Santé

Routine bien-être : comment se mettre à l’écriture

Qui, enfant, n’a jamais eu de journal intime ? Un petit carnet, souvent fermé avec un cadenas de fortune, où pensées diverses et bilan de la journée étaient quotidiennement consignés ? Cette habitude, nous sommes nombreux à l’avoir abandonnée à l’âge adulte. La faute à un emploi du temps trop chargé, un manque de régularité ou d’envie. Pourtant, l’écriture peut être un plaisir, véritable partie prenante de notre mieux-être mental et physique. Cet été, invitons-nous à (re) mettre des mots dans notre vie. Comme une façon d’arrêter le temps. Et, pourquoi pas, de créer un rituel que l’on conservera tout au long de l’année.

Désacraliser l’écriture

Redoutable outil pour booster la confiance en soi, apprendre à se connaître, structurer sa pensée ou éveiller sa créativité, l’écriture offre de nombreux bienfaits, mais reste pourtant une activité intimidante. On s’imagine souvent que, pour écrire, il faut savoir le faire. « Tout le monde peut écrire, déconstruit Emmanuelle Jay, psychanalyste et art-thérapeute, spécialiste de l’écriture créative et thérapeutique. C’est comme un sport, il faut se muscler. Plus on écrit, mieux on écrit. » Première étape ? S’affranchir du triptyque bureau-carnet-stylo ! On peut poser ses pensées sur sa tablette, avachie sur un canapé. Noter intempestivement ses idées sur son téléphone dans le métro, ou encore recopier une jolie citation sur un ticket de caisse en pleine rue. Tout ça, c’est écrire. Comme le sont également les correspondances que nous entretenons chaque jour via les SMS ou WhatsApp, rappelle Emmanuelle Jay.

Pour Nathalie Sejean, fabriqueuse d’histoires et créatrice du podcast « Faire » et des ateliers Carnet d’idées, « écrire, ça ne signifie pas forcément faire des phrases littéraires et poétiques, ça peut aussi vouloir dire collecter des informations ». Nul besoin donc d’être hautement inspiré, de partir dans de tortueuses introspections ou élucubrations pour s’adonner à l’écriture. S’accorder ne serait-ce qu’un petit moment pour décrire ce que l’on voit devant soi, sans chercher à faire « bien », peut nous plonger dans un certain état méditatif (voir le rituel n° 1 du cahier d’exercices). Le temps de quelques minutes, nous voici donc concentré sur une seule chose : noter une suite de mots. Sans objectif productiviste. Juste comme ça.

Trouver du plaisir

Cette douce transe et le plaisir qui en résulte pourraient s’expliquer par le mouvement qu’écrire provoque, rapporte Marieke Longcamp, professeure à l’université d’Aix-Marseille, spécialiste de la production du langage et de l’écriture. « Si on essaie de faire des boucles, d’écrire en cursive, on fait un geste qui est oscillatoire, et on imprime une sorte de rythme dans notre écriture », commente-t-elle. Cela résonnerait avec un mode de fonctionnement cérébral très important : les oscillations. Mais écrire, c’est aussi ralentir. Bien que les pensées fusent, elles sont obligées d’attendre la main et les doigts pour se matérialiser. Ce temps d’attente est précieux car « il permet de créer d’autres chemins de pensée », raconte Emmanuelle Jay. On peut ainsi être surpris par ce qui naît et accéder à des zones inconnues de soi. C’est ce haïku qui finit en lapsus, cette suite de mots qui révèle une obsession… Nos écrits, peu importe leur nature, recèlent des trésors. Ils sont un terreau ultra-fertile.

Cultiver son compost

« Noter des choses sur du papier aide à éveiller sa créativité, indique Nathalie Sejean. En cristallisant les éléments qui nous interpellent à travers l’écriture, nous créons une sorte de compost créatif, générateur d’idées nouvelles. » Son dispositif de prédilection ? Le carnet d’idées, à emporter partout avec soi. « C’est un outil très humble et accessible, qui permet de passer du temps avec soi-même et de décider de ce que l’on a envie de garder, des petits trésors que l’on a envie d’accumuler dans sa vie, ajoute-t-elle. C’est un travail d’archivage de soi-même, qui donne de la valeur à ce que l’on a vécu. » On y note les pensées qui nous traversent, les choses lues ou entendues. Le tout, sans discrimination et avec spontanéité.

L’important ? Se libérer du joug du « beau ». Car peu importe si on n’a pas le bon stylo, la bonne couleur, s’il y a des fautes ou des to do lists qui cohabitent avec des réflexions profondes. La beauté de l’objet viendra du fait qu’il est vivant, explique Nathalie Sejan. Cependant, pour activer la puissance du carnet, il faut savoir le revisiter. « En général, poursuit-elle, la créativité ne naît pas au moment où l’on note des choses dans son carnet, elle arrive après, quand les sédiments ont reposé, quand le temps est passé et que l’on revisite ce que l’on a traversé. C’est là que se font les connexions et que de nouvelles idées sont générées. » Revisiter son carnet d’idées, ses écrits et ses gribouillis est tout un art, que Nathalie Sejean dispense dans ses ateliers en ligne ( nathaliesejean.com). Au-delà de contribuer à notre croissance personnelle, cultiver notre créativité à travers l’écriture permet d’explorer de nouveaux horizons.

Les règles du carnet d’idées de Nathalie Sejean

1. On choisit un carnet que l’on pourra avoir toujours sur soi.

2. On écrit sans filtre et chronologiquement peu importe la régularité.

3. On revisite ses écrits.

CAHIER D’EXERCICES

Cinq rituels pour sauter le pas, par Emmanuelle Jay, autrice d’« Ateliers d’écriture créative » (éd. Pyramyd).

Matériel : De quoi écrire.

Temps d’écriture : De 2 à 30 minutes selon les rituels.

1. MÉDITATION

Temps d’écriture : 2 minutes.

Fréquence du rituel : Une fois par jour pendant 5 jours.

On commence par mettre une alarme récurrente sur son téléphone. Tous les jours à 15 h 43, par exemple. Lorsque l’alarme sonne, quoi qu’il arrive, on écrit pendant 2 minutes (pas plus), tout ce que l’on veut, dans la forme que l’on veut. La seule contrainte : jouer le jeu et écrire au moment où ça sonne.

2. RECONNEXION

Temps d’écriture : 3 minutes.

Fréquence du rituel : Une fois par jour pendant 5 jours.

Chaque matin, au réveil, on écrit trois phrases courtes. La première exprime comment va notre tête, la deuxième raconte l’état de notre corps, et la troisième parle de notre coeur. Pour s’aider, on peut démarrer chaque phrase par : « Ce matin, ma tête est… » ; « Ce matin, mon corps est… » ; « Ce matin, mon coeur est… »

3. IMAGINATION

Temps d’écriture : 10 minutes.

Fréquence du rituel : Une fois par semaine.

On commence par choisir un objet dans notre sac à main ou autour de nous. Il s’agit maintenant de faire parler cet objet. Il doit s’exprimer à la première personne du singulier, se décrire, raconter son passé, d’où il vient, parler de son propriétaire, s’inventer une vie…

4. INVENTION

Temps d’écriture : 12 minutes.

Fréquence du rituel : Une seule fois.

On démarre un texte par la formule suivante : « Je veux une vie en forme de… » et on explore tout ce qui nous passe par la tête. Cet incipit provient d’un poème de Boris Vian.

5. PARTAGE

Temps d’écriture : De 5 à 30 minutes.

Fréquence du rituel : Autant que l’on veut !

Et si on écrivait avec ses proches ? L’un des participants de ce jeu d’écriture collective soumet aux autres une image (un tableau, une photo dans son téléphone, une page de magazine…). Sur une durée imposée, allant de 5 à 30 minutes, chacun écrit un texte inspiré par l’image. Les textes sont ensuite lus à haute voix.

ET LE CERVEAU DANS TOUT ÇA ?

Lorsque l’on note des mots, tout un ensemble de régions du cerveau s’active au même moment et se coordonne pour pouvoir produire de l’écriture. Il y a l’hémisphère gauche, celui qui sert à traiter le langage de manière générale (il nous aide à retrouver l’orthographe des mots, comment ils se composent, comment les lettres s’organisent, etc.), et le cervelet, qui va mobiliser les doigts, la main, parfois le coude, soit des processus de coordination complexes afin que le langage se transforme en geste. Ces deux régions s’activent simultanément, que l’on écrive à la main ou sur un clavier, explique la chercheuse Marieke Longcamp, même si le processus n’est pas exactement le même dans les deux cas.

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