Entre 300 et 800 DH par heure, c’est trop pour les parents !
«Les cours de soutien scolaire sont un investissement qui pèse lourd dans les budgets des familles», note le président de la Fédération nationale des associations des parents d’élèves du Maroc, Noureddine Akkouri. L’enquête menée par «Lkessa ou mafiha» auprès des organismes de soutien scolaire privés, des élèves et des parents nous a permis de comprendre qu’il existe deux types de cours de soutien privés : les cours dispensés en groupes avec des tarifs variant entre 300 et 1.500 DH par mois. Ce tarif comprend entre deux et trois séances. Les cours en tête à tête ou en petits groupes sont plus chers puisqu’ils sont plus personnalisés. Les parents sont obligés de payer entre 300 et 800 DH par séance. Choquant ! D’après les spécialistes que nous avons rencontrés, les prix ont augmenté cette année et ceci s’explique par la loi de l’offre et de la demande. Il faut aussi souligner que dans ce marché, chacun fixe ses propres tarifs, mais en général, il existe trois facteurs clés qui sont pris en compte par celui qui donne les cours : d’abord, la matière enseignée, car des matières comme les mathématiques ou la physique-chimie demandent plus d’efforts en termes d’explication et, par conséquent, restent plus chers. Ensuite, le niveau scolaire de l’élève. À titre d’exemple, un élève en deuxième année du baccalauréat va payer plus qu’un élève en première année du collège. Et enfin, la zone géographique, les prix dans les quartiers populaires sont relativement moins chers que ceux dispensés dans les quartiers des «bourgeois». Pour cette enquête, nous nous sommes focalisés sur la situation pour la classe moyenne qui représente la plus grande tranche de la société. Certes, les prix dévoilés peuvent ne pas être les mêmes, mais c’est la moyenne au niveau de Casablanca où nous avons mené l’enquête. Certains estiment que c’est de l’arnaque ! C’est le cas de Mohamed Chahine, professeur, chercheur en éducation et acteur syndical. Ce dernier regrette, en effet, une telle pratique qui ne prend pas en considération les contraintes des parents. Il tient, toutefois, à attirer l’attention sur le fait que ce phénomène ne date pas d’hier et qu’il reflète beaucoup de réalités et à leur tête le rapport de défiance qui a été développé par les parents avec l’école. «Les parents sont soucieux de l’avenir de leurs enfants, mais ils ne font plus confiance dans l’école publique, raison pour laquelle ils se dirigent, coûte que coûte, vers le soutien en privé», précise-t-il. Sur ce volet, Noureddine Akkouri précise que les élèves ne peuvent plus s’empêcher des cours payants. «Le ministère de l’Éducation nationale a renforcé le soutien scolaire, mais les élèves n’y adhèrent pas. Ils recourent au privé en poussant leurs parents à payer des sommes importantes même s’ils n’ont pas les moyens», précise-t-il. Et d’ajouter que les cours de soutien payants sont devenus comme un cancer dans le sang de l’élève. De son côté, Mustapha El Bouzidi, enseignant et père d’un enfant, estime que les cours de soutien doivent être un renfort et non pas un enseignement de base. «On remarque de plus en plus que les parents délèguent l’accompagnement de leurs enfants dès le petit âge aux organismes de cours de soutien, ce qui est alarmant», note-t-il. Et de noter que le recours à ce type de prestation ne doit avoir lieu que si l’enfant en a réellement besoin. Ceci suppose, insiste-t-il, que d’une part, les parents jouent leur rôle dans l’écoute et l’accompagnement de l’enfant et d’autre part, que ce dernier prenne le temps de faire l’effort lui-même avant de demander de renfort. Mustapha El Bouzidi alerte aussi sur la pression que subissent les enfants. «Passer 8 heures de cours par jour à l’école puis deux heurs le soir, c’est épuisant pour l’enfant», avertit notre interlocuteur.
Cours de soutien payants : plus d’inconvénients que d’avantages ?
Les experts que nous avons interrogés sont convaincus que les cours privés, tels qu’ils se présentent aujourd’hui, ont plus d’inconvénients que d’avantages notamment par rapport au prix, aux conditions et au niveau des encadrants. «Dans certains cas, les cours sont dispensés dans des milieux non éducatifs comme les cafés et les garages ou encore les toits des maisons ne prenant pas en considération les besoins de l’élève d’apprendre dans un environnement sain», note M. Chahine. De même, ajoute-t-il, la méthode adoptée laisse à désirer puisque dans la majorité des cas, les personnes qui donnent les cours de soutien ne sont pas des spécialistes de l’enseignement et non forcément les compétences pour accompagner les élèves. M. Akkouri confirme ce constat. «La méthode appliquée dans ces certains centres consiste à pousser l’élève à répéter les exercices plusieurs fois au point de les apprendre par cœur», détaille-t-il tout en précisant que cette méthode ne permet pas à l’élève de développer ses compétences d’analyse. Interrogés sur les solutions, nos interlocuteurs appellent à la réglementation et au contrôle permanent de manière à garantir le droit aux élèves à avoir un vrai soutien scolaire de qualité pour une montée en compétences sans ruiner les parents.