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Entretien avec la footballeuse professionnelle Alayah Pilgrim «C’est un privilège d’être courtisée par le Maroc» – Aujourd’hui le Maroc

Alayah Pilgrim est une jeune footballeuse maroco-helvétique. Elle évolue au FC Zurich. Tiraillée entre l’amour de son pays natal et celui de son pays d’origine, elle nous explique que sa décision finale ne tardera pas à avoir lieu.

ALM : Pourriez-vous vous présenter brièvement et nous en dire plus sur votre parcours footballistique ?
Alayah Pilgrim : Je m’appelle Alayah Pilgrim. J’ai 20 ans et j’habite à Muri, un village en Suisse, où j’ai également grandi. Ma mère est suisse et mon père est marocain. Il vient d’Adouar, un petit village traditionnel situé entre Taroudant et Ouled Berhil, dans le sud du Maroc.
Je joue au football depuis l’âge de huit ans. J’ai fait mes premiers pas au FC Muri. Tout a commencé lors d’un tournoi scolaire, où j’ai été découverte par un entraîneur et j’ai également découvert ma passion pour le football.
Jusqu’à l’âge de 14 ans, j’ai gravi tous les échelons en tant qu’unique fille chez les garçons du FC Muri. Ce n’est qu’à 15 ans que les différences physiques normales avec les garçons se sont fait sentir, une force, des muscles et un physique différents. J’ai intégré une équipe féminine au FC Aarau pendant 2 ans, puis, à 17 ans, j’ai décroché mon premier contrat professionnel de 2 ans au FC Bâle 1893. L’été dernier, j’ai rejoint le FC Zurich, 24 fois champion de Suisse et 15 fois vainqueur de la Coupe. La saison dernière, j’ai pu y acquérir ma première expérience internationale en UEFA Womens Champions League (UWCL), où nous avons joué contre Arsenal, Lyon et la Juventus.

Bien qu’encore toute jeune, l’ensemble de votre carrière sportive s’est fait en Suisse. Êtes-vous tentée par une expérience professionnelle dans d’autres clubs étrangers ?
Oui, bien sûr, mon objectif est clairement de poursuivre un jour ma carrière à l’étranger. Cela me tente beaucoup. J’avais déjà eu l’occasion de faire le pas vers l’étranger en 2022, mais je ne me sentais pas encore prête personnellement et j’ai décidé de jouer pour le FCZ. Lors de différents entretiens, j’ai ressenti une grande confiance de la part du club et en particulier de l’entraîneur de l’époque, aujourd’hui entraîneur de l’équipe nationale suisse, Inka Grings. Ensemble, nous avons formulé des objectifs à court et à long termes pour que j’atteigne un niveau maximal.

Le football féminin au Maroc connait un essor considérable ces dernières années que cela soit au niveau local ou continental. Comment jugez-vous cette ascension ?
C’est fantastique de voir comment la Fédération royale marocaine de football investit dans la Ligue féminine et encourage le football féminin marocain. C’est un exemple à suivre. Le fait que le Maroc ait accueilli la Coupe d’Afrique des Nations féminine l’année dernière et qu’il ait même atteint la finale était incroyable.
J’ai bien sûr assisté à quelques matchs et j’ai croisé les doigts pour le Maroc. Le niveau est aujourd’hui très différent de celui d’il y a quelques années. J’ai été très étonnée de voir des stades pleins et c’est un rêve de pouvoir jouer devant un stade avec plus de 50.000 spectateurs. C’est formidable que la CAN 2022 ait eu lieu au Maroc et que le Royaume soit à nouveau l’hôte de la prochaine édition en 2024.
Pour être honnête, je ne connais pas du tout la Ligue féminine marocaine au niveau des clubs. Toutes les joueuses que je connais jouent à l’étranger. Il est donc certainement important d’encourager les filles dès leur plus jeune âge et de leur offrir des possibilités de faire leurs premiers pas dans leur propre pays.

Vous êtes Suissesse d’origine marocaine. Entre le pays d’adoption et le pays d’origine votre cœur balance certainement. Pour qui comptez-vous défendre les couleurs nationales ? Rappelons par cette même occasion qu’une convocation officielle vous a déjà été adressée pour un rassemblement au Centre Mohammed VI de football à laquelle vous n’avez pas répondu.
C’est un privilège d’être courtisée et de recevoir des demandes des deux nations. Cela m’honore, surtout de la part du Maroc, car je suis née en Suisse et j’y ai toujours vécu. Je ne connais le beau pays du Maroc et sa culture que par de beaux séjours de vacances pour des visites familiales. Je suis honorée que, lors de mon séjour de la semaine dernière à Marrakech, Taroudant et Taghazout, des enfants m’aient demandé des autographes, voulu prendre des photos avec moi, m’aient suivie sur Instagram et que ma famille marocaine soit si fière de moi.
Comme j’ai grandi et été formée en Suisse, je me sentais jusqu’à présent encore plus proche de la Suisse, mais cela ne veut nullement dire que le Maroc ne compte pas pour moi. J’observerai certainement les deux pays de très près pendant la Coupe du monde et j’en tirerai les conclusions pour moi personnellement et j’y réfléchirai à nouveau.
Enfin, je me déciderai pour la nation où mon développement et mon avenir seront le mieux soutenus. L’année dernière, la première convocation du Maroc est arrivée à la dernière minute et de manière inattendue, et je n’ai pas pu prendre le temps de réfléchir à l’offre. Je ne me sentais pas non plus à l’aise, car je ne parle malheureusement ni l’arabe ni le français, mais l’allemand et l’anglais. C’était aussi lié à un manque d’assurance et de respect.

Quelles sont vos ambitions sportives et vos futurs projets ?
La saison prochaine, je jouerai certainement encore au FCZ, où je souhaite m’établir définitivement comme joueuse régulière. Ensuite, j’aimerais faire le pas vers l’étranger.
Être titulaire et jouer à l’étranger dans une ligue et un club de haut niveau est très important pour moi, quelle que soit l’équipe nationale que je choisirai finalement. J’ai besoin et je veux du temps de jeu.
Un autre objectif est de pouvoir vivre à 100% du football. Même dans la Ligue suisse, cela n’est possible que pour une poignée de joueuses et bien sûr pour les joueuses engagées à l’étranger ou les Suissesses engagées à l’étranger. En Suisse, on ne peut vivre que très modestement du football. La plupart des joueuses sont semi-professionnelles, travaillent du matin au soir et ne s’entraînent que le soir.
J’ai eu la grande chance de pouvoir me concentrer entièrement sur le football. J’ai cependant suivi une formation et obtenu un diplôme d’assistante en soins et santé communautaire (infirmière), mais je ne travaille plus dans ce domaine.
Cependant, j’ai développé un deuxième pilier dans le domaine des médias sociaux. J’ai beaucoup de plaisir à être active sur ces médias et à interagir avec ma communauté et j’aimerais certainement continuer à développer ce business, car c’est une source de revenus importante, amusante et qui me correspond.
Je me considère clairement comme une footballeuse, mais pour moi, les médias sociaux en font tout simplement partie et, à mon avis, ils contribuent beaucoup à l’acceptation du football féminin et éveillent l’intérêt de nombreux jeunes.

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