Santé

« Le syndrome du nid vide » : quand les enfants partent, les parents pleurent

À la manière du post-partum, certaines périodes de vie ont besoin d’être démystifiées. C’est ce à quoi se sont employées Charlotte Attry, Brigitte Carrère et PrincessH avec « Toi et moi, on s’explique : le syndrome du nid vide » (ed. Bamboo). L’ouvrage se penche sur le moment où les enfants quittent le domicile familial. Environ 35% des parents, dont une majorité de femmes, seraient touchées par ce sentiment de vide allant du pincement au cœur à la dépression.

Les mères plus affectées ?

Les trois autrices définissent cette période comme le bouleversement d’un équilibre familial. « La peur de perdre la connexion avec son enfant, son rôle “protecteur” ou les moments partagés en famille », soulignent-elles. Et aussi l’allégement d’une certaine charge mentale. Vous savez, la liste de courses, les lessives, les allers-retours aux activités diverses… Cela explique pourquoi celles qui assurent encore la majorité des tâches domestiques (ménages, courses et soins aux enfants) sont plus touchées. Si Charlotte Attry et Brigitte Carrère abondent en ce sens, elles font aussi valoir une difficulté de la part des pères d’exprimer leur tristesse à ce moment-là. Elles ont en effet recueilli énormément de témoignages de pères qui en ont souffert, mais qui ont préféré masquer leur douleur.

Pour les autrices, une grande majorité (dépassant largement les 35%) des parents sont concernés mais le cachent. Car ce n’est pas un sujet facile à aborder. « Oser en parler, c’est douloureux. Cela traduit une envie de garder ses petits bébés près de soi donc ce n’est pas vraiment valorisé », explique Brigitte Carrère qui, elle-même, s’est rendu compte en écrivant ce livre qu’elle avait vécu ce syndrome de façon assez forte, sans vraiment poser des mots dessus.

Briser le tabou

La difficulté est liée à une double injonction : celle de taire les soubresauts de la santé mentale, ajoutée à celle d’être un bon parent. Car ce départ n’est-il pas l’aboutissement d’une éducation réussie ? Qui sont ces parents qui font peser le poids de la culpabilité sur les épaules de leurs rejetons ? « Les personnes qui le vivent nous ont confié parfois avoir honte d’en parler, donc écrire ce livre était aussi une manière de dire que c’est normal de ressentir cela », abonde Charlotte Attry. Et c’est une mission réussie. Tout au long de l’ouvrage, les trois autrices lient habilement témoignages de parents et conseils d’expert.es qui permettent de comprendre, déculpabiliser et se faire aider.

Des signaux physiques

La première chose, c’est d’admettre ce sentiment. À travers des tests ludiques et malins, les trois autrices apprennent aux lectrices et lecteurs à écouter les signaux. À commencer par ceux envoyés par leur corps. « On essaie d’expliquer que cela peut avoir des répercussions physiques, car c’est très lié au stress », note Brigitte Carrère. « La spécificité du syndrome du nid vide est que cela rentre en résonance avec sa propre enfance et cela peut révéler des choses que l’on a essayé de mettre de côté », ajoute Charlotte Attry.

Elles parlent d’un parcours d’acceptation qui peut parfois être similaire à celui du deuil comme « tout choc ou changement dans la vie ».

D’autant que, comme le post-partum, ce moment est parfois accompagné de bouleversements hormonaux. « C’est une période où on se voit vieillir. Il y a de grands changements physiques, psychiques. À cela, s’ajoutent parfois la ménopause et le vieillissement des parents aussi. Tout cela pose un contexte. Cela sonne un peu comme la mi-temps de la vie. Et le vieillissement fait peur. »

Se préparer à laisser partir son enfant

Pour éviter de se laisser surprendre, leur premier conseil est d’anticiper cette période. « Le but de l’éducation, c’est d’amener ses enfants vers l’autonomie, vers ce grand départ. Il faut le garder en tête, leur donner les clés et se préparer aussi », décrypte Charlotte Attry. Lâcher du lest au fil des années permet aux parents de se rassurer sur leurs capacités à se débrouiller seuls et permet de trouver du temps pour nourrir ses propres projets.

« Certains parents ont vraiment tout investi dans l’éducation de leurs enfants et quand ils partent, ils ne savent plus quelle est leur utilité », ajoute l’autrice. Cela passe par une façon de cultiver ses passions, travailler, préserver des relations sociales… Des choses qui ne sont pas forcément simples dans le tourbillon de la vie avec des enfants en bas âge. « C’est aussi un modèle pour les enfants. Quand ils voient que la vie de leurs parents est riche, complète et épanouie et qu’ils ne sont pas uniquement dépendants d’eux et de leur propre bonheur, cela allège le sentiment de culpabilité », fait aussi valoir Brigitte Carrère.

Ce guide libérateur est donc à mettre entre toutes les mains, des adolescents qui s’en vont aux parents bientôt concernés en passant par les jeunes parents qui ont la tête dans le guidon. D’autant que ce syndrome pourrait prendre de l’ampleur dans les années à venir. « Aujourd’hui, les enfants partent plus tard. C’est un grand événement. Il est possible qu’on ait un boom dans les années à venir, car nous sommes plus connectés, on lâche moins, on veut le meilleur pour nos enfants », analyse Brigitte Carrère. Et avec le contexte sanitaire, il y a eu beaucoup de retour d’enfants à la maison. Ils étaient partis, ils reviennent et repartent au déconfinement. « C’est un effet boomerang. On a désormais ce sentiment qu’ils peuvent toujours revenir ! »

Continuer la lecture

close

Recevez toute la presse marocaine.

Inscrivez-vous pour recevoir les dernières actualités dans votre boîte de réception.

Conformément à la loi 09-08 promulguée par le Dahir 1-09-15 du 18 février 2009 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel, vous disposez d'un droit d'accès, de rectification, et d'opposition des données relatives aux informations vous concernant.

Afficher plus
Bouton retour en haut de la page