Santé

Eugénie, 34 ans : « Pour avoir un enfant, j’ai plus d’une fois pensé à arrêter ma pilule et à simuler un accident »

« La première fois que je lui ai parlé bébé, c’était il y a environ deux ans, et il a explosé de rire, raconte Eugénie. Il pensait que j’étais en train de lui faire une mauvaise blague ». Cette jeune cadre commerciale de la région lyonnaise se souvient qu’elle était à deux doigts de se fâcher. « J’ai trouvé que sa réaction était terriblement déplacée, voire vexante, glisse-t-elle. On se connaissait depuis presque trois ans (on avait même emménagé ensemble quelques mois plus tôt), on avait tous les deux un travail stable et des revenus plutôt confortables, et, surtout, on s’aimait (c’est du moins ce que je pensais). Ma demande n’avait donc rien d’incongru ».

Au bout de plusieurs offensives, Maxence comprend que la question d’Eugénie n’est ni une plaisanterie, ni un coup de tête, mais, contre toute attente, il continue à faire le sourd et à botter en touche. « Au début, il me disait qu’il ne voulait pas d’enfant  « pour le moment », explique la trentenaire. Il avait beau avoir quatre ans de plus que moi, il répétait inlassablement qu’il ne se sentait pas prêt, sans fournir plus de précisions sur le pourquoi de la chose. Du coup, moi, je prenais ça pour un « non » tiède, facilement transformable en « oui ». Il était sans doute effrayé par la nouveauté, par le poids des responsabilités, par le sérieux du rôle de père (ou que sais-je d’autre ?) mais j’étais sûre que j’allais, tôt ou tard, réussir à venir à bout de ses réticences. C’était juste une question de patience ».

J’ai essayé par tous les moyens de le convaincre

Sauf que les mois (et les années) passent et que, à chaque fois qu’Eugénie met le sujet sur la table, la réponse de Maxence reste la même. « J’ai essayé par tous les moyens de le convaincre, soupire la jeune femme. Je lui ai dit que j’avais confiance en lui, qu’il ferait un père fabuleux et, comme je craignais qu’il ait peur de perdre irrévocablement sa liberté, j’ai insisté lourdement sur le fait que l’arrivée d’un enfant dans notre foyer ne transformerait nullement notre quotidien en enfer. Lui et moi, on était très organisés (on savait pertinemment, l’un comme l’autre, qu’il n’y aurait pas de problème côté logistique) et mes parents, tous comme les siens, seraient, de plus, ravis de s’occuper de notre bout de chou (ils le faisaient déjà avec les enfants de nos frères et sœurs) pour qu’on puisse encore passer du temps rien que tous les deux, en amoureux. Il ne serait jamais, oh non jamais, relégué au second plan. J’ai aussi cité en exemple Jean-Baptiste, son cousin germain, qui, pendant des années et des années, ne voulait pas entendre parler de paternité (à croire que c’est un truc de famille !). Il était aujourd’hui complètement gaga de son petit Gabriel. À tel point que c’était lui qui avait le premier évoqué l’idée de lui donner rapidement un petit frère (ou une petite sœur) ».

Las, rien n’y fait. Pire : plus Eugénie aborde la question et plus Maxence se sent agressé… et se braque. Lorsque le couple est ensemble et qu’il lui arrive de croiser une femme enceinte, un petit enfant (ou même simplement une poussette), le jeune homme prend désormais sciemment un air agacé, voire dégoûté. Ce qui rend la jeune femme complètement folle. Mais qui la pousse aussi à s’interroger. D’autant qu’elle entend bien le tic-tac de son horloge biologique. « J’avoue que j’ai plus d’une fois pensé à oublier de prendre ma pilule et de simuler un accident, afin de le mettre devant le fait accompli, lâche-t-elle. Mais comment expliquerais-je plus à mon enfant que son père ne voulait pas de lui et que je lui ai imposé sa conception ? Et puis l’idée de manipuler mon compagnon et de lui faire un petit dans le dos me met horriblement mal à l’aise. J’ai toujours mis un point d’honneur à ce que notre relation soit basée sur la transparence, la sincérité et la confiance réciproque. Je n’ai pas à décider seule d’un sujet de cette importance. Ce choix doit se faire à deux ».

On était peut-être tout simplement pas faits l’un pour l’autre

Il n’empêche : en refusant d’être père, Maxence prend la décision pour eux deux. Car la jeune femme est désormais quasiment certaine qu’il ne voudra jamais d’enfants. Et que si elle décide de poursuivre sa vie avec lui, en connaissance de cause, elle ne sera, de fait, jamais mère. « Il faut bien que je me rende à l’évidence, dit-elle. Il a de bons rapports avec ses neveux et ses nièces, même s’il n’est, il est vrai, pas très démonstratif avec eux, mais, pour une raison qui m’échappe, et qui lui échappe sans doute tout autant (il s’entend bien avec son père, n’a jamais subi, à ma connaissance, de traumatisme dans son enfance et ne se sent pas plus concerné que ça par le monde qui va mal ou le trou dans la couche d’ozone), il ne veut pas donner la vie ». Depuis quelque temps, la trentenaire pense sérieusement rupture. « J’ai toujours cru qu’il était l’homme de ma vie, lâche Eugénie, visiblement émue. Je ne peux pas le forcer à avoir un enfant, tout comme il ne peut pas me priver d’être mère. Ça m’a pris du temps pour oser me l’avouer, et ça me fait mal de formuler, mais on était peut-être tout simplement pas faits l’un pour l’autre ».

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