Santé

Affaires de famille : Julianne, 33 ans : « L’envie me démange souvent de jeter son smartphone par la fenêtre »

« Je me souviens de la première soirée qu’il a passée chez moi, raconte Julianne*. C’était il y a bientôt deux ans. Pierre-Antoine se sentait probablement très à l’aise en ma compagnie, car juste après m’avoir aidée à débarrasser la table, il s’est appuyé sur le plan de travail de ma cuisine et s’est mis à scroller sur son iPhone devant moi, comme si de rien n’était. J’avoue que ça m’avait choquée, ou pour le moins interpellée mais, aveuglée par l’amour, j’ai préféré croire qu’il avait une urgence professionnelle, (il venait de décrocher un nouveau poste dans un prestigieux cabinet d’architectes qui l’accaparait énormément) et je n’ai donc pas réagi. »

Un tue-l’amour

Si cette cadre commerciale parisienne exprime aujourd’hui quelques regrets d’avoir été, ce soir-là, un poil trop tolérante, trop gentille, c’est que le téléphone portable de son cher et tendre est (trop) longtemps resté… l’extension de sa main, sa prothèse. « Je suis moi-même assez connectée, reconnaît la jeune femme. Mais moi, contrairement à lui, je me soigne, j’essaie de me contrôler, et encore plus quand nous sommes tous les deux. Depuis que j’ai rencontré Pierre-Antoine, j’ai, par exemple, pris l’habitude de mettre systématiquement mon portable en mode avion, dès que je rentre à la maison, et de m’astreindre à ne le consulter que, au maximum, deux fois par jour le week-end.

Je me suis dit qu’il devait avoir quelqu’un d’autre

Mon conjoint, lui, avait, jusqu’à il n’y a pas très longtemps, H24 les yeux rivés sur son smartphone. Il l’emportait de pièce en pièce, jusqu’aux toilettes, comme un alcoolique accroché à sa bouteille. C’est simple : il avait toujours un truc à chercher, une info à vérifier, une story à regarder… ou un nouveau jeu à essayer. Ça me rendait totalement dingue. Car tout ce temps passé en solo empiétait gravement sur nos moments en commun. »

L’addiction de son partenaire était telle que la trentenaire dit même avoir, un temps, douté de lui. « Je me suis dit que s’il était constamment scotché sur son écran, c’est qu’il devait avoir quelqu’un d’autre (ou plusieurs autres) dans sa vie, glisse Julianne. Je ne suis pas dupe et je sais très bien, comme tout un chacun, que les portables donnent accès aux réseaux sociaux et aux sites de rencontres. J’ai évidemment mis le sujet sur la table et compris que je faisais totalement fausse route (Pierre-Antoine est amoureux et l’idée de m’être infidèle lui serait totalement insupportable). Cette discussion ne m’a, pour autant, pas vraiment rassurée. Je partais, en effet, du principe que si mon partenaire pianotait sur son portable, voire interrompait nos conversations pour regarder une notification ou répondre à un SMS, lorsque nous passions du temps ensemble, c’est qu’il considérait que tout ce qu’il se passait sur son téléphone était plus important, et méritait davantage son attention, que ce que je lui racontais. Ce qui, bien sûr, était extrêmement désagréable, et même frustrant pour moi.

Ne plus exister 

Je me sentais transparente. Se retrouver face à quelqu’un qui vous dit « je t’écoute », tout en ne s’impliquant pas vraiment dans la conversation est d’une tristesse absolue. C’est même un véritable tue-l’amour lors d’une soirée en tête-à-tête. Il m’est d’ailleurs arrivé, très souvent, d’avoir envie de lui arracher son portable des mains et de le balancer par la fenêtre. Et aussi, parfois, de douter de l’avenir de notre couple. »
Après s’être maintes fois disputé à ce sujet avec sa moitié, Julianne qui, au fond d’elle-même continuait à penser que Pierre-Antoine pourrait bien être l’homme de sa vie et le père de ses enfants, a instauré quelques règles, afin d’inciter son cher et tendre à limiter l’usage de son portable.

« Plus de téléphone à table ou devant la télé, ni lorsque l’on va se balader tous les deux, détaille la trentenaire, en s’empressant d d’ajouter qu’elle avait, dès le début, strictement interdit l’intrus dans la chambre à coucher. Pierre-Antoine a, depuis quelque temps, fait de considérables efforts, même si ses mauvaises habitudes reprennent encore, parfois, le dessus. D’autant que la plupart de ses collègues sont, peu ou prou, aussi accros que lui au téléphone. Mais j’ai ma parade : dès qu’il dégaine, par inadvertance ou par réflexe, son smartphone, je ne lui fais aucun reproche (je sais maintenant que c’est presque toujours contre-productif), mais je pose délicatement mes couverts sur la table, je mets le programme en pause, ou je m’arrête de marcher, histoire de bien montrer ma désapprobation. Il sait alors que j’attends qu’il range son téléphone pour continuer à dîner, à regarder le film ou à me promener en sa compagnie. Cette tactique fonctionne plutôt bien, car je n’ai jamais besoin de rejouer la scène une deuxième fois. Et je dois dire que cela a changé la donne pour moi. »

* L’identité a été modifiée

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