Santé

Joséphine, 32 ans : « Le voir chercher des figurines de mangas sur internet jusqu’à pas d’heure me fait douter de nous »

« C’est une grève de métro qui a fait que, il y a cinq ans, mon chemin a croisé celui de l’homme avec qui je vis, raconte Joséphine*. Je venais de quitter, trois mois plus tôt, ma Bretagne natale, après avoir décroché un poste d’analyste financière dans une grosse société de courtiers en plein cœur de Paris. Ce soir-là, le trafic était complètement interrompu sur l’une des deux lignes que je devais emprunter pour rentrer chez moi. Je n’avais donc pas d’autre choix que de faire une partie du trajet à pied. Comme je connaissais encore peu la ville – et que j’ai un sens de l’orientation absolument lamentable, même, j’ai honte, quand j’utilise google map -, j’ai, à mi-chemin, demandé à Simon de m’indiquer l’itinéraire pour rejoindre le quartier de Croulebarbe, dans le XIIIe arrondissement. Signe du destin : il se trouve qu’il allait dans la même direction que moi.

Nous avons donc marché pendant près d’une heure, côte à côte, tout en discutant. À sa demande, je lui ai dressé la liste des avantages et des inconvénients de la capitale (vie culturelle très riche versus prix exorbitant des loyers). Lui m’a parlé un chouïa de son boulot – il travaillait depuis peu dans un magasin de jeux vidéo -, mais aussi de sa « manga mania » (il possédait une collection impressionnante de figurines de Dragon Ball Z et de Naruto pour laquelle il avait aménagé une pièce, dans le sous-sol du pavillon de ses parents, chez qui, à presque trente ans, il vivait toujours), et surtout de sa passion pour la saga Harry Potter. L’univers de Poudlard n’avait visiblement aucun secret pour lui. En prononçant les noms de Ron, d’Hermione et de Dumbledore, ses yeux s’illuminaient. On aurait dit un môme de dix ans ».

Relation imprévue

L’enthousiasme enfantin et l’insouciance du jeune homme amusent Joséphine. Tant et si bien que, au moment de le quitter, c’est elle qui lui demande son numéro de portable. « Je l’ai fait sans aucune arrière-pensée, se défend la trentenaire. Je n’aurais d’ailleurs pas parié un kopeck sur une histoire avec lui, même si son sourire me faisait déjà un poil craquer. J’avais juste envie de le revoir, parce que je le trouvais gentil, attendrissant, rafraîchissant. Il était à mille yeux des hommes sérieux que je côtoyais dans mon univers professionnel ».

Contre toute attente, c’est pourtant elle qui, après un deuxième rendez-vous dans un bar, à Bastille, l’embrasse la première. Persuadée qu’ils ne sont néanmoins pas compatibles, Joséphine se dit que cette histoire ne durera qu’une poignée de semaines, voire de jours. Mais le temps passe et la jeune femme – sans qu’elle soit capable d’expliquer vraiment pourquoi – s’attache à son homme-enfant.

« Au début de notre relation, on riait beaucoup, se souvient-elle. Simon adorait organiser (chez moi ou chez ses potes) des soirées de jeux de défis, de quiz et de mimes. À bien y réfléchir, on n’était finalement assez rarement rien que tous les deux. Lorsque cela nous arrivait, on passait plus de temps à se faire des blagues, à écrire sur les pare-brise pleins de buée ou à chercher des formes imaginaires dans les nuages, qu’à faire des plans sur la comète. Aussi étrange que cela puisse paraître, cela ne me dérangeait pas – en réveillant la petite fille qui dormait en moi, Simon a apporté beaucoup de gaîté et de légèreté dans ma vie -, même si j’avais, pour ma part, une vision différente (plus fusionnelle) du couple. À aucun moment, je n’ai douté de ses sentiments pour moi (il suffisait de regarder ses yeux pour voir qu’il était amoureux et puis, au lit, c’était, comme dire… juste incroyable), mais je sentais bien que, si je voulais le garder, il ne fallait pas le brusquer ».

J’ai peur de l’avenir avec lui

C’est lorsque Joséphine parle d’emménagement à deux, après presque trois ans d’idylle, que les choses se compliquent.  « Dès que je mettais le sujet sur la table, je le sentais mal à l’aise, fuyant, glisse-t-elle. Ou alors il me disait oui, du bout des lèvres, avant de se rétracter le lendemain matin ». Devant tant d’hésitation de la part de sa moitié, Joséphine décide de mettre leur relation sur pause. Simon est abasourdi. « Le voir aussi malheureux m’a vraiment remuée, dit-elle. Mais j’ai tenu bon ». Il est finalement revenu, quelques mois plus tard, en jurant qu’il se sentait totalement prêt à vivre à deux et qu’il en avait même terriblement envie. Mais, depuis bientôt un an qu’ils partagent leur quotidien, et que Joséphine doit s’occuper de tout, y compris ranger son bazar, alors qu’elle avait été claire (et qu’il était d’accord) sur le principe du 50-50, c’est elle qui doute. « Je pensais naïvement qu’il allait grandir, mûrir et bousculer ses priorités, dit-elle. Mais lorsque je le vois chercher des figurines ou discuter sorcellerie sur internet tout le week-end (et parfois même jusqu’à pas d’heure), plutôt que de passer l’aspirateur, de descendre la poubelle ou de me proposer d’aller au ciné, je me pose énormément de questions. J’ai peur de l’avenir avec lui et, notamment, de devenir un jour mère et de me retrouver non pas avec un, mais avec deux enfants à la maison ».

* Les noms sont modifiés

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