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Lettres à moi-même d’Edmond Amran El Maleh

Comme indiqué sur la première de couverture, Lettres à moi-même est un récit épistolaire. Nous pouvons relever deux raisons ayant poussé Edmond Amran El Maleh à écrire ce récit. Contrairement à d’autres qui n’ont pas choisi de devenir écrivains mais qui se sont retrouvés à écrire à leur insu, El Maleh écrit par nécessité.

Première raison : la volonté de se dédoubler, ressentie par l’auteur : «Qui de nous, écrit-il, n’a pas éprouvé une fois dans sa vie le sentiment d’être double, voire même étranger sinon étrange à soi-même, le signe même de la complexité de la condition humaine» (Avant-Propos). Le lecteur est ainsi averti dès le début, invité à mener une réflexion d’ordre ontologique, voire métaphysique sur l’être et l’existence.

Lettres à moi-même est le fruit de l’émotion. En effet, il n’y a pas un seul récit d’El Maleh qui ne déborde d’émotion, une émotion créative, ce feu indispensable rendant possible toute écriture. En somme, tout découle du corps physique, tous les sens participant de l’écriture.

Deuxième raison : la rénovation de l’écriture : «Il reste que j’ai pris plaisir à écrire ce texte, innovant en quelque manière une nouvelle forme d’écriture en ce qui me concerne» (Avant-Propos). C’est dire qu’à l’émotion s’ajoute le plaisir. En cela, l’écrivain a besoin de la joie pour innover dans l’art d’écrire.

En plus des réflexions philosophiques et existentielles auxquelles l’auteur nous invite, Lettres à moi-même se présente surtout comme une réflexion sur le travail de l’écrivain.

En outre, notons que cette correspondance se présente comme un jeu amical entre deux hommes, semblables dans leurs différences. C’est du moins ce que nous pouvons déduire du dédoublement de l’auteur ; être double, c’est être le même et l’autre du même en même temps. Les intitulés des chapitres en témoignent : «Cher ami», «Cher autre», «Ami», «Ami ou délicieux ennemi», «Ami, ô combien cher !», «Cher et incorrigible ami», «Cher censeur».

L’ami, l’ennemi, sont en nous. L’autre est en nous. Comprendre soi-même passe par l’autre. Le Moi n’est saisissable que par Soi, l’autre facette du Moi. Le Moi est le Même et l’Autre. L’Identité n’est compréhensible que par l’Altérité, l’Altérité par l’Identité.

Lettres à moi-même n’est pas aussi épistolaire qu’il en a l’air, c’est une oeuvre qui met en branle la conception de l’Etre, de l’Identité et de l’Altérité. Cette correspondance, simple en apparence, est l’aboutissement de toute une pensée qui se fonde sur un amas d’éléments auxquels l’auteur cherche à donner du sens.

Najib Allioui 

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