les services de sécurité des pays signataires. En vertu de cette convention, qui date de 2004, les Etats signataires coopèrent 24h sur 24 dans le cadre d’un système d’échange d’informations. Au Maroc, c’est au Service de lutte contre la criminalité liée aux nouvelles technologies qu’incombe la charge d’assurer cette coordination régulière avec les partenaires internationaux. 

Par ailleurs, la DGSN est dotée d’un dispositif national important en matière de lutte contre la cybercriminalité avec une architecture institutionnelle complexe. Il existe 29 brigades spécialisées créées depuis 2015. Elles relèvent toutes des services déconcentrés de la Police judiciaire dans les différentes préfectures de police. D’autres brigades devraient être créées très prochainement pour renforcer le dispositif actuel, selon nos sources.

Pour ce qui est des expertises techniques, elles se font au niveau de cinq laboratoires régionaux d’analyse de traces numériques. Celles-ci se trouvent dans des villes comme Marrakech, Laâyoune, Casablanca, un au niveau de la préfecture de Police de Tétouan. Ce dernier laboratoire a été créé, en juillet 2020, pendant la période de la pandémie pour répondre à des besoins urgents. Ces laboratoires travaillent avec du matériel de haut niveau qui nécessite des moyens financiers colossaux. 

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