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Fatima Zahra El Mhijar déconstruit les stéréotypes sur les femmes au travail

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Le 17 janvier aura été un jour mémorable pour Fatima Zahra El Mhijar. Ce jour-là, elle a pris le volant d’un camion pour la première fois de sa vie, en tant que conductrice professionnelle. Elle confie à Yabiladi avoir reçu un appel à une heure du matin, «de la part de de l’une des entreprises qui ont eu [son] CV». «On m’a demandé en urgence de remplacer un chauffeur tombé malade. Etant en bonne santé, je n’ai pas hésité un seul instant. J’avais besoin de ce travail et j’avais plus envie d’évoluer dans ce domaine», nous a-t-elle confié.

Le moment choisi pour cet appel téléphonique n’a pas découragé Fatima Zahra, qui s’en rappelle sur le ton de l’anecdote. «On m’a dit que j’avais une demi-heure pour me rendre sur place et récupérer le camion. Je ne sais pas comment j’ai fait pour arriver là-bas. Je suis même arrivé avant l’heure !», se souvient-elle.

«Au moment où j’ai reçu l’appel, mon mari dormait et je ne voulais pas le réveiller. Je lui ai laissé un SMS pour lui parler du travail. Il n’était pas du tout contrarié. Il fait partie des personnes qui m’encouragent beaucoup. Dès le début, il connaissait les circonstances de mon travail. Nous avons convenu de nous encourager mutuellement, tant qu’il y a de la confiance entre nous.»

Fatima Zahra El Mhijar

Le défi de devenir conductrice de poids lourds

Mais à sa grande surprise, la jeune femme a réalisé sur place que le camion qu’elle devait conduire n’était pas de la catégorie de ceux pour lesquels elle a été formée. Originaire de la ville de Taza, où elle a passé 12 ans avant d’immigrer à Cholet, avec sa sœur et sa mère pour rejoindre son père, elle nous confie ne pas avoir caché sa peur. Fatima Zahra, 27 ans, s’est appuyé sur les conseils du chauffeur qui lui a amené le véhicule. «Il m’a dit qu’il fallait faire un grand virage à chaque fois, ce que j’ai fait et tout s’est bien passé», se souvient-elle.

Après quatre heures et demie de route, la jeune conductrice est arrivée à destination. Elle raconte : «J’ai trouvé un autre chauffeur qui m’attendait. Il était de nationalité marocaine. Il a été très surpris et m’a encouragée à poursuivre mon parcours professionnel». Fatima Zahra a remplacé le chauffeur qui n’était indisponible que pendant une semaine. Après quoi, elle a commencé à recevoir une série d’offres de différentes entreprises, ce qui lui a donné une plus grande confiance en elle et en ses capacités.

Ce choix professionnels n’a pas été le fruit du hasard. «Durant mes études secondaires, j’ai rédigé une liste reprenant les noms des métiers les plus demandés sur le marché, ce qui allait me permettre de travailler dès que je serais diplômée», se souvient-elle. Son choix s’est porté sur le domaine du transport et de la logistique, car il «offre des possibilités de travailler dans divers secteurs», nous a-t-elle confié.

Après avoir obtenu son baccalauréat dans le domaine des transports, Fatima Zahra décide de poursuivre ses études supérieures en gestion des transports et de la logistique, à l’Institut Universitaire de Technologie (IUT) de Saint-Nazaire. Elle a continué ensuite son cursus à l’Université des langues de Nantes, où elle a appris à maîtriser le russe et le roumain. «Ce sont deux langues dont nous, en tant que conducteurs de camions de marchandises, avons beaucoup besoin», rappelle la conductrice.

«A ce moment-là, je ne pensais pas que je conduirais des camions. Durant mes études, j’ai suivi plusieurs formations. J’ai travaillé dans la gestion, mais aussi dans l’emmagasinage. J’ai également accompagné les camionneurs dans leurs tâches, ce qui a porté mon attention davantage sur la conduite. J’ai réalisé que j’avais choisi le bon domaine.»

Fatima Zahra El Mhijar

Un tremplin grâce au service volontaire

Après avoir passé un an à l’université, période qui a coïncidé avec la crise sanitaire de 2020, Fatima Zahra a assisté à la mise en arrêt de la plupart des emplois chez les étudiants. Cette période a également coïncidé avec son obtention de la nationalité française. Elle a décidé d’intégrer le service volontaire au sein de l’armée. «J’ai réussi les examens et en deux mois, j’ai été en immersion totale dans le camp. J’ai appris beaucoup de choses. C’est là aussi que j’ai passé un permis de conduire de petit camion en 2021. J’ai passé ensuite un permis de conduire poids lourd, en 2022». Un an plus tard, elle débute ainsi son premier emploi.

Lorsque Fatima Zahra est arrivée en France en 2008, elle n’a pas imaginé qu’elle ferait un jour partie des rares femmes à se lancer dans ce métier. Elle a moins imaginé qu’elle s’adapterait à sa nouvelle vie en diaspora.

«Les premières années où je suis venue de Taza en France, c’était une étape très difficile pour moi et pour ma sœur. Nous avons été confrontés au problème de la langue et donc à des difficulté d’intégration. Mais heureusement pour nous, les conditions ici étaient très bien à cette époque. Nous avons eu l’aide de professeurs pour apprendre la langue rapidement. Après une courte période, nous avons pu continuer nos études normalement. Je me souviens encore de ces jours comme si c’était hier.»

Fatima Zahra El Mhijar

Le choix de Fatima Zahra pour ce domaine, que certains considèrent comme «masculin», n’a pas constitué un obstacle au sein de sa famille, qui l’a toujours encouragée dès le début. «Mon père m’a davantage motivée à avancer. Il ne s’est jamais opposé à mon projet de vie. Mais ma mère qui avait peur pour moi, au début. Elle me demandait pourquoi je ne chercherais pas un travail près de la maison, comme les autres filles. Je la comprends. Elle est comme d’autres mères qui ont très peur de ce genre de métiers pour leurs enfants». Mais le regard de sa mère a vite changé, voyant sa fille épanouie dans son activité professionnelle.

Contrairement à l’année 2023, où la jeune conductrice a décidé de limiter son travail à la France, elle a conclu sur un ton motivé : «Maintenant, j’envisage de devenir professionnelle dans le transport international», nous affirme-t-elle. Son plus grand rêve est désormais de «conduire un camion au Maroc».


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