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Qasim Amin, leader du mouvement féministe arabe

Fin du XIXe siècle dans la région d‘Alexandrie, un aristrocrate kurde ottoman et une Egyptienne mirent au monde celui qui devint la référence des mouvements féministes arabes modernes : Qasim Amin. Celui-ci naquit le 1er décembre 1863 avant de déménagement de sa famille au Caire, où il paracheva ses études secondaires et poursuivit des études en droit.

Parallèlement à ce cursus qu’il suivit avec brio jusqu’à obtenir son diplôme en 1881, Qasim Amin était sensible à la situation sociale des femmes dans son environnement, où il fut témoin de grandes injustices envers elles. Ceci le mit tôt en alerte des réalités que vivaient ces femmes, alors en marge de la vie publique et peu représentées politiquement.

En effet, Gharid Al-Sheikh nota que ce grand auteur égyptien évoluait «dans un environnement où les droits des femmes étaient bafoués». Même si «l’esclavage était bel et bien aboli et l’émancipation fut reconnue», «les stigmates de ce passé pesaient encore sur la société».

Un manifeste féministe arabe

Loin de faire barrage à son développement intellectuel, l’hostilité de cet environnement était un catalyseur pour Qasim Amin, qui «était doté d’une intelligence extraordinaire» comme le rappela Sulaiman ibn Saleh al-Kharashi. «Il avait décroché son diplôme en droit français au Caire à l’âge de 20 ans alors qu’à son époque, beaucoup ne réussissaient pas à obtenir leur certificat de l’enseignement primaire avant leurs 25 ans», écrivit le chercheur dans son livre «Qasim Amin et les partisans de la libération».

Une fois diplômé, Qasim Amin travailla dans l’avocature, avant de voyager en France où il rejoignit l’Université de Montpellier pour parachever ses études. Là-bas, il rencontra les grands écrivains et intellectuels français de son temps, tout en s’imprégnant de leurs écrits. De retour en Egypte, il occupa différents postes dans la justice où il exerça durant 23 ans. Puis en 1899, il publia son ouvrage «La libération de la femme», qui suscita une grande controverse en Egypte et dans le monde arabe.

Dans «Le sacré et la liberté», Gadâan Fahmy souligna d’ailleurs «la centralité de la question de la femme et de sa libération, ainsi que le rôle des idées modernistes de Qasim Amin dans ce débat toujours aussi présent au niveau arabe contemporain». En effet, ce livre constitua un véritable manifeste de la libération des femmes en Egypte et dans les Etats arabes, puisque l’auteur avait appelé depuis l’époque à lever l’obligation du voile pour les femmes dans les espaces publics, tout en plaidant pour la mixité.

«Qasim Amin fournit de considérables efforts pour prouver que le hijab dominant dans les usages religieux n’était pas musulman à l’origine», souligna encore Gharid Al-Sheikh. Pour toutes ces raisons, ces prises de position créent un tollé majeur en suscitant l’une des controverses les plus marquantes de l’Egypte à l’époque.

«Les idées de Qasim Amin eurent un important impact sur le cours de l’histoire et de la condition des femmes égyptiennes. Il lui revint en effet d’avoir créé cette renaissance féministe, avec laquelle l’Egypte se distingua des autres pays de la région», indiqua de son côté Khaki Ahm dans «Qasim Amin, récit de vie».

Quant à ses détracteurs, ils l’accusèrent d’avoir failli à la religion et d’inciter les femmes à la débauche. Mais un autre groupe d’intellectuels épousa ses idéaux et le considéra comme le pionnier du mouvement intellectuel et social pour l’émancipation des femmes.

«L’appel de Qasim Amin raisonna pendant plus de soixante-dix ans, même s’il se confronta aux esprits traditionalistes qui convergèrent leurs efforts pour le contrer. Malgré ces réactions, ses œuvres majeures que furent ‘La libération de la femme’ et ‘La femme nouvelle’ gagna les consciences et les esprits.»

Magazine Daawat Alhaq, n°129 – une publication du ministère des Habous et des affaires islamiques

Un intellectuel défenseur du modernisme

En réponse à ses détracteurs qui l’attaquèrent pour «La libération de la femme», Qasim Amin récidiva en publiant «La femme nouvelle». «Nous n’écrivons pas pour recevoir les applaudissements et les félicitations des ignorants parmi le large public», répondit l’intellectuel, cité dans Daawat Alhaq.

«Nous nous adressons aux savants, aux intellectuels et surtout à cette jeunesse moderne en laquelle nous mettons tous nos espoirs en un avenir meilleur. C’est cette nouvelle génération éduquée par le savoir qui se saisira le mieux de la cause des femmes en y accordant l’intérêt et la recherche nécessaires», ajouta-t-il.

Qasim Amin mourut le 23 avril 1908 alors qu’il n’avait que quarante-cinq ans. Mais son apport intellectuel influença l’Egypte et le monde arabe, inspirant ainsi nombre d’écrivains et d’artistes qui se revendiquèrent du courant féministe.

«Le sujet le passionnait tel un résistant enthousiasmé sur les questions relatives à son pays, et non l’acteur politique critique qui ne s’attelait qu’à mettre en avant ce qui n’allait pas, décrivit Gharid Al-Sheikh. Il mit le doigt sur ce qui se passait véritablement lorsqu’on négligeait le secteur de l’éducation, en soulignant que celle-ci était la clé d’une réforme sociétale profonde».


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