Santé

Thérapie de couple : Marika (48 ans) et Tom (49 ans), « Avec nos non-dits, on pensait se protéger »

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Marika a 48 ans et son compagnon, Tom, en a 49. Ils sont en couple depuis vingt-cinq ans. Ils ont un enfant, un adolescent qui finit actuellement le lycée. Quand Marika et Tom décident d’aller voir un thérapeute, c’est sur les conseils de leur fils. Pour eux, il n’y a aucun problème. Ils n’ont jamais aucun conflit, sont toujours d’accord l’un avec l’autre. Avec leur fils, il n’y a jamais non plus un mot plus haut que l’autre. La vie est calme et, il leur semble, équilibré au sein de leur famille. Mais leur fils éclate pendant un déjeuner : il ne supporte plus les non-dits. Pour lui, si leur famille n’est jamais en désaccord c’est parce que personne n’exprime jamais rien. Marika et Tom sont estomaqués mais prennent aussi au sérieux la détresse de leur fils unique. C’est pour lui, donc, qu’ils décident de se rendre dans le cabinet d’une thérapeute.

« À ne rien se dire, on pensait se protéger », Marika

Marika en est convaincue, cette thérapie ne va pas durer longtemps : « Je voulais montrer qu’on prenait son ressenti au sérieux mais je n’y croyais pas tellement. Il y a bien des choses que je n’exprime pas au quotidien mais pour moi je ne l’ai jamais vécu comme une charge ou un problème. Pour moi, ça fait partie de la vie de couple et même de la vie de famille. On ne se dit pas ses quatre vérités tous les quatre matins, ce serait le chaos sinon. Dans ma propre famille, on ne se parle pas tant que ça en dehors des nouvelles factuelles et de la météo. Je ne me suis jamais dit que ça voulait dire qu’on ne s’aimait pas vraiment. Mais mon fils semblait penser l’inverse donc j’ai voulu lui prouver que je l’aimais en l’écoutant. Je me disais qu’en une séance ou deux, un thérapeute verrait que tout va bien et que ce serait fini pour cette histoire. »

Mais la thérapie dure en réalité une année : « On a vu le thérapeute, conseillé par notre médecin de famille, pendant un an, une fois par mois. Il y a beaucoup de choses qu’on ne se disait pas en effet mais qui s’exprimaient quand même au quotidien. Les tensions se ressentent facilement et durent plus longtemps si rien ne sort jamais. Les « je t’aime » au contraire, ne se ressentent pas aussi simplement et ne sont pas évidents. À ne rien se dire, on pensait se protéger et protéger notre fils et on s’est rendu compte qu’on avait mis en place un système de bombe à retardement. Un jour allait arriver où tous les conflits qui n’avaient jamais été résolus, toutes les frustrations, toutes déceptions, allaient ressortir. Dans ma famille, c’est arrivé juste après la mort de ma mère, l’année même de la thérapie. J’ai toujours cru qu’on était une famille où tout allait bien et le décès de ma mère a entraîné une réaction en chaîne de vidage de sac. Des gens dont je pensais qu’ils s’aimaient, se supportaient à peine en réalité. Moi-même, j’ai eu du mal à retrouver une place dans tout ça. Il y avait des rancœurs dont je n’avais jamais entendu parler et dont je n’avais aucune idée. Des choses qui se résolvent facilement en quelques phrases, je le sais maintenant. Mais avec les années, ces choses sont devenues des blessures profondes et ont créé de la jalousie et de la détestation. On ne peut plus réparer ça. »

« On en apprenait les uns sur les autres », Marika

Quand elle prend conscience de l’importance de la thérapie pour son mariage et le bien-être de son fils, Marika s’engage à fond dans le processus de changement : « La thérapie a consisté à beaucoup de séances de discussion à trois mais également à des exercices au quotidien pour s’exercer à verbaliser les choses. Il fallait prendre le temps, souvent matin et soir, de se raconter quelque chose d’important de notre journée et ce qu’on en avait ressenti. Ce n’était pas toujours des choses profondes mais de semaine en semaine j’ai eu l’impression que c’était des moments qu’on attendait tous. On en apprenait les uns sur les autres. C’était drôle et émouvant, souvent. Et il arrivait aussi, qu’en tant que parents, on puisse avoir des conseils et se sentir utiles. Ça a renforcé l’amour qu’on pensait avoir mais qu’on ne nourrissait pas au quotidien en tant que famille. »

« Je prends beaucoup plus de plaisir à dire à ma femme que je l’aime », Tom

Tom, pour sa part, vient d’une famille où les sentiments s’expriment : « Dans ma famille, ça crie à la moindre occasion. J’évite un maximum les repas avec tous les frères et les cousins parce que tout le monde boit un peu trop et finit par crier sur un autre et ça m’épuise. J’ai aimé Marika au départ parce qu’elle était l’inverse de ça. C’est une femme posée qui ne se laisse jamais emporter par ses émotions. On est partis tous les deux du principe que si on vivait ensemble toutes ces années, c’est qu’on s’aimait. Donc ni l’un ni l’autre n’a souffert de ne pas avoir de grande déclaration d’amour autant que de conflits qui permettent de remettre les choses à plat. Le plat, c’était un peu notre quotidien. »

Quand la thérapie commence à faire effet, Tom réalise que leur volonté de ne pas faire de vagues n’est pas bénéfique pour leur relation : « Je prends beaucoup plus de plaisir maintenant à dire à ma femme que je l’aime ou à lui faire remarquer quand elle dit ou fait quelque chose qui m’émeut. Et c’est pareil avec mon fils. Je vivais sans donc je ne réalisais pas que ça manquait. Pour ça, on peut dire merci à notre fils. Je crois que c’est un truc de génération. On communique plus chez les jeunes d’aujourd’hui. On prend plus en compte le fait que les gens changent et que les situations évoluent. Nous, on avait une attitude assez monolithique. Ça aurait pu tenir comme ça toute la vie, peut-être. Les parents de Marika semblent s’en être accommodés jusqu’au bout. Mais ça peut aussi conduire à de véritables scissions dans les familles et ça, on l’a malheureusement vu aussi. Au départ, il était question de faire plaisir à notre fils mais très vite on a réalisé qu’on faisait ça pour nous autant que pour lui. Je me sens une meilleure personne maintenant, un meilleur conjoint et un meilleur père. Cela ne veut pas dire que je suis parfait, loin de là. Mais j’ai réalisé qu’exprimer ses sentiments, qu’ils soient positifs ou négatifs, était une preuve de respect et d’amour. On n’aime pas vraiment bien quand tout ce qu’on désire c’est de ne pas faire de vagues. On n’existe pas vraiment non plus aussi. Cette époque-là est finie pour nous. »

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