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Le Sahara au coeur des relations tumultueuses entre le Maroc et la Syrie

La présence du président Bachar al-Assad au Sommet de la Ligue arabe est un marqueur important dans la position des pays membres, dont la plupart ont boycotté la Syrie, depuis le début des manifestations dans le pays en 2011. Cette année-là, l’instance panarabe a suspendu l’adhésion de Damas, tandis que la majorité des pays ont convoqué leurs ambassadeurs, en réponse à la répression des protestations, dans le contexte du Printemps arabe.

Mais ce retour au sein de l’organisation panarabe est une étape symbolique, traduisant un changement de position de membres influents, à commencer par l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et l’Egypte, à l’égard du régime de Bachar al-Assad. Le président syrien voit dans ce retour une reconnaissance de sa légitimité.

Les Emirats arabes unis, l’Arabie saoudite, Bahreïn et la Jordanie ont d’ailleurs annoncé la réouverture de leurs ambassades en Syrie. Du côté du Maroc, la situation est plus complexe. En 2011, le Maroc a décidé de rappeler son ambassadeur en Syrie, après que la représentation diplomatique du royaume a été attaquée par un groupe de manifestants pro-régime. Depuis 2012, Rabat a officiellement rompu ses relations diplomatiques avec Damas, après avoir expulsé l’ambassadeur syrien de l’époque, considéré alors comme «indésirable».

Les conditions du Maroc

Les efforts de certains pays membres pour réintégrer la Syrie à la Ligue arabe ont été rejetés par le Maroc, ainsi que par le Qatar, le Koweït et le Yémen. Il y a quelques semaines, le Wall Street Journal a rapporté le Maroc aurait exigé que Damas reconnaisse la marocanité du Sahara et mette fin à son soutien au Front Polisario.

Damas reconnaît la «République arabe sahraouie démocratique (RASD)» depuis avril 1980, mais sans établir de relations diplomatiques. Mais dès le début des années 1970 déjà, la Syrie a reçu un nombre important de séparatistes dans ses camps d’entraînement de Zabadani.

Depuis l’indépendance du Maroc et de la Syrie, les relations entre les deux pays ont connu des hauts et des bas. En 1965, ils ont rompu leurs relations à la suite de l’enlèvement et de l’assassinat de Mehdi Ben Baraka, qui a entretenu des liens étroits avec les dirigeants syriens de l’époque. Les relations ont été rétablies en 1971, après que le président Hafez al-Assad a pris les rênes du pouvoir. Cette période a connu une amélioration significative des liens avec Rabat, en particulier après la participation des forces marocaines à la Guerre d’octobre (1973) contre Israël.

Cependant, les relations entre les deux pays ont commencé à se détériorer par la suite, en raison des relations du roi Hassan II avec les dirigeants israéliens et de son rôle dans leur rapprochement avec l’Egypte. Après quoi, les deux capitales ont repris leurs relations en 1989 jusqu’en 2011.

Bachar al-Assad «n’était pas au courant»

En avril 2001, les relations entre les deux pays ont connu un souffle nouveau, après que le nouveau président syrien Bachar al-Assad s’est rendu au Maroc, pour rencontrer le roi Mohammed VI. Les deux parties ont convenu notamment de créer un comité conjoint. En octobre 2001, le Premier ministre marocain de l’époque, Abderrahmane Youssoufi, s’est rendu à Damas où 19 accords et protocoles de coopération conjointe ont été signés.

Des médias ont rapporté qu’al-Assad avait appris, après sa rencontre avec Youssoufi, l’existence d’un bureau spécial du Polisario à Damas. «Le président syrien s’est immédiatement informé de la situation dont il n’avait pas été mis au courant», ont alors écrit des sources médiatiques. La lune de miel s’est poursuivie entre les deux pays et en juillet 2002, le ministre syrien des Affaires étrangères, Farouk al-Shara, s’est rendu au Maroc en portant un message du président al-Assad au roi Mohammed VI. Il s’est aussi entretenu avec son homologue marocain, Mohammed Benaissa, au sujet de «la coordination entre l’Orient arabe et le Maghreb».

Le Polisario profite de la situation

Le Front Polisario a tenté d’exploiter le fossé diplomatique qui s’est creusé entre Rabat et Damas à partir de 2011, afin d’activer la décision de la Syrie de reconnaître sa «république» et d’échanger des missions diplomatiques, en s’appuyant sur le rapprochement algéro-syrien, l’Algérie étant parmi les rares pays à entretenir des relations chaleureuses avec la Syrie.

Le Front Polisario a eu à cœur de féliciter Bachar al-Assad à l’occasion des fêtes nationales de son pays. Il a poursuivi cette démarche, même s’il n’a pas été traité réciproquement par le régime syrien, puisque Bachar al-Assad n’a jamais échangé de correspondances avec le chef du Polisario. En avril dernier, Brahim Ghali a adressé ses félicitations à Bachar al-Assad, à l’occasion de la fête nationale de son pays. Il a loué «la victoire de la Syrie sur les forces du mal et de la conspiration brutale», ce qui «est une source de fierté et de victoire pour tous croyants en l’inévitabilité de vaincre l’injustice et ses alliés».

L’agence de presse syrienne n’a pas mentionné les félicitations, bien qu’elle ait évoqué les autres félicitations qu’al-Assad a reçues. Auparavant, en juillet 2021, un représentant du Polisario a participé à la huitième conférence du «Parti du mouvement socialiste arabe», tenue dans la capitale Damas.

Un isolement arabe

Le Front Polisario n’a pas pu sortir de son isolement dans le monde arabe depuis sa création, n’étant reconnu que par l’Algérie, la Mauritanie et la Syrie, parmi 22 Etats arabes. En février 2022, Brahim Ghali a reconnu la difficulté de s’implanter dans le monde arabe. «Le conflit entre frères ne se résout pas en ignorant ou en prenant parti pour l’un aux dépens de l’autres», a-t-il déclaré, en allusion au soutien arabe au Maroc.

Ce soutien se reflète dans les décisions de la Ligue arabe, qui n’abordent pas la question du Sahara dans ses réunions, en phase avec la position marocaine, qui insiste sur l’exclusivité des Nations unies dans la gestion du dossier.

En outre, la Ligue des Etats arabes a précédemment envoyé une lettre à ses membres afin d’adopter la carte complète du Maroc, lors de ses réunions et aussi sur son site officiel.


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