Santé

Chirine (42 ans) et Andreas (44 ans) : « Depuis ma chirurgie esthétique, il ne veut plus de moi »

Chirine a 42 ans et Andreas, son compagnon depuis 11 ans, en a 44. Ils ont un enfant de cinq ans et ont récemment déménagé de la grande ville où ils ont débuté leurs carrières d’ architectes d’intérieur pour une maison dans la campagne normande où ils travaillent en partie à distance. Il y a quatre ans, juste après la naissance de leur fille, le couple a connu une période de turbulences. 

Chirine a toujours été complexée par différents aspects de son visage : « Andreas m’a toujours connue complexée. J’ai toujours détesté mon nez, que je trouvais trop présent et avec une forme trop masculine à mon goût. J’ai aussi eu pendant longtemps un grain de beauté particulièrement gros au niveau de la joue. Depuis que je suis adulte, je déteste mes petits seins, qui ont eu une tendance à devenir encore plus petits après la grossesse. Une fois maman, j’ai voulu prendre soin de moi et changer tout ça. Ça a pris une bonne année et j’ai subi plusieurs opérations. On avait les moyens et pour moi c’était vraiment une façon d’être enfin la femme que je voulais être, totalement heureuse dans sa vie et dans son corps. Dans ce sens, ça a été une grande réussite. Pour mon couple, beaucoup moins. »

 Je me sentais plus rassurée d’être accompagnée et de pouvoir partager

Pendant l’année où elle modifie son apparence, elle se fait suivre par une psychologue : « Je me suis dit que j’avais besoin de voir quelqu’un pour parler de tout ce que ça voulait dire pour moi et pour préparer le terrain au cas où ça ne suffise pas. J’ai eu très peur d’être de ces femmes qui ne savent pas s’arrêter. Même si je savais précisément ce que je voulais, je me sentais plus rassurée d’être accompagnée et de pouvoir partager, de façon neutre, ce que je ressentais pendant toutes les étapes. C’est d’ailleurs elle qui a conseillé la thérapie de couple quand ça a commencé à aller mal entre Andreas et moi. »

Ça a été dur de voir que ce qui me rendait heureuse en apparence, le repoussait

Chirine, qui apprend enfin à s’aimer, est étonnée de voir que son conjoint ne partage pas son enthousiasme : « Il a toujours été contre la chirurgie esthétique et il espérait plutôt que j’apprenne à m’aime comme je suis, avec un argument choc : moi, je t’aime comme ça. Il n’a rien fait quand j’ai enfin pris les rendez-vous pour changer. Mais il a clairement dit qu’il n’était pas d’accord et qu’il me soutiendrait au minimum. Après les opérations, il y a eu un certain temps où j’ai eu besoin de me remettre et il s’est occupé de notre fille pendant cette période. Mais après, j’ai réalisé qu’il n’était plus très à l’aise avec moi, il ne me regardait plus dans les yeux, il avait moins envie de moi. Ça a été dur de voir que ce qui me rendait heureuse en apparence, le repoussait. J’en ai parlé quelques semaine à ma psy et elle a conseillé la thérapie de couple parce qu’elle a senti qu’on en avait besoin. Elle avait raison. »

On ne se rend pas compte à quel point la chirurgie esthétique peut changer une personne

Pendant des mois, Andreas ne reconnait pas la femme qu’il aime : « C’était beaucoup d’un coup, je ne reconnais pas son corps quand je la touchais dans le noir, je ne reconnaissais pas son visage quand je lui parlais. On ne se rend pas compte à quel point la chirurgie esthétique peut changer une personne. J’avais l’impression d’habiter avec une inconnue et je ne comprenais pas pourquoi elle avait fait ça. Et j’avais aussi peur que notre fille, qui était bébé à l’époque, ne la reconnaisse pas. Pour moi, elle ne respectait pas l’amour et le désir que j’avais pour elle. J’ai réalisé pendant la thérapie que, dans ma tête, tout tournait autour de moi et que je ne me mettais pas à sa place. »

Pour Andreas, la thérapie de couple était la seule réponse à leur problème de communication : « On tenait chacun sur nos positions. Elle sur le fait qu’elle n’avait pas le choix de le faire pour vivre au mieux avec elle-même, moi sur le fait que ça me dégoûtait et que c’était un manque de respect pour notre histoire et pour moi. On était bloqués sur nos positions. On en a parlé avec nos amis, on comptait les points, comme si le nombre de personnes de son côté ou du mien avait pu changer quelque chose. La thérapie nous a permis de nous poser et d’avoir un espace pour en parler sans que ça parte tout de suite en dispute et en accusation d’égoïsme. Même si, dans les faits, on a été égoïstes l’un et l’autre et on a pas été capable de se mettre à la place de l’autre. Bien sûr que je suis plus heureux si ma femme se sent bien avec elle-même. Bien sûr qu’elle comprend que ça me fasse bizarre de me retrouver avec une femme très différente en quelques mois. Elle a aussi compris que la souffrance qu’elle a ressenti après ses opérations, je n’arrivais pas à la comprendre. Pour moi, c’était juste du négatif. Le prix que ça coute, le temps à s’en remettre, le corps qui souffre. Je ne prenais pas en compte l’aspect santé mentale alors que sur ce point, elle a tout fait bien. J’avais aussi un peu peur qu’elle aille trop loin aussi, j’avoue. Mais ça n’a pas été le cas. »

Pour moi, c’était devenu normal de la voir stresser à l’idée de sortir en public 

Andreas et Chirine suivent une thérapie de couple pendant six mois : « Ça a coïncidé avec le moment où Chirine s’est sentie de mieux en mieux avec elle. Je l’ai vue s’épanouir et changer de type de vêtements, de maquillage. Je n’avais pas réalisé avant à quel point elle était complexée. Pour moi, c’était devenu normal de la voir stresser à l’idée de sortir en public ou d’oser parler devant des gens. Maintenant, je regrette de ne pas avoir vu à quel point elle souffrait. Elle a eu raison de tout faire pour changer ça. Je me dis même qu’elle a eu du courage. À la fin de notre thérapie, la psychologue nous a conseillé de nous amuser de la découverte de ce nouveau corps. Depuis, on achète de la lingerie ensemble pour elle. Je me surprends à la trouver super sexy depuis qu’elle se dévoile plus. Ça a pris le temps mais j’aime à la folie la femme qu’elle est devenue. Et je crois qu’elle est heureuse aussi. »

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