Santé

Conflit sous-acromial : symptômes, causes et solutions

Le conflit sous-acromial est l’une des principales causes de douleur à l’épaule. Méconnu et souvent négligé, il peut s’accentuer au fil des années et fortement handicaper le quotidien des patient(e)s. Quelles en sont les causes ? Quand consulter et comment prendre en charge la douleur ? On fait le point avec le Dr Philippe Roure, chirurgien orthopédiste, et le Dr Jean Kany, président de la Société Française de l’Épaule et du Coude (SoFEC). 

Définition : c’est quoi le conflit sous-acromial ?

Le conflit sous-acromial est une condition médicale d’origine mécanique, caractérisée par un frottement anormal entre les tendons de la coiffe des rotateurs et l’acromion. « Ce frottement provoque une usure progressive des tendons de la coiffe des rotateurs. À terme, il peut entraîner une inflammation, une tendinopathie de la coiffe des rotateurs ou une rupture éventuelle de ces tendons« , explique le Dr Kany. 

© Docteurphilipperoure.com

La douleur à l’épaule, principal symptôme d’alerte

Le conflit sous-acromial se traduit par des douleurs plus ou moins intenses qui surviennent dès que l’on élève son bras au-dessus de l’horizontal. « Au départ, elles apparaissent uniquement au cours de la journée, suite à des mouvements répétitifs. Puis au fil des années, si le conflit sous-acromial n’est pas pris en charge et que l’inflammation s’installe, elles peuvent s’accentuer la nuit aussi », précise le président de la Société Française de l’Épaule et du Coude. 

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le conflit sous-acromial n’impacte pas la mobilité de l’épaule ! « Si l’épaule devient raide et douloureuse, il s’agit plutôt d’une capsulite de l’épaule ou d’un syndrome de l’épaule gelée », note le Dr Kany. Et d’expliquer : « La douleur entraîne généralement une méfiance… On s’interdit de bouger l’épaule pour éviter d’avoir mal, mais en réalité, il est tout à fait possible de bouger l’épaule normalement ». 

Quel impact sur la vie quotidienne des patient(e)s ?

Vous l’aurez compris, le conflit sous-acromial peut avoir un impact significatif sur la vie personnelle et professionnelle des personnes concernées. La douleur limite généralement les mouvements et de nombreuses activités quotidiennes s’en trouvent perturbées… La douleur peut empêcher une personne :

  • d’attraper un objet en hauteur,
  • de cuisiner,
  • de se laver,
  • de s’habiller,
  • de conduire,
  • de faire du sport
  • de faire ses courses,
  • de jardiner,
  • de dormir
  • etc.

« Le conflit sous-acromial peut entraîner une perte d’indépendance et de qualité de vie non-négligeable, concède le Dr Roure. Sans compter qu’il peut avoir un impact économique dans la mesure où il empêche certaines personnes de continuer à exercer leur activité professionnelle : elles enchaînent les arrêts de travail, sont de moins en moins productives, se voient refuser des évolutions de poste, etc. »

Quelles sont les causes d’un conflit sous-acromial ?

Le conflit sous-acromial est souvent causé par des mouvements répétitifs (au travail, au sport, etc.) qui induisent un déséquilibre musculaire au niveau de l’épaule, mais certaines personnes ont aussi des prédispositions anatomiques… »Je dirais qu’environ 90 % des cas sont liés à de mauvaises habitudes de mouvements et 10 % des cas sont liés au fait que l’espace sous-acromial peut être plus étroit chez certaines personnes, ou que leur acromion peut être plus pointu », note le Dr Kany.

Selon l’expert, un traumatisme est très rarement en cause : « Il peut en revanche révéler une prédisposition anatomique ou un conflit sous-acromial latent, jusque là ignoré », estime-t-il. Et son confrère, le Dr Roure, d’ajouter : « le développement d’un phénomène d’une arthrose avec apparition de bec osseux (ostéophyte) peut aussi être à l’origine d’un conflit sous-acromial ».

Bon à savoir : le conflit sous-acromial peut résulter d’une combinaison de ces causes

Quels sont les facteurs de risque ?

Le conflit sous-acromial peut toucher tout le monde, mais certains facteurs de risque entrent en ligne de compte… 

  • Le risque de développer un conflit sous-acromial augmente avec l’âge (la prévalence est plus élevée à partir de 40 ou 50 ans). 
  • Les personnes qui ont un acromion spécialement pointu ont plus de risque de développer un conflit sous-acromial.
  • Les personnes dont le travail ou les loisirs sollicitent fréquemment l’épaule, comme les athlètes, les travailleurs de la construction, les peintres, ou les artisans, ont plus de risque de développer un conflit sous-acromial.
  • Une mauvaise posture peut entraîner un déséquilibre musculaire à l’origine de tensions excessives sur les tendons et augmenter le risque de conflit sous-acromial.
  • Une faiblesse des muscles de l’épaule et du bras peut favoriser le développement d’un conflit sous-acromial, car les muscles affaiblis peuvent ne pas offrir une stabilisation adéquate de l’articulation de l’épaule.

Quoi qu’il en soit, la présence de facteurs de risques ne condamne pas les personnes concernées à développer un conflit sous-acromial ! 

Comment diagnostiquer un conflit sous-acromial (tests, IRM, échographie) ?

Les patient(e)s franchissent souvent la porte d’un cabinet médical lorsque les douleurs deviennent chroniques. Les médecins commencent par questionner les antécédents médicaux et les symptômes (leur durée, leur récurrence et leur gravité). Soyez aussi précis(e) que possible dans la description de vos douleurs, de leur localisation et des activités qui les aggravent ou les soulagent.

Le diagnostic repose ensuite sur le déclenchement de la douleur lors de certains mouvements ou tests dits de provocation (test de Neer, test de Hawkin, ou test de Jobe). « On réalise plusieurs manipulations de l’épaule pour jauger la douleur des personnes et orienter le diagnostic », explique le Dr Roure, qui précise qu’un examen complet de l’épaule est toujours indispensable pour s’assurer qu’il n’y a pas de raideur ou d’autre dysfonctionnement. 

Quels sont les examens complémentaires nécessaires ?

Des examens complémentaires sont souvent nécessaires pour constater le stade évolutif et contrôler l’état des tendons, indique le chirurgien. « On prescrit une échographie ou, au mieux, une IRM (imagerie par résonance magnétique) », précise-t-il. 

Une fois le diagnostic confirmé, il est temps de discuter des options de traitement… Et plus le diagnostic est précoce, plus les chances de succès des traitements non-chirurgicaux sont importantes, assure le Dr Roure.

Quelles précautions prendre pour prévenir ce frottement ?

« Le conflit sous-acromial n’existerait pas si les mesures de prévention étaient bien passées auprès du grand public, assène le Dr Kany. On sait par exemple qu’il faut faire attention à son dos lorsque l’on porte une charge lourde. Et bien, il faut également faire attention à son épaule lorsqu’on lève le bras. » 

Un travailleur manuel qui passe sa journée à lever le bras au-dessus de sa tête pour frotter une vitre, peindre un mur, couper des haies… Va charger son épaule et détruire petit à petit les tendons de son épaule. Mieux vaut qu’il s’arrange pour monter sur un escabeau par exemple, pour ne pas mettre son épaule en tension. Il peut également faire de la kinésithérapie préventive et équilibrer sa balance musculaire en travaillant les muscles opposés, les abaisseurs de l’épaule. 

 Autrement dit, les douleurs ne sont pas une fatalité, à condition d’agir dès les premiers symptômes et d’apprendre à économiser son épaule ! 

Traitement : comment soulager les douleurs et soigner un conflit sous-acromial ?

Le traitement du conflit sous-acromial dépend de la gravité de la condition et de l’impact sur la qualité de vie des patient(e)s. Les options de traitement peuvent aller de simples mesures de gestion de la douleur à des interventions chirurgicales plus invasives.

Les traitements non-chirurgicaux (repos, kinésithérapie, médicaments, injections de corticostéroïdes, etc.)

Dans les cas bénins, le repos de l’épaule et la modification des activités qui déclenchent ou exacerbent les symptômes peuvent suffire à soulager la douleur. Il est important d’éviter les mouvements répétitifs ou excessifs de l’épaule pendant la phase de récupération, note le Dr Roure.

La kinésithérapie est aussi souvent une composante clé du traitement. Au programme ? Des exercices visant à renforcer les muscles de l’épaule, à améliorer la posture et à restaurer la mobilité. Les étirements et les exercices de renforcement contribuent aussi à stabiliser l’articulation de l’épaule.

Par ailleurs, des médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) peuvent réduire l’inflammation et soulager la douleur. Des antalgiques peuvent également être recommandés pour la soulager temporairement. Enfin, des injections de corticostéroïdes peuvent être utilisées pour réduire l’inflammation et limiter le frottement. 

Chirurgie : quand opérer un conflit sous-acromial ?

La décision d’opter pour la chirurgie dépend de la gravité de la condition et de la réponse au traitement non-chirurgical. Elle est généralement pratiquée dans les cas les plus graves, ou lorsque les traitements non-chirurgicaux ne suffisent plus. Objectif ? Élargir l’espace sous l’acromion en retirant ou en remodelant une partie de l’acromion, ce qui permet de réduire le frottement. « On n’opère pas un(e) patient(e) qui n’a pas pris plusieurs mois de repos et réalisé de très nombreuses séances de kinésithérapie« , insiste toutefois le Dr Kany. 

L’intervention (acromioplastie) dure environ 1 heure et nécessite une anesthésie générale en ambulatoire, parfois régionale, selon les patient(e)s et les propositions de l’anesthésiste. Elle est réalisée sous arthroscopique, une technique qui implique des caméras et instruments miniaturisés. « Si les tendons de l’épaule sont gravement endommagés, on peut également envisager une intervention spécifique pour restaurer leur intégrité« , note le Dr Roure.  

Bon à savoir : l’acromioplastie est une intervention micro-invasive, mais elle peut tout de même se compliquer. Les complications les plus fréquentes sont les suivantes : enraidissement, complications nerveuses, risque d’algoneurodystrophie (syndrome douloureux local complexe). N’hésitez pas à signaler le moindre désagrément à votre chirurgien(ne). 

Quelles sont les suites opératoires d’une acromioplastie (rééducation, arrêt de travail, reconversion, etc.) ?

Après l’intervention, les patient(e)s peut être équipé(e)s d’une écharpe ou d’une attelle pour stabiliser leur épaule pendant au moins deux semaines. La durée de l’immobilisation dépendra des instructions du chirurgien.

Une fois rentré(e) chez vous, les pansements doivent être refaits tous les deux jours, idéalement par une infirmière. L’arrêt de travail peut être plus ou moins long selon les professions : cela peut aller jusqu’à plus de trois ou quatre mois pour une personne qui exerce un travail de force, précise le Dr Roure.

Les séances de kinésithérapeute débutent environ trois semaines après l’intervention. Cette prise en charge dure généralement un à trois mois, à raison de trois séances par semaine, note le chirurgien. Comme indiqué ci-dessus, le travail peut être repris au bout de quelques jours ou de quelques mois. Il est possible de recommencer à conduire au moins huit jours après l’opération et de reprendre le sport au bout de quarante-cinq jours minimum, estime le chirurgien.

Quant aux douleurs… Elles sont généralement atténuées au bout de trois à six mois après l’intervention, une fois que les tendons et l’os ont correctement cicatrisés. Mais dans certains cas, elles ne disparaissent pas totalement, surtout si l’intervention a été tardive, précise le Dr Roure. Et d’alerter : « Le conflit sous-acromial peut être reconnu comme une maladie professionnelle et conduire certaines personnes à quitter leur poste et à se reconvertir totalement ». Au risque de nous répéter, donc : consultez pour prendre toutes les précautions nécessaires ! 

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