Santé

Familles recomposées : comment gérer les rapports avec les enfants de son conjoint ?

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Dans le film « Les Enfants des autres », Virginie Efira incarne Rachel, une femme de quarante ans sans enfant, qui tombe amoureuse et se met en couple avec un homme (Roschdy Zem) déjà père d’une petite fille de quatre ans. Bientôt, le personnage joué par Virginie Efira s’attache de façon très forte à l’enfant, alors même qu’elle rêve de tomber enceinte… Le touchant long-métrage de Rebecca Zlotowski (« Grand Central », « Une fille facile »), tout en subtilité et en non-dits, est sans doute le premier long-métrage qui aborde de front le statut compliqué de belle-mère. Comment trouver sa place dans une famille recomposée ? Par quels moyens éviter les tensions, les difficultés qui attendent celle qui se retrouve embarquée dans une aventure avec des enfants qui ne sont pas les siens ? Pour y répondre, nous avons interrogé Catherine Audibert, psychologue et psychanalyste, autrice du « Complexe de la marâtre. Etre belle-mère dans une famille recomposée » (Payot). 

« Les belles-mères sont à une place très fragile »

ELLE. Dans le film de Rebecca Zlotowski, l’héroïne tisse des liens intenses avec la fille de son compagnon, âgée de quatre ans. Est-ce difficile d’être belle-mère quand on n’a pas été soi-même mère ? 
Catherine Audibert. Pas forcément. Quand on n’a pas encore eu d’enfant, il est plus facile de faire de la place à l’enfant de l’autre. Cela se complique en revanche quand la belle-mère a déjà un enfant de son côté, soit issu d’un premier lit, soit avec son nouveau conjoint. Car il y a une concurrence, une comparaison – parfois inconsciente – qui s’établit entre son propre enfant et les enfants de l’autre.  

ELLE. En quoi la position de beau-parent est-elle compliquée dans une famille recomposée ?
C.A. C’est une place très fragile, particulièrement pour les femmes. Beaucoup de projections négatives se font sur elles. Elles se retrouvent souvent en butte à l’hostilité de leurs beaux-enfants. Cette hostilité tire parfois sa source dans l’attitude ambigüe de leur conjoint. Comme celui-ci culpabilise vis-à-vis de ses enfants de s’être séparé de leur mère, il n’ose pas défendre sa nouvelle compagne, affirmer la place de celle-ci dans la famille recomposée, réprimander ses enfants quand ceux-ci ont un comportement trop désinvolte, rebelle ou insolent avec elle. Sans compter la mauvaise image que continue d’avoir la belle-mère dans la société et qui remonte à la nuit des temps – voyez les contes comme Cendrillon ! -, celle-ci étant vue comme usurpatrice, intrigante, manipulatrice. Elle est l’objet de toutes les suspicions. Encore maintenant, on constate, chez les professionnels de l’enfance ou chez certains médecins, de la défiance à son égard. 

« Beaucoup de femmes souffrent encore de cette situation »

ELLE. Votre livre, « Le Complexe de la marâtre » est sorti en 2004. Avez-vous l’impression qu’on regarde différemment les belles-mères aujourd’hui ? 
C.A. À l’époque, on parlait encore très peu des difficultés qu’elles rencontraient. J’ai eu l’idée d’écrire cet ouvrage car je recevais en thérapie des femmes qui se retrouvaient à fonder une famille recomposée et qui se sentaient totalement perdues, déstabilisées par l’attitude hostile des enfants de leur nouveau compagnon. Elles culpabilisaient de ressentir vis-à-vis de ces enfants de l’animosité ou du rejet, alors que ce n’était qu’une réaction compréhensible face à l’agressivité dont elles faisaient l’objet. Par ailleurs, elles avaient souvent l’impression que leur conjoint ne comprenait pas leurs besoins. Aujourd’hui, les familles recomposées sont beaucoup plus nombreuses, la garde partagée s’est répandue, et le regard sur les belles-mères a évolué positivement. Mais je reçois encore beaucoup de femmes qui souffrent d’une pareille situation. 

« Les enfants doivent respecter leur belle-mère »

ELLE.  Comment trouver sa place de belle-mère ? Quels conseils donneriez-vous ?  
C.A. Une bonne partie de la solution réside dans l’attitude du conjoint. Celui-ci doit expliquer à ses enfants qu’il leur faut respecter leur belle-mère. Le maître-mot, c’est le respect. On n’est pas obligés de s’aimer, mais l’on doit mutuellement se respecter. Les adultes doivent rappeler que ce sont eux qui édictent les règles dans la maison et que les enfants doivent les écouter, même si ce ne sont pas leurs parents biologiques. Ce n’est pas de l’autoritarisme, mais une autorité bienveillante. Que les enfants éprouvent parfois des sentiments d’hostilité ou de rejet face à leur belle-mère, c’est normal : ils sont eux-mêmes pris dans un conflit de loyauté vis-à-vis de leur mère qui est complexe à gérer. Mais ce n’est pas une raison pour le manifester sans retenue. 

ELLE. Existe-t-il des moyens concrets d’améliorer la situation des beaux-parents ? 
C.A. Cela fait des années que le sujet est débattu, mais on ne constate pas d’avancées. Notre société n’arrive pas à définir un cadre, un statut particulier pour le beau-parent. La dernière loi sur le sujet remonte à 2002 et à Ségolène Royal. Ce texte tentait de mieux défendre les droits des « tiers » dans une famille. Avec d’autres, nous avions créé il y a quelques années un collectif, « Recomposer », qui proposait l’idée d’un « livret de famille recomposée » offert en mairie avec des conseils concrets sur la place des beaux-parents. Nous avions aussi suggéré quelques pistes pour alléger les questions administratives et simplifier la vie quotidienne. Mais ces démarches se sont heurtées à des associations de parents, qui ne voulaient pas en entendre parler.  

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