Santé

Nomophobie : d’où vient la peur panique d’être séparé de son portable ?


Symptôme d’une époque ultra-connectée, la peur d’être séparé de son téléphone ou de ne pouvoir s’en servir est de plus en plus fréquente. Ce trouble, appelé nomophobie, altère le quotidien de ceux qui en souffrent mais il est possible d’en guérir.

À la seule idée de se retrouver dans un lieu sans Wi-Fi, Annette blêmit. Si elle constate que sa batterie est sur le point de passer sous la barre des 50%, cette cadre dynamique n’a plus qu’une idée en tête : trouver un moyen de la recharger au plus vite. Et si, par le plus grand des malheurs, elle doit passer une journée entière au bureau sans son smartphone, resté introuvable au moment du départ, la quadra est dans un état de désarroi et de stress intenses jusqu’à ce qu’elle y ait accès à nouveau.

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Qu’est-ce que la nomophobie ?

Annette est atteinte de nomophobie – élu mot de l’année 2018 par le Cambridge Dictionnary – un terme issu de la contraction de « no mobile phone phobia », qui est donc la peur de ne pas avoir son téléphone à proximité de soi ou d’être dans l’impossibilité de s’en servir. Cette angoisse nouvelle reflète nos multiples dépendances numériques car le portable est un outil qui facilite les addictions en tous genres, tout comme la pratique de jeux-vidéos. L’addiction au smartphone démarre, elle, dès l’instant où l’on commence à perdre le contrôle de son utilisation. Lorsque l’on ne peut s’empêcher, par exemple, de répondre à un SMS en conduisant ou de passer du temps sur les réseaux sociaux.

D’où vient la nomophobie ?

Autrefois, la plupart des gens craignaient de perdre leurs clés ou leur portefeuille, mais aujourd’hui, c’est le portable qui polarise toutes les attentions. « Le téléphone ne sert pas qu’à recevoir et à émettre des appels, souligne la sociologue du digital, Catherine Lejealle. Il possède une dimension affective, car il contient nos fils de discussion, nos agendas, nos carnets d’adresse, nos photos et nos musiques préférées. Notre mobile nous sert également de GPS, de baladeur numérique ou de livre de cuisine. Il fait encore office de réveil, de montre, voire de lampe torche. Bref, il est devenu un utilitaire indispensable ». Toute notre vie, ou presque, est dans notre téléphone. Dès lors, on comprend que l’égarer, l’oublier ou se le faire voler est source d’angoisse.

L’essor des smartphones, des réseaux sociaux, mais aussi de l’information en continu, ont par ailleurs engendré un syndrome propre à notre époque : le Fomo (de l’anglais Fear Of Missing Out), qui renvoie à la peur de rater quelque chose.

Manifestions et symptômes de la nomophobie

Comme tout phobique, le nomophobe commence toujours par adopter un comportement d’évitement. Il palpe cent fois par jour la poche de son pantalon (ou de son manteau) pour s’assurer que son téléphone est bien là. Lorsque son joujou est à portée de main – autrement dit, tout le temps ! – il le consulte compulsivement toutes les deux minutes et scrolle inlassablement l’écran sans trop savoir pourquoi. Privé de son téléphone, le nomophobe ressent un vide intérieur qui l’angoisse. Il « se sent mort ».

Les adolescents et les cadres dynamiques sont les plus concernés par ce trouble qui devient une véritable addiction. Les premiers redoutent d’être séparés de leur smartphone, par peur d’être isolés du groupe en n’ayant plus accès aux réseaux sociaux. L’angoisse de performance intime aux seconds d’être sans cesse joignables.

Solutions et traitements contre l’addiction au téléphone

Ce comportement exacerbé provoque des conflits avec l’entourage et entraîne souvent un isolement social. Il peut aussi déclencher des troubles du sommeil, voire une dépression. Il convient donc de mettre en place des limites à l’utilisation du téléphone. Définir un temps maximal de connexion, couper ses notifications, passer son écran en noir et blanc (histoire de le trouver moins beau)… Autant de recettes qui ont fait leur preuve dans la gestion de la nomophobie.

Mais si elles ne suffisent pas à votre sevrage numérique et que votre nomophobie vous pourrit la vie et qu’elle entache votre santé, sachez qu’il existe des moyens pour vous en débarrasser. Des centres de thalasso et des hôtels de luxe proposent déjà à une clientèle d’actifs aisés des stages de digital detox, à grands coups de yoga et de méditation.

« Les thérapies cognitivo-comportementales (TCC) sont aussi très efficaces, glisse le psychiatre Jérôme Palazzolo, auteur de “Je me libère de mes phobies” (Puf).  Elles consistent à déshabituer progressivement la personne à la présence de son smartphone ». Le thérapeute préconise des exercices à pratiquer hors-consultation – « oublier » son téléphone en allant faire ses courses ou ne pas relever ses mails le temps d’un week-end – afin de se ménager régulièrement des moments sans connexion. Il incite aussi le patient à retrouver du plaisir avec des choses simples, comme lire, cuisiner ou voir des amis. L’objectif de la thérapie n’est pas de supprimer le portable, mais d’en réguler son usage.

Possibilité de prise en charge et guérison de la nomophobie

La nomophobie se soigne très bien. Une dizaine de séances chez un psychothérapeute, ou chez un psychiatre, dont les consultations présentent l’avantage d’être prises en charge, suffisent en général à apprendre au patient à se mettre en mode off, sans ressentir d’anxiété.

Pour ce qui est d’Annette, pas sûre qu’elle soit prête à suivre un stage ou une thérapie pour apprendre à se passer de son smartphone. Pour l’heure, la jeune femme envisage plutôt d’acquérir très vite le dernier Iphone 13. Elle a entendu dire qu’une pénurie de puces électroniques risquait d’entraîner une rupture de stock du produit phare de la marque à la pomme avant Noël…

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