Santé

Aliocha (41 ans) et Nina (39 ans) : « Le travail de ma compagne me faisait honte »

Aliocha a 41 ans et est en couple depuis 12 ans avec Nina, 39 ans. Leur couple est, depuis quelques années, soudé, mais il a essuyé des déboires au début de leur histoire. En effet, Aliocha avait honte du travail de sa compagne et n’arrivait pas à gérer ce sentiment. 

Aliocha ne se définit pas comme quelqu’un de snob : « Je viens d’une famille de classe moyenne. J’ai fait des études mais je ne suis pas médecin ou ingénieur. Je suis juste prof parce que c’est un métier que j’aime et absolument pas pour la reconnaissance sociale. Heureusement d’ailleurs parce que je pourrais attendre longtemps. J’ai rencontré Nina en soirée avec des amis. Elle était là avec un groupe de ses amies à elle pour fêter la récente rupture de l’une d’entre elles. C’était une soirée arrosée pour elle comme pour moi. Mais pourtant on a eu un coup de coeur et on a échangé nos numéros. Ensuite, le coup de coeur s’est confirmé. Il y a eu un rendez-vous puis deux puis trois. Très vite, on ne pouvait plus se lâcher. Elle était célibataire depuis plusieurs années et moi depuis quelques mois. On avait la place dans nos vies pour une histoire d’amour. Et aucun d’entre nous n’a douté que c’était une histoire d’amour qui était importante. Au début, donc, c’était la lune de miel. Et j’avais peut-être la tête à autre chose mais je n’ai pas commencé à la juger tout de suite. Aussi parce que dans le fond, ça ne me ressemble pas. »

Mon esprit était en désaccord avec mon coeur

Mais, plus le temps passe, plus Aliocha a honte du travail de sa compagne : « Elle travaille comme esthéticienne. Je sais que c’est un travail qui lui tient à coeur et qui a du sens pour elle. Exactement comme le mien pour moi. Je sais qu’elle le fait bien parce que c’est important pour elle. Donc j’aurais pu être fier de ça. Mais je ne sais pas, je n’ai pas réussi. Quand je parlais de notre histoire et qu’on me demandait de parler d’elle, je n’arrivais pas à dire qu’elle bossait dans un institut de beauté. Ça me paraissait nul. J’avais peur qu’on la juge et qu’on me juge au passage. Au final, ça en dit plus sur moi que sur mes amis ou ma famille. Je suis celui qui en a fait un drame alors qu’il n’y avait pas de raison. Parfois, j’arrivais à éluder la question et parfois je mentais. Je disais qu’elle travaillait dans la com’. Personne ne comprend tout à fait ce que ça veut dire mais ça fait sérieux. »

Aliocha propose donc de faire une thérapie de couple : « Je lui ai dit la vérité. Que je mentais sur elle parce que j’étais une merde qui n’était pas capable d’assumer qui elle était vraiment. Mais que j’avais envie que ça s’arrange et qu’on aille au delà de ça. Je savais que c’était risqué parce que c’était assumer au grand jour que j’avais été incapable d’être vraiment fier d’être avec elle. Mais elle m’a compris. Je pense qu’on ne se rend pas compte d’à quel point on juge ces métiers. Il y a des clichés et des fausses croyances sur les esthéticiennes. Elles ne sont pas toutes super bêtes. En fait, je n’en ai jamais croisé de bête. Elles ont toutes des raisons pour faire ce métier. Par passion ou simplement pour manger. Et franchement on aura beaucoup à gagner à réaliser à quel point ce n’est pas un métier facile. J’étais conscient de tout ça même si je n’arrivais pas à le ressentir vraiment. Là, mon esprit était en désaccord avec mon coeur. Nina l’a compris et elle a accepté la thérapie avec moi pour nous donner une chance. »

Un métier (trop) critiqué

Nina ne pense jamais qu’elle aurait pu être blessée par les confidences d’Aliocha sur son travail : « Je ne l’ai pas pris personnellement. Des horreurs sur les esthéticiennes, on en entend toute la journée. Il y a même des personnes qui pensent qu’on est un peu un des escorts et qui nous traitent mal. Alors je n’ai pas été étonnée qu’Aliocha se débatte avec des pensées comme ça. Ce qui m’a touché, c’est qu’il voulait travailler dessus. Qu’il ne voulait pas laisser notre histoire être gâchée par tout ça. Il avait vraiment envie qu’on avance. Et je me suis dit que, pour lui, j’étais prête à le faire. »

La thérapie a

marqué le début officiel de notre histoire et l’engagement qu’on a décidé de prendre l’un avec l’autre

Nina est étonnée de la façon dont la thérapie se déroule : « On a pu parler de nous et de nos histoires personnelles mais il y a eu aussi beaucoup d’exercices à faire à la maison. Aliocha devait parler de moi à un maximum de gens et ne pas cacher mon métier. Moi, je n’ai pas eu grand chose à faire à part l’accompagner là dedans. Je dois dire que je suis fière de lui. Dès les premiers rendez-vous, il a mis en pratique ce que le psy lui avait demandé. Partout où il allait, il disait qu’il était fier de moi et de la façon dont je faisais mon métier. En thérapie, on parlait aussi des raisons qui font qu’on a besoin d’être socialement valorisé par le métier de l’autre. Et on déconstruit un peu tout ça. Aliocha a beaucoup parlé. Il a été très actif dans tout ça. Moi, je n’avais pas le sentiment d’avoir un problème avec quoi que ce soit mais j’ai beaucoup appris. Et ça a libéré un peu le petit poids que je pouvais avoir sur les épaules à propos du jugement des autres. Je ne regrette pas. Mais c’est surtout aussi parce que ça a marqué le début officiel de notre histoire et l’engagement qu’on a décidé de prendre l’un avec l’autre. Pour moi c’est un bon souvenir à cause de ça. C’était juste une façon pour lui de me dire « je t’aime » et « je veux apprendre à être fier de toi et de ce qu’on a. » »

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