Santé

Camille Rochet : « Il ne faut pas voir la thérapie de couple comme le signe que la relation va mal »

 Elle. – Trop tard, qu’est-ce que ça veut dire exactement ? Que les jeux sont déjà faits ?

Camille Rochet. – Trop tard, c’est quand le couple arrive en disant « vous êtes notre dernière chance ». Ça veut généralement dire que beaucoup de choses ont été accumulées, que la communication est rompue sur beaucoup de sujets. Parfois depuis longtemps. Ça ne veut pas dire qu’on ne peut rien faire pour sauver la relation, mais ça signifie qu’il va falloir s’investir à 200 % pour le faire, suivre une thérapie qui demande du temps, de l’investissement, de l’argent, de l’énergie… Tout le monde n’est pas prêt à ça. Il vaut mieux ne pas attendre d’en arriver là et consulter plus tôt. 

Elle. – Quand ? 

C.R. – Le plus tôt possible. Parfois, les couples n’osent pas franchir le cap parce qu’ils voient la thérapie comme le signe que la relation va mal et se disent que leurs problèmes ne sont pas si graves que ça, « qu’ils ne vont pas aller voir quelqu’un pour ça ». Erreur. Vous n’attendez pas d’être extrêmement malade pour aller chez le médecin ? Là, c’est pareil. Il faudrait consulter dès qu’il y a un problème qui devient un peu obsessionnel (jalousie, insécurité, ennui, baisse du désir, disputes liées à la gestion de l’argent…), qui revient régulièrement dans la relation, qu’on a du mal à débloquer ou dont on finit par ne plus parler pour éviter le conflit.

Si la barque prend l’eau… n’attendez pas qu’elle coule

Elle. – Consulter après un an de relation par exemple, ça se fait ?

C.R. – Bien sûr ! Il n’y a pas de règles. Il faut arrêter de se sentir tout-puissant : tout le monde a des problèmes, qu’ils se déclarent au bout de trois mois ou au bout de dix ans de relation ! Puis tout le monde n’a pas le même curseur. Ce qui peut faire mal, être grave pour l’un ne l’est pas forcément pour l’autre et vice-versa. Votre motif de consultation sera différent de celui du voisin. 

Elle. – Mais si la thérapie de couple ne s’adresse pas aux couples qui vont mal, tout le monde devrait consulter ? 

C.R. – Quasiment oui ! La thérapie de couple, c’est en fait deux thérapies individuelles et la thérapie de la relation à deux. L’idée, c’est de comprendre quelle mayonnaise on a montée ensemble, d’identifier ce qui va et de modifier ce qui ne va pas. Imaginez. Un couple qui vient consulter dès qu’il a une difficulté. C’est très sain ! C’est une très bonne intimité relationnelle que de se dire« ah tiens c’est marrant, on n’arrive pas trop à se parler de ça, je sens que ça bloque, viens, on va consulter », de faire deux trois séances, de régler le problème et puis s’en va. Puis peut-être de revenir un an, deux ans, trois ans après pour traiter autre chose. En résumé : si la barque prend l’eau… n’attendez pas qu’elle coule !

Elle. – Et d’en parler avec ses amis, sa famille, ses collègues ?

C.R. – C’est essentiel de se confier à ses proches. Mais il ne faut pas confondre ça avec une vraie thérapie. Les amis se basent sur leurs expériences pour vous conseiller, or justement, le rôle d’un thérapeute, c’est de se détacher de sa propre expérience, pour le faire. Ils peuvent être de très bonnes oreilles mais pas forcément de bons conseils. Aussi, là, l’idée de la thérapie, c’est de se confier à la même personne, à savoir, le professionnel. Si de votre côté, vous discutez de votre couple avec untel et que votre ami en discute avec quelqu’un d’autre, ça ne risque pas vraiment de régler les choses…

Elle. – Quand il n’y a plus rien à sauver, vous le sentez tout de suite ?

C.R. – Pas vraiment. Parfois, c’est étonnant. Je peux me dire en début de thérapie que j’ai l’impression que ça va être difficile pour le couple de repartir sur de bonnes bases, puis finalement, ça remarche comme sur des roulettes et puis parfois c’est l’inverse, je me dis« eux, c’est sûr, ça va marcher », et puis non. C’est normal. Quand vous rencontrez quelqu’un, vous avez un premier avis sur la personne, puis au fur et à mesure, vous apprenez à la connaître et votre avis change. Là, c’est pareil. À mesure de la thérapie, mon point de vue sur la relation peut changer.

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