L’Agence Nationale de Lutte contre l’Analphabétisme (ANLCA) vient de dévoiler des chiffres alarmants concernant le niveau d’analphabétisme au Maroc.
C’est clair et net et tout à fait désolant. Ce sont dix millions de citoyens marocains, sur un total de 36,47 millions d’habitants, qui sont en situation d’illettrisme. Ils ne maîtrisent pas les compétences de base nécessaires pour être autonomes au quotidien : lecture, écriture, calcul, repérage dans l’espace et le temps, numérique. Sont ciblés par ce fléau pour une grande partie de la population, les jeunes et les adultes issus des milieux les plus défavorisés c’est à dire le rural à au moins aux 2/3.
L’analphabétisme au Maroc a toujours été un défi persistant pour les autorités. Pendant de nombreuses années il était estimé qu’environ un tiers de la population marocaine était analphabète, ce qui signifie que ces personnes ne pouvaient ni lire ni écrire correctement en arabe ou en d’autres langues. Cela n’a semble-t-il, guère évolué en dépit des différents gouvernements marocains, ayant pris diverses mesures pour lutter contre ce fléau qui n’est pas propre qu’au Royaume. En effet lors de la dernière décennie où l’on avait pour objectif déclaré par les gouvernements Benky, El Otmani & consorts, d’éradiquer l’analphabétisme à l’horizon de 2024, des programmes d’alphabétisation ont été mis en place pour aider les adultes à posséder des compétences de base en lecture et en écriture.
De plus, des initiatives visant à améliorer l’accès à l’éducation dans les zones rurales et défavorisées ont été lancées pour réduire le taux d’analphabétisme chez les jeunes. Malheureusement aucune évolution n’a été constatée depuis et la situation est restée à son niveau d’avant la crise de Dame Covid. Au Maroc, le taux global national d’alphabétisation est passé de 52,3% en 2004 à près de 64,1% en 2019. Pour les hommes, le taux d’alphabétisation a atteint 74,6% en 2019 (contre 65,6% en 2004), alors que celui des femmes a atteint 53,9% en 2019 (contre 39,6% en 2004). Grosso modo, sur un demi-siècle le taux d’analphabétisme est passé de 87% en 1960 à 32% en 2014, soit une baisse de 55%. Mais bien du chemin, cependant reste à faire.
Cela dit, les données de l’ANLCA, ont révélé d’autres points : certains reçoivent un enseignement limité se limitant à la lecture du Coran, sans pouvoir lire dans d’autres langues étrangères telles que le français ou l’espagnol. Mais dans cette histoire, il est une nuance dès lors que l’on compare l’analphabétisation et l’illettrisme. Si le premier est en rapport avec des personnes qui ne sachant ni lire ni écrire, le second a trait à celles qui ont été scolarisées, mais qui n’ont pas, ou plus, une maîtrise suffisante de la lecture, du calcul et de l’écriture leur permettant de gérer de façon autonome les situations simples du quotidien.
L’Unesco estime que 763 millions d’adultes dans le monde, Maroc y compris, n’ont toujours pas de compétences de base en matière de lecture, d’écriture et de calcul, dont deux tiers sont des femmes. L’Asie du Sud abrite près de la moitié de cette population mondiale de jeunes et d’adultes dépourvus de ces compétences de base, tandis que 27 % vivent en Afrique subsaharienne. Les autres 10 % se trouvent en Asie de l’Est et du Sud-Est, 9 % en Afrique du Nord, tandis qu’environ 4 % vivent en Amérique latine et dans les Caraïbes et 4 autres % en Asie occidentale.
Aujourd’hui pour pouvoir se targuer d’être un pays développé ou tout au moins émergent, il faut être partie prenante des sciences, des technologies qui n’ont de cesse d’évoluer, de l’éducation et de l’enseignement, dans les écoles, bref d’une culture du savoir et plus si affinité. Or, quand on traine un fardeau d’analphabétisation équivalent au tiers du volume de sa population, il y va sans dire que la tâche pour lutter contre cette situation qui reste tabou à bien des égards, relève d’un des sept travaux d’Hercule le plus difficile. Au Maroc, l’alphabétisation n’a de cesse de rester un chantier depuis plusieurs décennies.
Depuis l’avènement en 2016 de l’ANLCA, qui a pour mission la lutte contre l’analphabétisme, sa première feuille de route 2017-2021 a permis à cet égard de faire bénéficier à 5,48 millions de divers programmes mis en place. Toutefois, force est de constater, que l’on stagne toujours sur le chiffre 10 et ce, depuis une bonne dizaine d’années au moins.
