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Après les bulldozers, quelles options de réhabilitation ? [INTÉGRAL]

Après les villages de pêcheurs du littoral de Chtouka-Ait Baha, les opérations de libération du domaine public maritime se sont étendues à d’autres régions du pays, confirmant ainsi l’ampleur inédite de ce qui se profile comme une vaste campagne d’assainissement foncier. « On croyait au début que cette opération concernait les villages de pêcheurs situés dans le périmètre du Parc National du Souss-Massa puisque ce territoire est une zone naturelle protégée », confie une ancienne habitante du défunt village de Tifnit. Les opérations qui se sont étendues à d’autres zones, au Nord d’Agadir, ont cependant démontré que la volonté de libérer le domaine public maritime va bien au-delà de quelques zones naturelles ou protégées. Ainsi, les pelleteuses et autres engins de démolition n’ont pas tardé à sévir à Imessouane, Dar Bouazza ou encore à Bouznika. Durant ce mois de février, la campagne s’est également exportée à la façade Nord du Royaume, avec des démolitions achevées et d’autres programmées au niveau des plages de Martil, Tanger et Nador.
 

Aménagement durable

Les propriétaires des constructions démolies n’ont pas manqué de manifester leur colère et consternation avec plus ou moins de vigueur. Si certaines plages « assainies » souffraient visiblement d’une urbanisation anarchique, d’autres anciens villages comme Tifnit et Imessouane avaient cependant un certain « cachet authentique » qui, pour certains, aurait dû être conservé. « Dans son avis adopté le 26 mai 2022 et intitulé « Quelle dynamique urbaine pour un aménagement durable du littoral ? », le Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE) n’évoque à aucun moment la nécessité de procéder à une libération sélective du domaine public maritime. Seule est soulignée l’urgence d’assainir la situation des constructions situées dans le domaine public maritime ou dans la bande des 100 m interdite à la construction, argumente une source proche du dossier, qui tient par ailleurs à souligner que « les démolitions se font en application de la loi et dans l’intérêt public avant toute autre considération ».
 

Modèle méditerranéen

Pourtant, certains modèles européens de politiques d’aménagement du littoral proposent d’autres alternatives à l’approche qui consiste à raser toutes les constructions bâties sur le domaine maritime sans distinction. En témoignent les partis pris historiques de plusieurs pays méditerranéens comme le Portugal, la France et la Grèce, qui ont capitalisé sur des hameaux et villages de pêcheurs pour développer des destinations touristiques « authentiques » (voir article ci-contre). « Ce qui est fait est fait. Les villages côtiers marocains que nous aimions tant ne sont plus, et c’est une perte qui n’aura d’égal que de voir ces espaces bétonnés et aménagés sans respect de l’identité des lieux pour au final bénéficier à quelques happy few qui ont les moyens de profiter d’offres touristiques inaccessibles aux classes moyennes ou défavorisées », déplore l’ancienne résidente de Tifnit. La question qui se profile alors que les pelleteuses continuent de sévir concerne justement la vision des choix et orientations d’aménagement qui devraient se déployer au niveau des plages dont le foncier est désormais « libéré ».
 

Développement et valorisation

En l’absence d’annonces officielles des autorités concernées, l’avis du CESE concernant l’enjeu d’aménagement durable du littoral se présente comme une référence à prendre en considération pour l’avenir des villages côtiers du pays. Ainsi, le Conseil « plaide pour un aménagement durable du littoral dans le sens d’une urbanisation maîtrisée assurant un équilibre entre le développement, la préservation et la valorisation de cet écosystème. La concrétisation d’une telle vision permettra d’atténuer significativement les pressions croissantes sur cet écosystème vulnérable, de renforcer la résilience de ce milieu et de promouvoir l’effectivité des droits environnementaux ». A noter que durant l’élaboration de son rapport, 81% des participants ayant répondu au sondage lancé par le CESE sur l’urbanisation durable du littoral, ont soutenu la nécessité d’une réforme des politiques d’urbanisme et ont considéré la mesure comme « très importante ».

 

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