Santé

Allô, Giulia ? « Jamais un homme ne m’a rendue aussi heureuse… mais il est marié »

« Chère Giulia,

Je ne suis pas très à l’aise à l’idée de vous écrire, en fait. Comme à chaque fois que je parle de Christophe… Si je me laisse aller, je commence par vous dire que je suis très, très, très amoureuse de lui. Que ça fait un an et demi que ça dure et que je ne me suis jamais sentie aussi heureuse. Et aussi aimée. Des textos comme les siens, il faudrait que toutes les femmes du monde en aient… Et puis une écoute, une attention à moi : je n’ai JAMAIS vu ça, chez un mec. Il est patient – je suis un peu relou au quotidien, à m’énerver sur plein de trucs, à m’angoisser, à ruminer… et il est le seul à savoir me faire rire de tout. Et de moi. Bon… Vous l’attendez, le « mais » ? Le voilà : au moment où je vous fais la liste de toutes ses qualités, j’entends toutes mes copines, sans exception, me dire, systématiquement, dès que je parle de lui… « MAIS il est marié ».

Oui. Il l’est. Et je sais que ça n’est pas bien. Et que les mecs mariés ne partent pas. J’en ai assez souffert comme ça – j’ai tendance à les collectionner, les mecs mariés… Dieu sait pourquoi… Mais là, c’est pas pareil. Lui, je sens, je sais qu’il va partir. Alors en attendant, c’est vrai que je passe par des moments pas très cool… Quand il doit raccrocher parce qu’il rentre chez lui, quand je ne peux pas le voir du week-end, parce qu’il est avec elle, que je voudrais que ce soit moi…  Je sais aussi que l’heure tourne, que j’ai 39 ans et que je n’ai plus beaucoup de temps si je veux un enfant. Oui. Je le sais, je le sais, je le sais. Mais – tiens, voilà un autre « mais »… Le pire, c’est que, malgré tout ça, c’est avec lui que j’ai été le plus heureuse de ma vie. C’est fou, non ? Mais surtout, je fais quoi ? Je me dis qu’à mon âge, il est temps d’être un peu raisonnable ? J’ai tenté, plusieurs fois, de le quitter dans ma tête… Impossible. Trop dur. Trop de manque. J’ai peur de ne pas y arriver. Est-ce que je dois, vraiment, renoncer à cet homme là ? Ou est-ce que j’ai raison d’attendre, parce qu’un jour, il sera vraiment à moi ? » – Maya, 39 ans

Chère Maya,

Je ne suis pas cartomancienne, pardon. Mais je suis quand même en mesure de vous assurer que, non, il ne sera jamais vraiment « à vous », parce que personne n’appartient jamais à personne… À la fois, tant mieux, car vous non plus ne serez jamais la propriété d’un homme, ce qui vous donne un peu plus de liberté qu’un tabouret.

Je ne suis pas sociologue, mais, au doigt mouillé, je peux vous garantir que le monde a changé. Que, si les femmes sont toujours majoritairement à l’origine des divorces, les hommes, apprennent peu à peu à assumer leurs envies, leurs amours et leurs choix. « Les hommes ne partent pas » est une phrase aussi vieille que les années 50, glorieuse époque d’une famille modèle, organisée pour et par le chef de famille : à lui la sphère publique, la carrière, les galipettes ; à madame le tablier, l’électroménager et les enfants bien peignés. Sans oublier, sur ces affiches publicitaires qu’on a tous encore en tête, cachée, toute petite, dans un placard, la maîtresse de Monsieur, forcément amorale, forcément malheureuse, forcément désespérée, coincée dans l’attente sans fin d’un amant certes, volage, mais à qui on reconnaîtra surtout d’avoir le sens des responsabilités.

Je ne suis pas historienne, mais je crois savoir que ce temps là est passé. Et que les femmes, gagnant le droit de travailler, ont acquis, du même coup, celui de s’éclater un peu. L’image repoussoir de la « fille-mère » et de son bâtard s’efface, doucement, de nos mémoires, laissant entrevoir, pour nous toutes, une autre possibilité : celle ne de pas avoir d’enfant. Celle de n’être « la femme de » personne. Celle de pouvoir refuser les contraintes du couple et du quotidien. Attention : ça n’est pas une obligation, juste une option. Et elle pourrait bien être la vôtre… Car… Sans être psy, ni Dieu non plus – ce qui tombe plutôt bien, car, de vous à moi, Dieu n’a pas grand chose à voir là-dedans… Je me pose aussi, à vous lire, la question du « pourquoi ». Comme dans : « pourquoi, Maya, cette collection d’hommes mariés ? » À moins de se dire que, peut-être, au moins pour un temps, au moins en ce moment, l’intermittence de la relation, les délices de la transgression, et l’urgence du désir, quand il est clandestin, ne soient justement, ce qui peut vous combler. Ca, il n’y a que vous qui le sachiez.

Vous êtes seule à savoir si, dans la balance, les plaisirs l’emportent sur la souffrance. En ce moment. Ici et maintenant. Et c’est la seule boussole valable. Vos copines, aussi bien intentionnées soient-elles, ne sont ni dans votre tête, ni dans votre cœur, encore moins dans votre lit. Comme la morale n’a rien à y faire : on se parle de personnes majeures, vaccinées, et consentantes. Christophe est grand, vous l’êtes. Suffisamment pour savoir si vous êtes bien traitée dans cette histoire – oui, oui, je sais, il y a aussi quelque part, une femme trompée… Mais comment dire ? Ca, c’est le problème de Christophe, pas le vôtre. Préoccupez vous de vous. Et posez-vous la question : voulez-vous, VRAIMENT d’une vie avec enfant ? Bonne nouvelle : les femmes ont aussi acquis le droit de dire non. Pas trop fort, et pas totalement, mais quand même. Si, en revanche, la réponse est oui, oui, vous voulez des enfants, oui, vous voulez Christophe tous les jours, même avec les chaussettes sales sur le radiateur et l’humeur de dogue au matin… Alors vous êtes arrivée à un de ces moments de là vie où il va vous falloir creuser : en vous, votre vécu, vos expériences, votre éducation, pour réconcilier l’envie, le projet, le rêve… Et la réalité, contre laquelle vous butez. Vraie question : quelle place pensez-vous mériter, dans la vie en général, et dans les relations amoureuses, en particulier ?

Je suis, simplement, votre lectrice, mais croyez-moi, vous avez, en vous, toutes les clés pour savoir si vous êtes vraiment dans une impasse, et alors vous trouverez comment en sortir… Ou sur votre route à vous, qui, même si elle ne vous emmène pas tout droit à la maison de campagne de la famille Ricorée, vous correspond suffisamment pour vous donner le bonheur que vous méritez. 

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