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La sculpture «controversée» du prophète Mohammed à la Cour suprême des États-Unis

Les représentations visuelles du prophète Mohammed étaient rares en raison de la croyance commune qui rejetait cette pratique. Mais ce désaccord n’a pas empêché les sculpteurs occidentaux de produire des représentations du prophète de l’islam. Alors que certaines de ces représentations ont été jugées négatives, d’autres sont considérées comme positives ou neutres.

C’est le cas notamment de celle gravée dans le marbre du bâtiment de la Cour suprême des États-Unis. Aussi surprenant que cela puisse paraître, la frise du bâtiment datant des années 1930 représente le prophète Mohammed parmi les 18 plus grands législateurs de l’histoire de l’humanité.

La pièce d’art qui orne la façade de la Cour suprême américaine représente le prophète aux côtés de plusieurs personnalités historiques, dont le sixième roi de la première dynastie babylonienne Hammourabi, connu pour son «Code», le philosophe chinois Confucius et le prophète Moïse (Mûsâ).

Une sculpture pour honorer les législateurs

La frise montre le prophète tenant le Coran dans une main et une épée dans l’autre, et se tenant entre l’empereur byzantin Justinien et l’empereur romain Charlemagne. Depuis son installation en 1935, elle se tient là, en l’honneur de ces législateurs.

En effet, cette frise de la Cour suprême des États-Unis a pour principale intention de rendre hommage aux personnalités qui ont contribué à l’instauration de lois tout au long de l’histoire de l’humanité, et le prophète Mohammed en fait partie. Dans une fiche d’information sur les frises du bâtiment, la Cour suprême a rappelé que «Cass Gilbert, architecte de l’édifice de la Cour suprême, a choisi Adolph A. Weinman, sculpteur respecté et accompli des Beaux-Arts, pour concevoir les frises de marbre de la salle d’audience».

Une sculpture ornant le bâtiment de la Cour suprême des Etats-Unis. / Ph. DR

«Weinman a conçu une procession de « grands législateurs de l’histoire » pour les murs nord et sud afin de représenter l’évolution du droit», a expliqué la Cour. Selon le même document, l’œuvre d’art conçue par Weinman dépeint notamment le Prophète Mohammed tenant le Coran qui «fournit la source première du droit islamique». Et de souligner que «les enseignements du prophète expliquent et mettent en œuvre ces principes coraniques».

Pour préciser ses intentions, la cour note dans le même document que «la figure est une tentative bien intentionnée du sculpteur Adolph Weinman d’honorer Mohammed» et que la sculpture «n’a aucune ressemblance avec [le prophète]». La cour a dit aussi comprendre que «les musulmans refusent toute représentation sculptée ou imagée de leur prophète». Les mêmes intentions ont ensuite été soulignées en 1989 par l’ancien juge adjoint de la Cour suprême des États-Unis, John Paul Stevens. Ce dernier a déclaré que «l’inclusion de législateurs appartenant à un vaste éventail de traditions religieuses, laïques et culturelles symbolisait un respect de la justice qui transcende un credo particulier».

«L’ajout de sculptures représentant Confucius et Mohammed peut honorer la religion (…) dans une mesure que le Premier Amendement ne tolère pas. Le placement de personnalités laïques, telles que César Auguste, William Blackstone, Napoléon Bonaparte et John Mar-hall, aux côtés des chefs religieux, marque toutefois le respect, non pas pour les grands prosélytistes, mais pour ces grands législateurs.»

John Paul Stevens

Des musulmans offensés par la frise de la Cour suprême

Malgré les déclarations de «bonnes intentions» de la Cour suprême, la frise a suscité la controverse au sein de la communauté musulmane aux États-Unis, notamment dans les années 1990. En 1997, le Conseil des relations américano-islamiques (CAIR) et des membres de la communauté musulmane ont exprimé leur déception face à la silhouette en marbre représentant le prophète.

Se disant offensés par la sculpture, le groupe a appelé au sablage de cette œuvre d’art. «Nous croyons que la cour avait de bonnes intentions en honorant le prophète. Nous apprécions cela, nous voulons être flexibles et nous sommes prêts à payer les changements nous-mêmes», a ajouté CAIR.

Les musulmans iront jusqu’à demander de «cacher» les traits du visage du prophète ou même le «remplacer par un morceau de marbre avec peut-être un verset du Coran ou un dicton relatif à la justice et au droit».

Malheureusement pour le CAIR, sa demande a été rejetée par la cour, qui a estimé que «modifier la frise nuirait à son intégrité artistique». «La description de Mohammed visait uniquement à le reconnaître, parmi beaucoup d’autres législateurs, comme une figure importante de l’histoire du droit ; il ne s’agit pas d’une forme de culte d’idole», a écrit le magistrat en chef des États-Unis dans une lettre.

Refusant de modifier le tableau, la cour a toutefois accepté de modifier la documentation de la cour suggérant que Mohammed est le «fondateur de l’islam» pour préciser qu’il est son prophète.


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