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Décès du seul général qui a défié l’ordre établi des militaires

Issue d’une grande famille révolutionnaire qui avait fui la colonisation en allant s’installer en Tunisie, Hocine Benhadid natif de Beja, dans l’ouest tunisien, s’est engagé très jeune dans les rangs de l’armée algérienne. Il avait à peine 16 ans.

A l’indépendance, il gravit les échelons et les grades jusqu’à commander l’une des unités les plus importantes de l’armée algérienne (1976 à 1980). La 8ème division blindée. Une division qui a été commandée avant lui par Abdelmalek Guenaïzia (devenu Secrétaire d’Etat à la défense nationale), Lakehal Ayat (devenu le patron des services secrets de 1981 à 1988), Liamine Zeroual devenu président de la République en 1996. C’est aussi, la division qui avait participé à la guerre de kippour 1973.

Hocine Benhadid, termine sa carrière comme conseiller à la présidence de la République sous Liamine Zeroual après avoir dirigé, dans les années 90’, la 3ème région militaire dont le siège est à Bechar dans le sud-Ouest algérien.

A la retraite, le général Hocine Benhadid se distingua par une irréprochable probité morale. Il est l’un des rares généraux à n’avoir pas versé dans l’affairisme. Il vivait de sa seule pension de retraité de l’armée.

Après une longue période de silence et d’observation, sa première sortie médiatique, en septembre 2015, sur les ondes de Radio M, dont le directeur Kadi Ihsane est actuellement en prison, fit trembler les Tagarins et El-Mouradia. Il accusait le général de corps d’armée Gaïd Salah, vice-ministre de la défense nationale et chef d’Etat-major de l’armée, d’être mêlé à un scandale de mœurs datant de l’époque où il commandait l’École de formation des officiers de réserve de Blida. Dans la foulée, il s’en prenait à Saïd Bouteflika, frère du président, aujourd’hui en détention, qu’il qualifiait de détraqué mental tout en dénonçant sa gestion des affaires du pays en se substituant à son frère malade.
 
Il est convoqué dans un premier temps dans les locaux de la Direction Générale de la Sécurité Intérieure où il a été longuement entendu avant de se voir libéré.Quelques jours plus tard, il est arrêté de manière hollywoodienne sur les hauteurs d’Alger et placé en détention préventive. Il est accusé d’atteinte au moral de l’armée.
 
Il est relâché le 11 juillet 2016 avant de se voir condamné le 22 mars 2018 à un an de prison avec sursis.
 
Une année plus tard, le 25 avril 2019, alors que l’Algérie sombrait dans une grave crise provoquée par le hold-up que venait de commettre le patron de l’armée algérienne, feu Gaïd Salah, en s’accaparant la révolte populaire qui avait fait chuter le régime de Bouteflika, le général Hocine Benhadid rompt le silence une deuxième fois. Dans une lettre ouverte publiée dans les colonnes du plus grand quotidien algérien francophone, El-Watan, il demande au chef d’état-major de l’armée de « faire en sorte que la démocratie ne soit plus un vain mot ».
 
Le 12 mai, sur ordre de Gaïd Salah, il est arrêté et placé en détention à la prison civile d’El-Harrach. Cette fois, il ira , pour son franc parler, une lourde ardoise. Il payera, notamment, pour les graves accusations portées contre le puissant chef de l’armée dans une déclaration faite le 8 mars dans les colonnes du même journal. « Gaïd Salah reçoit même des ordres des Émirats. […] Imaginez-vous un chef d’état-major de l’armée qui parle de paix et de stabilité alors qu’il reçoit des ordres de l’étranger ? Il n’est qu’un pion. » clamait-il tout haut. Du jamais vu de la part d’un opposant politique ou d’un militaire.
 
Hocine Benhadid passera plus de six mois derrière les barreaux et risquait une lourde peine de prison. Il ne dut son salut qu’au départ précipité de son ennemi juré, Gaïd Salah terrassé par une crise cardiaque aux premières heures de la matinée du 23 décembre 2019 à l’hôpital militaire Aïn-Naadja d’Alger. Une semaine plus tard, il est libéré sur ordre venu d’en haut. Il était proche du nouvel homme fort du pays le général Saïd Chengriha. Le 5 juillet, les deux hommes s’affichent côte à côte dans les salons du luxueux club de l’armée de Beni-Messous sur les hauteurs d’Alger. C’était le signe de la réhabilitation de ce général rebelle. Une réhabilitation qui l’a fait taire sur les dérives autoritaires du nouveau régime mené de main de fer par son ami Chengriha. L’homme était très malade. Il souffrait de plusieurs maladies chroniques qui ont fini par avoir raison de lui en ce 1er octobre 2023.

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